2nde main, réel adversaire de la Fast Fashion ?

« Le marché de la seconde main devrait dépasser celui de la fast fashion d’ici 2028 », c’est ce qu’annonce Thred Up. En effet, dans une ère où le consommateur se préoccupe de plus en plus de son empreinte environnementale, l’essor de la seconde main ne cesse de croitre grâce à l’alternative suscitée par l’avènement de l’économie circulaire prolongeant ainsi la durée de vie de nos vêtements. Phénomène visant à limiter la production de nouvelles pièces et tout particulièrement celles issues de la fast fashion. La mode étant la deuxième industrie la plus polluante derrière celle du pétrole, l’essor de la seconde main contribue à la réduction de l’empreinte carbone. Ce segment permet donc d’allier passion de la mode et bonne conscience environnementale.

On peut se demander toutefois si le marché de la seconde main lutte réellement contre les méfaits de la fast fashion ?

Avant d’aller plus loin, il faut entendre par le terme de « seconde main » le fait d’acquérir un bien ayant déjà appartenu à un autre individu. Cette acquisition peut s’effectuer soit par le biais de différentes plateformes / applications (telles que Vestiaire Collective, Vinted) soit dans des friperies ou encore auprès d’associations (Emmaüs).

Cette pratique, par définition ne s’oppose pas nécessairement à l’achat de produits neufs mais plutôt au terme de fast fashion qui, lui, incarne le fait d’acheter des vêtements bon marché produits rapidement de façon non respectueuse de l’environnement par la grande distribution en réponse aux dernières tendances de la mode. La fast fashion, quant à elle, a pour vecteur de commercialisation les plateformes internet (Shein, Romwee, AliExpress) ou grandes enseignes (Zara, H&M).

La tendance de la seconde main, contribue au cycle de la mode en permettant à d’anciennes pièces mises de côté et délaissées de revenir sur le devant de la scène par l’intermédiaire de ses nouveaux acquéreurs. Cette dernière a donc pour objectif principal d’encourager les consommateurs à privilégier l’achat de pièces d’occasions afin de limiter la production de nouveaux vêtements tout en évitant la génération d’une pollution supplémentaire.

Toutefois, le bénéfice écologique qu’on accorde à la seconde main peut être remis en question. En effet, depuis quelques années, on observe un contre-effet de cette tendance dû à la hausse des prix d’articles de créateurs et grandes enseignes (notamment Dior, Jordan, Louis Vuitton…) présents sur ces plateformes. Ces produits de luxe de seconde main vont à l’encontre de la philosophie même de ce marché qui vise à rendre accessible la mode auprès de tous.

En complément, s’ajoute parfois l’avidité de certains utilisateurs de ces plateformes de seconde main qui à défaut de régulation du marché, mettent en ligne des pièces en souhaitant dégager le maximum de bénéfices.

On peut toutefois convenir que les plateformes de seconde main représentent un atout économique pour les consommateurs à faibles revenus soit par la revente de vêtements inutilisés et / ou soit par l’achat de vêtements à moindre coût.

Autre dérive, aux antipodes des valeurs du marché de la seconde main, on constate la revente de pièces de fast fashion sur des sites dédiés à ce secteur. Pratique controversée qui renforcerait ainsi la production et la consommation de fast fashion.

Enfin, la simplicité à créer un compte sur les plateformes de seconde main ainsi que leur accessibilité et la rapidité des transactions encouragent l’acte d’achat au mépris parfois du réel besoin engendrant ainsi un effet pervers.

Pour conclure, bien que le marché de la seconde main ait pour objectif premier de limiter la production de fast fashion tout en diminuant l’empreinte carbone du secteur de la mode, cette dernière ne lutte pas intégralement contre les méfais de cette production bon marché.

Cette alternative atteindra son objectif premier lorsqu’elle constituera une initiative d’ordre mondial et qu’une majorité de consommateurs s’y conformera. Ce nouveau comportement devra nécessairement être associé à l’arrêt de revente de fast fashion sur les plateformes afin de progressivement atteindre une diminution de production (voire de consommation) de fast fashion. En effet, afin d’enrayer cette dérive il faudrait que l’on passe du consommateur au « consomm’acteur » permettant la régulation du marché de la seconde main. Cependant, reste à savoir si le consommateur sera (réellement) prêt à privilégier l’écologie au plaisir de la surconsommation ?

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