Le “Job to be done” : complémentaire à la démarche UX ?

Clément van Meyel
Ineat Design
Published in
4 min readNov 13, 2017

Depuis quelques mois je m’intéresse de près à l’approche “job to be done”. Cette approche, créée par deux Américains, Anthony W. Ulwick et Clayton M. Christensen, est initialement un concept marketing qui consiste à définir un ensemble de missions à accomplir pour satisfaire le client.

Pourquoi un tel intérêt ?
Dans mon métier, je suis responsable de l’expérience globale que va vivre un utilisateur avec les produits/services sur lesquels je travaille, et je vois l’approche “job to be done” comme une extension, une complémentarité aux méthodes de travail sur l’expérience utilisateur.

Le Job to be done, parlons-en.

Le terme “job” est un raccourci pour ce qu’un individu cherche réellement à accomplir dans un contexte donné.

Je vais vous donner un exemple assez parlant en citant Theodore Levitt, un professeur de marketing de la Harvard Business School.

Les gens n’ont pas besoin de perceuses. Ils ont besoin de trous dans leurs murs. (Théodore Levitt)

Cet exemple date de 1960, et pourtant aujourd’hui encore nos conceptions sont trop centrées sur le produit en lui même. Un collègue me dit souvent “Nous devons penser problème avant solution”. Il a bien raison. C’est notre mission en tant que concepteur de partir d’une problématique existante pour répondre efficacement au besoin de nos utilisateurs en leur offrant la meilleure expérience possible.

Et si… au lieu de concevoir uniquement en fonction d’une problématique, d’un besoin, nous travaillions avec un angle d’attaque différent ? Celui du “job to be done”.

Le job to be done en 3 questions

Réfléchissons autour d’un exemple.

Lors de la phase exploratoire d’une démarche UX, l’objectif est de comprendre les besoins de mes utilisateurs.

Ici, mes utilisateurs sont des décorateurs. J’applique différentes méthodes exploratoires pour faire ressortir leur besoin principal.

Celui-ci est le suivant : “En tant que décorateur, je veux accrocher des cadres”.

Ok, nous allons donc travailler une solution leur permettant d’accrocher des cadres. Notre fameuse perceuse. Que nous allons imaginer avec un super système de grippe pour le confort du poignée, un système de triple rotation, etc.

Nous avons notre solution !

Mais l’expérience utilisateur ne s’arrête pas uniquement au produit que nous avons conçu.

À titre d’exemple : Nest, pour son détecteur de fumée, a également créé des visses spécifiques pour son produit, afin d’éviter à l’installateur de se demander quel type de vis il devait utiliser sur quelle type de matière. Cette visse répond directement à ce besoin annexe du job de base et l’expérience globale passe aussi par cette facilité d’installation.

Dans notre cas, l’expérience se trouve dans l’ensemble des interactions qui permettront à mes cadres d’être accrochés sur le mur.

Et je pense que l’approche “job to be done” à son rôle à jouer dans la compréhension des gestes et l’amélioration de l’expérience utilisateur.

Je vois cette approche en complémentarité à la phase de cadrage/exploration d’une démarche UX, bien avant la phase de conception du produit.

Dans une approche “job to be done”, il faut se poser les questions suivantes :

  1. Quels sont les jobs que mes utilisateurs cherchent à accomplir pour accrocher des cadres ?
  2. Quelles sont les frustrations que mes utilisateurs cherchent à éviter ?
  3. Quels sont les bénéfices qui surprendraient agréablement mes utilisateurs ?

Pourquoi ces questions ?

Ce sont 3 questions qui permettront à la fois

  • de comprendre les motivations des utilisateurs.
  • de définir l’ensemble des actions que l’utilisateur va chercher à accomplir (et nous permettre de faire une jolie cartographie des jobs)
  • d’éviter les risques d’erreur de conception, ou les choses inutiles
  • mais aussi d’innover dans les solutions proposées à l’utilisateur

Mon avis

Je pense que l’approche “job to be done” en complémentarité d’une démarche UX permet de travailler une solution avec une vue d’expérience plus globale, mais à une échelle plus micro, en prenant en considération la problématique de départ que l’utilisateur souhaite résoudre. Cela permet de penser le produit ou service en termes d’usage et d’utilité.

De plus, le travail sur les jobs a amené à la réflexion que ce n’est pas juste une question de fonctionnalité, mais qu’ils ont une forte dimension sociale et émotionnelle puisque cela implique une analyse plus fine des comportements utilisateurs. Ce qui rejoint un travail sur les sciences cognitives mené dans le cadre d’une démarche UX.

Pour aller plus loin sur l’approche “job to be done”, je vous conseille la lecture de l’article “Connaître les jobs to be done de vos clients” paru dans le magasine Harvard Business Review d’octobre-novembre 2017. L’article traite de l’approche du “job to be done”, non pas dans l’UX, mais en matière d’innovation et de stratégie d’entreprise. Ce qui prouve qu’aujourd’hui le Design est devenu indispensable dans la stratégie business.

Et vous ? Avez-vous déjà testé cette approche de manière générale ?
N’hésitez pas à échanger par commentaire :)

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Clément van Meyel
Ineat Design

Designer UX, Design thinker, interested #ux #servicedesign #entrepreneurship … my latest articles : https://medium.com/@ClementVanMeyel