La polyamorie et la pleine lune

Jena Pham Selle
Yarrow
Published in
3 min readJun 17, 2018
Photo by Ganapathy Kumar on Unsplash

“Ne regarde pas la pleine lune avec elle. Ça me briserait le cœur.” Je sais que ce n’est pas raisonnable, alors je ne demande jamais, mais j’aimerais pouvoir. Je sais qu’il ne faut pas, je sais que la Lune ne m’appartient pas, et lui non plus. Être sous la lune est une chose différente entre chaque paire de personnes prises au hasard, je sais, mais j’ai l’impression que c’est à moi.

Ne la laisse pas se retourner sur l’escalator pour t’embrasser comme je le fais.

Ne la laisse pas tracer des arabesques sur ta nuque avec ses ongles après avoir baisé.

Ne la laisse pas s’endormir sur ton épaule, dans le creux de ton bras, ce creux qui est d’une forme parfaite pour m’y blottir.

Je sais profondément que ce n’est pas que pour moi, ce creux est en forme d’humain, pas en forme de moi, mais si on faisait comme si ? Comme si tu avais été construit juste pour moi, quel rêve sympathique…

Faisons comme s’il y avait des règles qui pouvaient nous protéger, comme si, en restant pile dans les bonnes limites, one ne se ferait jamais mal. Faisons comme si on pouvait légiférer nos sentiments, suivre la procédure, faisons comme si un règlement et une page de Choses qu’on ne doit pas faire serait simple, comme une liste de courses. Tu ne regardes jamais la lune avec elle et je ne laisserai personne écarter les mèches rebelles de mon visage. Je ne laisserai personne m’embrasser les orteils, ou cacher mon visage pendant les films d’horreur. Je ne danserai jamais un slow dans la cuisine avec quelqu’un d’autre que toi.

Jusqu’à ce que je danse, dans une autre cuisine, avec quelqu’un qui n’est pas toi. La danse est différente, bien sûr. Iel ne me tient pas comme tu me tiens, iel était en train de préparer le dîner, et je l’ai touché·e, ça l’a attiré·e vers moi, et sans nous en rendre compte, nous étions en train de danser. Ça ne ressemble pas à une imitation, ni à une invasion de notre espace, de ton espace, de mon espace avec toi. Ça n’est rien d’autre qu’une danse avec quelqu’un d’autre. C’est intrinsèquement formidable, et complètement différent.

Voilà pourquoi ce serait une règle stupide ; on peut interdire une activité, mais on ne peut pas contrôler l’intimité entre deux personnes, la façon dont un acte arbitraire peut sembler magique, l’alchimie, qui opère. Ces choses ne sont pas des compartiments qu’on peut fermer ou barricader, ce sont des expériences de vie, des moments vécus. Ce sont des blocs de construction de connexions que ni toi, ni moi ne pouvons prévoir. Il faut que nous ayons confiance dans ce que nous avons construit ensemble, et toutes les façons uniques de nous donner du bonheur réciproque. La lune sera magnifique ce soir, que tu tiennes ma main ou une autre pendants que tu regardes le ciel. Et quand il y a un feu d’artifice entre deux personnes, on n’a pas vraiment besoin de la lune pour le voir.
Voilà notre règle : nous pouvons ressentir ce que nous ressentons.

Traduction de Her dirty little heart. L’original est ici : http://herdirtylittleheart.com/post/161642088041/ethical-non-monogamy-and-the-full-moon

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