Qu’est ce qu’une table de capitalisation problématique

Impression Ventures
Impression Ventures FR
5 min readJan 4, 2018

Vos clients adorent votre produit et votre entreprise croît de manière spectaculaire. Vous avez élaboré un super deck, votre pitch est rodé, et tout est parfait. Vous avez pris contact avec des fonds de Capital Risque (VCs) et noué de nombreuses relations. Vous vous êtes même préparé à l’avance pour la due diligence. Vous êtes plus que prêt pour lever des fonds. Le premier rendez-vous avec les investisseurs se déroule parfaitement bien, leur langage non verbal est plus que clair, ils veulent investir. Vous leur faites parvenir votre data room et … personne ne vous revient — personne ne répond

Mais que s’est il passé?

Vous commencez à passer quelques appels et un des investisseurs fini par admettre que la raison pour laquelle il ne souhaite pas poursuivre les discussions est qu’il y a un problème avec votre table de capitalisation

Vous tombez des nues. Comment la structure de l’actionnariat de votre entreprise peut-elle être un problème?!

Il s’avère que la structure du capital de votre entreprise, la table de capitalisation (souvent appelée cap table) est très importante aux yeux des investisseurs et dans de nombreux cas une mauvaise conception peut être dissuasive lors d’un investissement. Elle est un élément dissuasif dans le sens où une malfaçon peut avoir de nombreux impacts sur l’entreprise, de la désimplication du fondateur l’empêchant de performer au fait de rendre la prise de décisions stratégiques extrêmement difficiles à appliquer.

Le défi typique de gérer une entreprise avec une large base d’investisseurs (20+) est rendu encore plus difficile lorsque la table de capitalisation est problématique. Les fondateurs peuvent se retrouver à passer un temps non négligeable à courir après des documents, signatures, appels, plutôt que de se concentrer sur l’activité. Soutenir des fondateurs et des entreprises qui ont ce type de problèmes n’intéresse pas les nouveaux investisseurs.

Au fil des années, les investisseurs du secteur de la technologie sont convenus de ce qu’ils considèrent comme étant des tables de capitalisation idéales. Les pourcentages de détention ne sont pas gravés dans le marbre, et il est possible de s’en écarter à plus ou moins dix pourcent. Cependant, plus l’éloignement à ce model est important, plus il vous sera difficile de prétendre que votre table de capitalisation est “normale”.

Ci-dessous, voici un exemple typique de table de capitalisation. Ne prêtez pas trop d’attention aux pourcentages exactes, chaque situation est différente et, tel que mentionné plus haut, il ne s’agit pas d’une science exacte.

* Les montants alloués aux employés ici devraient tous faire parti du régime d’options de souscription d’actions des employés, également appelé employee options pool. Initialement, ce pool d’options n’est pas attribué. C’est lorsque l’entreprise grandit et recrute de ce fait des employés, que les options de ce pool sont attribuées. Il est à noter qu’il est devenu commun que ces options soient converties en action sans droit de vote.

Les tables de capitalisation ne sont pas figées, et évoluent en réalité bien plus souvent que la majorité des fondateurs ne l’imagine. Bien entendu, les principaux changements apparaissent à chaque tour de financement, mais des changements mineurs peuvent également survenir. Par exemple, un employé clé qui quitterait l’entreprise avant la fin de la période d’acquisition des droits liés à ses options, pourrait avoir un impact non négligeable sur le pool d’options. Et cet employé clé exerçant ses options, entraînerait une modification de la table de capitalisation.

Les investisseurs sont à l’affût de toute spécificité de table de capitalisation. Des malfaçons qui pourraient potentiellement créer des frictions lors de futurs tours de financement, de partenariats clés ou tout autre évènement nécessitant le consentement des actionnaires. Voici les quelques une des malfaçons les plus évidentes:

  • Le problème principal est de loin un pourcentage de détention trop faible du ou des fondateurs. Au moment du tour Seed, si l’équipe fondatrice + employee options pool est inférieur à 50%, vous entrez en zone dangereuse
  • Si le CEO, au moment du tour Seed, détient mois de 10%, vous êtes en réelle zone de danger
  • Si vous avez du “dead equity” — il s’agit typiquement de capitaux propres dépassant 2–3% de la société, détenu par un fondateur qui n’est plus impliqué dans la société. Nous pouvons alors appeler ceci du “dead equity” dans le sens ou a) il n’a pas payé ces parts et b) il n’est plus impliqué activement dans le développement de l’activité. Les investisseurs souhaitent typiquement que les capitaux propres soient détenus par des fondateurs actifs. Il en est de même pour les actions allouées aux conseillers. Un faible pourcentage est acceptable, cependant chaque action qui aurait pu être attribuée gratuitement, à un individu qui n’est pas activement impliqué dans la gestion journalière de l’activité est problématique pour les investisseurs. De plus, ceci est également applicable aux investisseurs dans les cas où ils se voient attribuer des actions en outre des actions pour lesquelles il y a eu un apport de capital. De manière générale, les nouveaux investisseurs regarderont d’un mauvais oeil les actions attribuées gracieusement, en dehors des de celles attribuées aux fondateurs / employés.
  • En parlant des employés, s’ils n’ont pas d’equity, ou très peu, ceci enverra typiquement un mauvais signal aux investisseurs. Nous savons que les options réservées aux employés jouent un rôle très important dans la capacité de l’entreprise à attirer et à retenir des talents. Si vous ne ménagez pas vos employés, cela peut vous causer des problèmes dans le futur, et ce n’est pas ce que nous souhaitons.
  • Si vous avez des instruments atypiques dans votre table de capitalisation, tels que des classes multiples d’actions ordinaires ou payant des dividendes fixes (ce que les marchés publics appelleraient des actions privilégiées, preferred shares juste pour compliquer un peu plus le concept), warrant ou autres sweeteners.

Tous les éléments de cette liste repoussent les investisseurs et peuvent même être des points bloquants. Ils ont tous pour effet un questionnement de l’investisseur sur l’alignement de votre intérêt et de celui de votre équipe avec le succès de l’entreprise et les autres intérêts qu’ils devront gérer dans le futur.

Techniquement, ces problèmes de table de capitalisation peuvent être solutionnés. Ceci requiert le consentement unanime de tous les actionnaires et le recours à des mécanismes afin de convertir et/ou annuler certains instruments.

La réalité est qu’ils ne sont pour la plupart jamais solutionnés et la société fait faillite. Les investisseurs actuels sont en majorité résistants à tout changement dans la table de capitalisation, sans l’entrée d’un nouvel investisseur forçant au compromis. Cependant, les nouveaux investisseurs ne sont pas enclins à émettre une term sheet qui implique la nécessité de revoir la conception de la table de capitalisation. Il est sensé pour un nouvel investisseur d’attendre. En effet, il n’est pas certain que tous les investisseurs actuels acceptent les termes de la modification. Il s’agit ici d’une impasse classique. Dans l’industrie du Capital Risque, où aucune faille n’est trop petite pour ne pas être éliminatoire, une table de capitalisation problématique signifie probablement pas d’investissement.

Finalement, le meilleur moyen de solutionner une mauvaise table de capitalisation est de faire en sorte qu’elle ne le devienne jamais, pour commencer!

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