Innovation, Transformation, Digital et modes de dispersion #opus2

Fabrice Tranier
Hack40
Published in
7 min readApr 15, 2019

Opus 2 : Les nouvelles méthodes ou les dogmes qui tuent l’émergence d’une véritable culture incarnée et durable

La transformation des entreprises s’opère sur l’apprentissage de nouvelles approches business et méthodes de travail en lien avec les usages du digital. Certaines entreprises appliquent hélas les mêmes principes que par le passé : édifier des chapelles et enseigner une vérité.

Le Design Thinking au coeur de l’humain

Au début était le Design Thinking, inventé par Stanford et sa D.School et développé par IDEO, l’entreprise aux multiples innovations développées via le prototypage rapide; aujourd’hui je vois des instituts, de nouvelles écoles avec des diplômés, certifiés conformes afin que les services ressources humaines des entreprises puissent recruter facilement ces nouveaux experts en CDI ou en consultant. Je rencontre les responsables des multiples dispositifs de transformation des entreprises me dirent qu’ils ont recruté la perle rare. Dans chaque région du monde, chacun à sa tribu et défend sa vérité. On parle d’ateliers étiquetés “creative matrix” “visualize the vote”, … et tout un tas de codes : si tu n’as pas le code c’est que tu n’es pas expert et si tu n’es pas expert, tu ne peux pas former mes équipes. Pourquoi recréer de la complexité pour changer les comportements au sein de l’entreprise ?

Attend ! Attend ! L’histoire a commencé avec Herbert Simon pour être précis et ce monsieur, prix nobel d’économie en 1978, expliquait le design dans le management en étudiant les modes d’organisation dans les entreprises sans brandir un langage codifié. Bref, dépassons les sensibilités académiques et faisons simple : le problème c’est la relation à l’autre qu’il soit client, collaborateur ou partenaire. Le travail à opérer c’est de repasser de l’ère industrielle, du processus à la chaîne, à une relation d’écoute, d’empathie et de co-création / co-développement pour trouver ensemble de nouvelles solutions imparfaites au début et de permettre de répondre aux défis du 21ème siècle. En somme, nous devons nous adapter à une relation en réseaux qui va au-delà des frontières de l’entreprise et comprendre les évolutions portées par le digitale.

On constate la volatilité des clients qui ne croient plus en des marques historiques, qui scrutent les forums, les comparateurs pour à minima avoir le prix le moins cher et au fond recherchent le produit qui correspond à leur besoin personnel. On observe aussi le collaborateur qui cherche son sens et son évolution dans une organisation structurée en cases et en silos où le doux rêve du mutation et d’un changement de métier se termine souvent en impasse et retour à la case départ ; mais encore le talent qui est passé par les cases diplômes bien notés et qui cherche un challenge pour montrer sa capacité à être un nouveau leader. Et l’entreprise continue de marcher à l’envers, elle simplifie le problème car elle pense global plutôt que local, mass market plutôt que niche, volume et recherche d’accréditation d’organismes séculaires pour attirer des humains qui par opposition ne parlent pas en code mais avec des mots simples qui leurs sont propres. Les grandes stratégies de transformation sont dès lors portés par des outils, des codes au niveau globale plutôt que des Hommes incarnants un nouvel état d’esprit et diffusants au quotidien à leurs équipes cette nouvelle relation.

Le lean startup moteur de la machine à produit / service

Au début était le Lean Startup avec Eric Ries, son auteur devenu conférencier rentier appelé dans le monde entier comme un sauveur venu du monde startup. Et chez nous ce sont des hordes d’ingénieurs, de chefs de projet/produit qui nous font l’apologie des boucles de développement rapide et de l’agilité : si tu développes un soft en 1 mois, t’es un gars du Lean Startup.

Stop ! il faut penser business plan, travailler sur les ressources à allouer dans ce projet, et pas des ressources sur deux ans comme dans vos projets habituels mais des ressources à minima pour valider un produit minimum viable (MVP) et là où j’aime l’approche complémentaire du design thinking c’est que même une maquette fera l’affaire sans une ligne de code car svp au départ dans une startup on est pas payé au mois en CDI. Au départ, on sait qu’il faut optimiser ses efforts et faire valider le besoin au plus vite par plusieurs utilisateurs, mieux valider qu’ils sont prêts à payer pour cette solution. Combien d’applications digitales sont développées en un temps record et au final personne ne veut payer ? Le lean startup c’est quand même l’apanage du monde IT. Avec le manifeste du monde AGILE on était déjà verni et beaucoup n’ont toujours pas compris la notion d’utilisateur.”T’inquiète pas on a un product owner entre nous et les utilisateurs ; il leur parlera et il va les convaincre”. Et voilà comment on a traduit le livre d’Eric Ries qui mettait en valeur la difficulté à trouver la valeur, pire qui faisait l’avènement de la remise en cause, du pivot régulier avant de trouver son marché en une méthode rigide dictée par la technologie, la faisabilité qui fait de l’expert tech. le seul à exaucer les rêves.

