R&D sinon rien !

Kevin Deplanche
Grow Up
Published in
5 min readApr 24, 2020

Niveau de lecture : intermédiaire ⚫⚫⚪

Au sein d’une organisation, le processus d’innovation s’appuie de manière intense sur la fonction Recherche et Développement. Le processus d’innovation peut être appréhendé comme une activité d’exploration de nouveaux concepts et/ou de nouvelles connaissances, qui va alimenter le processus de recherche et développement. La jonction entre ces 2 processus peut se faire au travers de la gestion des avant-projets. Le résultat des avant-projets va ensuite être l’input du processus de recherche et de développement.

Tout l’enjeu du processus d’innovation est de pouvoir guider les activités de R&D en identifiant des axes de recherche à potentiel et les valeurs d’usage à la base de solutions futures.

Quant à la fonction Recherche et Développement, tout l’enjeu est de pouvoir, à partir d’une idée ou d’un corpus de connaissances, délivrer des faisabilités industrielles de solutions et de proposer des projections pour les phases de fabrication et de commercialisation.

Nombres de notions et processus s’enchevêtrent lorsqu’il est question de définir les sous-jacents du processus d’innovation. Pour baliser les activités de Recherche et Développement, l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique) a publié un manuel proposant une référence méthodologique internationale pour les études statistiques des activités de Recherche et Développement.

Ce manuel couvre 2 objectifs principaux :

  • Préciser les contours de la Recherche et Développement et définir les phases de recherche fondamentale, de recherche appliquée et de développement expérimental,
  • Et proposer des recommandations applicables à la collecte de données relatives à la Recherche et Développement.

Ce manuel propose ainsi une définition unique et uniforme des activités de Recherche et Développement. Ressortons les vieux grimoires de l’histoire ⬇

La conférence qui donna l’impulsion à l’écriture de ce manuel se déroula à la Villa Filconieri à Frascati en Italie en 1963. Plusieurs versions de ce manuel ont vu le jour. La dernière édition (en français) date du mois de juin 2015 (448 pages). Il est à noter que d’autres manuels de ce type existent pour notamment préciser les notions d’Innovation (Manuel d’Oslo) et des Ressources Humaines (Manuel de Canberra).

Le manuel de Frascati est devenu une référence, tout comme son référentiel utilisé pour définir les activités de Recherche et Développement. Les agences publiques de financement, la commission européenne ou encore le législateur français, utilisent ce cadre pour définir les natures de dépenses éligibles aux mesures de soutien à la Recherche et Développement, et plus globalement à l’innovation. Les aides proposées par la BPI France ou le Crédit Impôt Recherche (CIR) en sont de parfaits exemples.

Pour information, le BOFIP (i.e. Bulletin Officiel des Finance et Publiques-Impôts) précise que la définition des trois activités éligibles au CIR reposent sur les définitions portées par le Manuel de Frascati, bien que des nuances peuvent y être apportées, plutôt dans un sens restrictif.

Ainsi, pour financer sa Recherche et Développement, il est important d’identifier les bons dispositifs ou mesures de soutien et avoir une vue précise des natures de dépenses attendues par les financeurs. Assurer de manière pertinente cette association, permet de limiter les refus de financement ou/et les risques en cas de contrôle.

Et puis, soyons honnête… on aurait pu l’appeler le manuel de Rome. On s’en serait mieux souvenu 😉

Définition des activités de Recherche et Développement selon le manuel de Frascati

D’après le manuel de Frascati, « la recherche et le développement expérimental (R-D) englobent les travaux de création entrepris de façon systématique en vue d’accroître la somme des connaissances, y compris la connaissance de l’homme, de la culture et de la société, ainsi que l’utilisation de cette somme de connaissances pour de nouvelles applications. »

Le manuel de Frascati indique qu’il existe trois activités recouvrant le terme de Recherche et Développement :

  • La recherche fondamentale qui « consiste en des travaux expérimentaux ou théoriques entrepris principalement en vue d’acquérir de nouvelles connaissances sur les fondements des phénomènes et des faits observables, sans envisager une application ou une utilisation particulière ».
  • La recherche appliquée qui « consiste également en des travaux originaux entrepris en vue d’acquérir des connaissances nouvelles. Cependant, elle est surtout dirigée vers un but ou un objectif pratique déterminé ».
  • Le développement expérimental qui « consiste en des travaux systématiques fondés sur des connaissances existantes obtenues par la recherche et/ou l’expérience pratique, en vue de lancer la fabrication de nouveaux matériaux, produits ou dispositifs, d’établir de nouveaux procédés, systèmes et services ou d’améliorer considérablement ceux qui existent déjà ».

Le manuel de Frascati compile une série de questions à se poser pour définir le périmètre des activités de Recherche et Développement et, de fait, exclure les activités périphériques non assimilables à de la Recherche et Développement (i.e. enseignement et formation, autres activités scientifiques et technologiques connexes, autres activités industrielles, et administration et aux activités de soutien).

Il s’agit des critères complémentaires permettant de distinguer la R&D des activités scientifiques, technologiques et industrielles connexes (source : OCDE).

Les résultats de l’approche portée par le Manuel de Frascati permettent notamment :

  • De vérifier si des activités de Recherche et Développement sont éligibles à un financement public pour la Recherche et Développement,
  • Et de définir le pourcentage de financement de dépenses de Recherche et Développement éligible : les activités de Recherche et Développement plus en amont, donc les plus risquées pour une société, seront généralement financées sous la forme d’une subvention (% de financement allant de 25% à 100%) ; les activités les plus proches du développement industriel seront généralement financées sous la forme d’une avance récupérable ou sous la forme d’un prêt (ex : Avance récupérables ou prêt à Taux Zéro pour l’Innovation de BPI France).

En bref,

La frontière entre les activités de Recherche et Développement et le monde de l’ingénierie pouvant être relativement complexe à appréhender, une attention particulière est à déployer pour qualifier et caractériser les activités de R&D menées au sein d’une organisation, surtout en période de recherche de financements externes.

Cette démarche est importante : elle permet de vérifier une éligibilité par rapport à des critères de financement, et de fait, limiter les risques en cas de contrôle (par ex : lors d’un contrôle du CIR, les activités déclarées par une société mais jugées non éligibles font l’objet d’un redressement).

Ces travaux ont le mérite de proposer un référentiel méthodologique commun (bien qu’assez complexe)… tout en nous faisant voyager un peu !

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