Outdoor education : une école « dans, par et pour l’environnement »

Des enseignantes et enseignants ont suivi deux journées d’étude autour de l’éducation en extérieur en octobre 2020. Cette pédagogie innovante veut reconnecter les élèves avec le monde et les sensibiliser aux enjeux planétaires.

Équipe HEP Vaud
Trait d’union HEP Vaud
4 min readJun 4, 2021

--

À Cully, des enseignants s’entraînent à enseigner en extérieur — Photo par Nora Foti

Une école « dans, par et pour l’environnement ». C’est ce que proposent les formateurs de la HEP Vaud, qui ont organisé en octobre dernier un événement autour de l’« Outdoor education ». Traduit en français par « éducation en extérieur », le terme désigne une pédagogie alternative qui favorise l’apprentissage en extérieur. Dans les années 1970, la fonction principale de l’école était d’instruire, produire et sélectionner. Aujourd’hui, la dimension d’instruction est toujours présente, mais la société a changé : un rôle plus important est attribué à l’éducation des élèves. C’est dans cette optique que se profile l’Outdoor education, dont la philosophie est de former les citoyens de demain en les reconnectant avec le monde qui les entoure.

Dehors ou dedans ? La question qui fâche

Lorsque l’on demande aux partisans de l’Outdoor education pourquoi faire l’école dehors plutôt que dedans, les réactions sont diverses. Certains pédagogues répondent que cette pédagogie permet de travailler à partir des perceptions et des émotions, une démarche qui a été longtemps occultée à l’école. Selon eux, mettre en valeur les ressentis pendant l’apprentissage permet aux élèves de se sentir concernés par le monde qui les entoure et ses enjeux. D’autres enseignants sont agacés que l’on compare leurs méthodes à l’enseignement traditionnel. Ils expliquent que l’intérêt derrière cette pédagogie tient dans un équilibrage plus fort entre les dimensions de l’instruction et de l’éducation. « On enseigne, mais avec des paramètres en plus, souligne Ismaël Zosso, formateur à la HEP Vaud, à l’origine de ces journées, le paramètre des acteurs du lieu, le paramètre des conditions du lieu, le paramètre émotionnel. »

Les lieux visités tiennent donc une place centrale dans cette pédagogie. En les exploitant, les élèves peuvent apprendre des notions touchant à toutes les disciplines scolaires. Par exemple, les jeunes peuvent découvrir de la physique en examinant le dénivelé d’une colline. Lucien Reymondin, enseignant en économie, explique que les élèves ne reçoivent qu’une réalité réduite des concepts qu’ils voient en classe : « En apprenant dehors, les élèves peuvent s’immerger dans un lieu et se rendre compte que les acteurs sont vraiment présents, qu’ils ne sont pas seulement des flèches sur un schéma ».

Ramener les élèves dans le monde

Derrière l’éducation en extérieur se cache également un constat inquiétant de la part des enseignants : certains élèves sont déconnectés de tout environnement autre qu’urbain. « C’est impressionnant de voir qu’il y en a qui ne se sont jamais déplacés dans une forêt, ou qui ne savent pas reconnaître un veau », déclare Nadia Lausselet, chargée d’enseignement à la HEP Vaud, et co-organisatrice de ces journées. Ce constat souligne un enjeu clé de cette pédagogie : réagir aux défis de l’anthropocène, qui désigne la période où les humains sont devenus une force ayant des répercussions semblables à une ère géologique sur notre écosystème. Pour les pédagogues, remettre les jeunes en phase avec l’environnement assure donc une durabilité pour la planète.

Toujours dans le but de reconnecter les élèves avec le monde dans sa diversité, les partisans de l’Outdoor education alertent sur des phénomènes tels que l’hyper-connectivité et la sédentarité extrême chez une partie des jeunes. Certains notent également un changement concernant la forme physique de leurs élèves par rapport à autrefois. « J’ai dû apprendre à marcher à une élève de 14 ans, s’exclame Ismaël Zosso, ça ne m’était jamais arrivé en 20 ans d’enseignement ! » Bien qu’extrêmes, ces anecdotes restent révélatrices d’un changement sociétal que les enseignants tentent de tempérer.

L’école de demain, une école dehors ?

L’Outdoor education fait face à plusieurs défis. Actuellement, celle-ci se pratique majoritairement en école privée, plus flexible, ou, dans le public, à l’école primaire. Cette pédagogie, qui se présente comme formatrice du citoyen de demain, est donc accessible surtout aux plus aisés. Cette situation est due à de multiples facteurs, comme par exemple la rigidité de la forme scolaire actuelle ou la remise en question de pratiques existantes par l’Outdoor education. Les enseignants du secteur public doivent donc parfois se battre pour faire passer leurs idées. « On a des jeunes enseignants motivés qui demandent à faire une sortie dans leur établissement, auxquels on répond qu’ils risquent de ruiner leur carrière. », raconte Nadia Lausselet. L’école dehors n’est donc pas soutenue par tous et peine à se mettre en place dépendamment de l’établissement. Difficile alors de savoir ce que l’avenir réserve à cette pédagogie. Cependant, une chose est sûre : les partisans de l’Outdoor education sont déterminés à faire entendre l’urgence d’éduquer les jeunes aux enjeux planétaires, auxquels ces derniers feront un jour face.

Plus d’informations : lessentiers.ch & hepl.ch/outdoor-education

Article : Nora Foti

--

--

Équipe HEP Vaud
Trait d’union HEP Vaud

La Haute école pédagogique du canton de Vaud (HEP Vaud) propose la gamme complète des prestations de formation aux métiers de l’enseignement.