Ok donc on ne change rien et on continue à travailler comme d’habitude avec juste de nouveaux mots à apprendre. Non, vous allez tous apprendre le business, les business modèles et la relation client. Je veux bien croire en la sérendipité et la bienveillance mais franchement c’est beaucoup de travail et d’écoute avant d’obtenir de la désirabilité et un produit minimum viable économiquement et encore beaucoup plus de travail pour se différencier sur le marché interne d’une entreprise ou local et scaler ensuite à international. Alors il faut changer sa façon d’investir sur des nouveaux produits et services et remettre en cause son propre modèle économique dont les marges s’effritent année après année attaquées par des startups qui incarnent ce nouveau modèle de développement et qui proposent de nouveaux usages en adéquation avec les consommateurs.

Le Growth Hacking : l’accélérateur de croissance

Au début était le growth hacking que certains ont ramené au marketing digital pour le mettre dans une nouvelle case comme il l’avait fait pour le community manager ou les campagnes d’achat de mots clés Google. Les personnalités du growth hacking ont trouvé leur grosse startup pour assouvir leur passion : Facebook, Google, Uber… La mission est simple, l’expert growth hacking c’est la ou les personnes dédiées à la croissance d’une entreprise, à priori startup car on n’a rarement vu une grande entreprise affichait un taux de croissance à deux chiffres chaque année. Penser croissance c’est imaginer et tester constamment, souvent manuellement et ensuite automatiser tous les chemins possibles pour acquérir de nouveaux clients et en volume croissant. Le terrain de jeu est 100% digital à la base car les outils digitaux sont souvent gratuits dans leur utilisation et permettent de tester rapidement des messages, de fédérer des utilisateurs intéressés par une solution à leurs problèmes.

Nous nous sommes vite rendus compte que beaucoup de techniques étaient basées sur des constantes (un contenu, un process disruptif, des communautés à développer et à ramener à son projet…) et que finalement le schéma du “growth hacking funnel” guidait l’effort sur des étapes claires et surtout mesurables à piloter : acquérir, activer, retenir et étendre. Le statut quo politique de certaines entreprises vis à vis de l’innovation nous à même alerté sur le fait d’utiliser le growth hacking en interne pour promouvoir une nouvelle solution et convaincre les décideurs d’investir plus sur un projet. Dans le monde physique, ces méthodes ont aussi lieu pour l’industrie du retail comme les autres secteurs. Nous sommes donc d’accord qu’un growth hacker ne passe pas son temps à lire des use cases sur internet et à montrer ce que font les autres mais bel et bien à appliquer ces nouvelles techniques à la mano pour promouvoir et développer le nombre de client sur son produit ou service. L’étape suivante consistant à automatiser ces techniques, souvent par du code ou des outils dédiés lorsqu’elles fonctionnent, est plus complexe à réaliser à l’image du marché et de la surexposition des clients potentiels à de l’information.

Alors, vous faut-il ingérer ces méthodes et ce jargon par coeur comme à l’école ? Vous faut-il travailler avec vos RH pour établir la fiche de poste précise avec les compétences et surtout les certifications associées ? Faut-il enfermer ces méthodes dans un nouveau silo ? Attention de la même manière que le monde est incertain et que le futur ne se décrète pas il est très risqué de vouloir s’enfermer dans un discours académique réducteur à toutes ces méthodes.

Nous devons rester focus sur l’objectif final de ces méthodes et de ces ressources qui doivent se pratiquer dans des environnements différents pour devenir à force de transmission et de confrontation à des contextes différents un état d’esprit partagé et des outils pratiques et efficaces au service des hommes et pas l’inverse. Ces méthodes convergent vers un seul résultat : accélérer la résolution de problèmes et faciliter la transformation des entreprises afin de s’adapter à leur marché voire d’en conquérir de nouveaux.

Nous vous proposons plusieurs principes de précaution dans votre quête de méthodes et non de dogmes :

  • Cherchez des partenaires ouverts à d’autres méthodes et approches que celles qu’ils prônent
  • Dites à vos RH de rechercher des ressources atypiques ou les certifications ne sont en aucun cas un pré requis voire surement un arbre qui cache la forêt du vide
  • Une méthode cela s’incarne et maîtriser les codes ne détermine pas l’efficacité de l’expert sur le terrain des projets
  • L’apprentissage de ces méthodes demeure essentiel pour étendre de bonnes pratiques à toute une organisation mais un corpus simplifié associé à des outils efficaces sera amplement suffisant pour augmenter le taux de pénétration à d’autres départements
  • Ne créer pas de nouvelles écoles par pitié … l’école c’est fini depuis longtemps, nous recherchons des pratiquants ayant fait leurs preuves dans des projets à succès, pas le fan club qui copie d’une mauvaise manière des épreuves du feu vécues.

Si vous avez apprécié la franchise et la lucidité de cette article, marque de fabrique du Hack40, restez connecté car le troisième et dernier opus va traiter du financement des transformations car tous ces chantiers ont un prix et les doublons, les affrontements entre différentes entités peuvent cacher un véritable gâchis et générer beaucoup de frustration à tous les niveaux.

Fabrice Tranier — co founder Hack40

Ex Co founder Kappa Valor, CTO Regime Coach, COO Digital Virgo, Mentor pour Numa, Schoolab, Ticket for Change & TechStars.

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Fabrice Tranier
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