La mouette qui voulait être reine.

Albéric
Histoire d’une image
4 min readAug 21, 2022

Isla Holbox, Yucatan, Mexique
31 mai 2004

#ImageHistoire — 2

île d’Holbox, Yucatan, Mexique

Cette photo n’est pas une simple image, c’est un ensemble d’histoires, de contes, voire de déceptions.

Nos trop courts 3 mois mexicains étaient sur le point de s’achever. Les billets pour Cuba étaient en poche, mais l’insupportable Cancun nous avait dégoûtés en quelques heures. Quoi de mieux alors que de fuir 3 jours sur une île la fureur grotesque de l’ultra-tourisme cancunien.

Holbox, c’est une petite île toute en longueur au nord de la Péninsule du Yucatan. Ici, il y a un port au sud, un petit centre au nord régulièrement redéfini par le passage fréquent des ouragans et des cabanons tout au long de sa longue plage pour les touristes. Le reste n’est qu’une mangrove si dense que je n’arriverais pas à en faire le tour.

C’est aussi un paradis pour ornithologues. Pas moyen de regarder dans une direction sans en apercevoir au moins un. À l’ouest de l’île, en suivant la plage, j’étais même tombé sur une petite lagune ou des dizaines d’espèces d’oiseaux se trouvaient réunies, Des flamants, des pélicans, des grues (enfin pour mon regard de profane), de petites mouettes et plein d’autres oiseaux que je suis bien incapable d’identifier.

Bref, ce serait un endroit béni des dieux sans ces infâmes moustiques qui attaquent en rangs serrés dès que la nuit approche. Mais à bien y penser, c’est bien peu de choses face à tant de beauté : Chaque soir est une orgie de couleurs, une fête merveilleuse surtout quand la mer émerge de sa torpeur sous un vent qui se lève enfin et éloigne un peu la chaleur accablante.

Cette photo, je l’ai cherchée, je l’ai voulue, elle n’a rien de spontané. Mais, ce n’est pas une mouette que j’espérais couronner par le soleil. J’espérais un oiseau plus impressionnant, un pélican. Mais cette bestiole de l’enfer a choisi de partir pioncer 2 minutes avant que j’aie pu l’immortaliser. Tant pis pour lui, ce sera cette petite mouette aura cet honneur.

Mais ce n’est que le début des aventures de ce cliché. En mai 2006, alors que je préparais une exposition (qui voyagera de Paris à Reims, d’Albi à Buenos Aires), je ne l’avais pas sélectionnée. Je n’avais toujours pas dirigé le lapin pélicanesque. Mais mon pote, puis ma future femme, puis ma frangine m’ont demandé pourquoi je ne la choisissais pas. J’ai tellement craqué sous la pression que j’en ai même fait l’affiche de l’expo. Je ne regrette rien.

Là où cela devient vraiment amusant, c’est que j’allais régulièrement à l’expo, je racontais les photos aux curieux et visiteurs. Parfois, je restais juste là, sans rien dire ni faire, à bouquiner. Un jour, un groupe de gamins a débarqué, l’un d’entre eux connaissait l’histoire de la photo et il la racontait à ses potes. À l’écouter, je m’étais déshydraté sous un soleil terrible, j’avais eu les bras tétanisés de tant d’attente et qu’il avait fallu m’emporter à l’hôpital pour me sauver la vie. Une légende était née.

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Albéric
Histoire d’une image

un rien conteur, un rien vagabond, un rien photographe, bref plein de petits riens, pour un tout ?