Épisode 4 : Négociations en sale état

Partager c’est sympa
#IlestencoretempsàlaCOP24
5 min readDec 13, 2018

Nous voici arrivés au 12e et avant-dernier jour des négociations. Un grand accord est sur le point d’éclore, grâce à la bonne volonté de tous les pays qui se sont enfin décidés à changer de modèle tous ensemble, pour le climat ! Enfin, c’est ce qu’on aimerait raconter. Sur l’échiquier mondial, on est plutôt sur un concours de qui s’engage le moins loin. L’équipe de Partager c’est sympa vous fait le topo !

En 2015, on sabrait le champagne bio car 196 pays se mettaient d’accord sur un accord supposé contenir le réchauffement climatique à 2°C avant la fin du siècle. Youpi ! Que s’est-il passé 3 ans plus tard ? 16 pays seulement ont tenu leurs engagements, les États-Unis sont en train d’en partir et le Brésil risque de suivre dans la foulée. Donc même si cet accord de Paris, qui par ailleurs n’était même pas en phase avec les 2°C qu’il annonçait, fut un triomphe diplomatique, il a juste oublié de prévoir la manière dont les pays devraient le respecter.

Fin de la COP21 à Paris en 2015- Alternatiba

Mais comment ça se fait ? Les pays sont volontaires pourtant quand ils négocient non ? C’est eux qui trouvent l’accord ! Oui, mais encore faut-il savoir quel pays compte vraiment…! Et sans surprise, ce sont les pays du G20 qui émettent le plus de gaz à effet de serre…. Comment ça se passe ?

Voir l’analyse de Place to B

Il y a forcément peu de littérature sur le sujet, ces échanges sont tenus “secrets” ou du moins ne sont pas officiels. Les négociateurs-ices qui en témoignent racontent que les vraies décisions se prennent en dehors des réunions officielles, entre les pays pesant le plus économiquement et/ou ayant un enjeu stratégique au niveau des ressources. Ce sont les mêmes échanges d’ailleurs que le reste de l’année à bien y regarder. C’est ainsi que l’on a pu voir 4 pays extrêmement émetteurs de CO2 bloquer les négociations pendant la COP24 en ne souhaitant pas accueillir le rapport 1,5°C des scientifiques du GIEG. Ça parait rien vu d’ici, mais ce genre de “détail” est une pierre angulaire de l’échec des COP. Et ça, sans aucune sanction… ( Pour aller plus loin, avec le RAC)

C’est le point central de ces accords sur le climat : ils ne sont pas contraignants ! Ils proposent un calendrier d’action, des objectifs que se donnent eux même les États du genre “ 50% de CO2 en moins en 2030”, mais ne détaillent pas la méthode pour y arriver et surtout ne prévoient aucune sanction si le pays en question ne réalise pas ses objectifs. Dans le cas des USA, on fait face à un pays qui part de l’accord sans qu’il n’y ait aucune sanction à la clé. Pourtant, on a pu voir que les sanctions économiques étaient possibles quand il s’agissait de violer un traité notamment commercial ou de bloquer une situation politique, comme ce qu’il se passe en ce moment avec la Russie.

Mais quand on parle d’une politique vertueuse pour le climat, plus possible ?

Le plus drôle c’est que ces grands traités diplomatiques sont souvent plus médiatisés que les traités commerciaux. Pas plus tard qu’hier, mercredi 12 décembre, l’accord de libre-échange UE-Japon (JEFTA) a été approuvé par le parlement Européen sans être plus médiatisé que le temps qu’il fait (sans doute moins en fait). En jeu : un tiers du PIB mondial et 40% des échanges mondiaux, ce qui fait du JEFTA le plus important accord de commerce jamais négocié. Alors qu’il “comporte beaucoup de risques pour l’environnement, le climat, la biodiversité, mais aussi pour l’avenir des agriculteurs français et de notre démocratie”. (à lire sur FNH ou sur le collectif Stop Tafta/Ceta).

Ce n’est pas plus compliqué. Les États arrivent à s’entendre sur un traité économique avec des clauses et conditions mais pas sur le climat. Ce qui est plutôt normal vue leur position. Notre système mondial reposant sur la croissance économique comme unique facteur de bien-être d’un pays, comment demander à ces pays de créer un système économique circulaire ou la préservation des ressources et du climat sont les indicateurs de richesses ? Dans ce scénario, on consomme moins, on adopte un mode de vie plus sobre, donc moins de profit, un pouvoir remis en cause dans le système actuel, etc… Nos pays ne pourront jamais prendre de vraies décisions pour le climat tant qu’ils ne changeront pas de système économique. Vu la position des états unis, responsable de 14% des émissions mondiales, on est mal engagé…

Retrouvez notre vidéo de la COP23 sur ce sujet

Les citoyens prennent l’affaire en main

Alors, il ne faut pas compter sur ce genre d’événements comme la COP pour nous sauver de notre propre auto-destruction. Car c’est bien ce qui en train de se passer : c’est à nous de prendre ça en main et de l’imposer à nos États. C’est déjà le cas dans plein de pays du monde, intensifions le phénomène !

Certains utilisent la justice :

  • Aux Pays Bas, exemple le plus probant, les citoyens ont simplement attaqué leur état pour inactions, deux fois, et résultat le tribunal demande à l’État de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 25 % d’ici 2020, par rapport aux niveaux de 1990.
  • Aux États-Unis, des enfants gagnent un procès pour protéger le climat
  • En Nouvelle Zélande une étudiante attaque en justice son gouvernement
  • Ou encore à Salsigne en France où deux citoyens sont parvenus à faire annuler un arrêté préfectoral interdisant la commercialisation de plusieurs produits (légumes, thym, escargots) provenant de neuf communes de l’ancien site minier de Salsigne.

D’autres, la lutte locale et la résistance aux projets climaticides :

Ou bien sur tout ce qui est campagne d’interpellations de nos élus, parlementaires, ministre et notre président : ne lâchons pas le morceau et nous aussi entrons dans la danse !

Le mouvement des Faucheurs de Chaises en 2015

Et c’est pas fini !

Si tu ne te sens pas de rejoindre les grands mouvements citoyens, ou si faire bouger un état te paraît un peu trop large à ton échelle, tu as la possibilité d’agir dans ta ville !

A très vite de retour en France pour la suite !

--

--