Ethereum en 2019 : rendre le Web3 accessible

Antoine Detante
InTech / Innovation & Development
6 min readMar 19, 2019

Que ce soit dans les conférences, les articles, les communications sur Twitter ou Reddit… l’actualité de la communauté Ethereum en ce début d’année 2019 est très tournée vers la future version du protocole, communément appelée Ethereum 2.0.

L’enjeu de cette nouvelle version (aboutissement de plusieurs années de recherche) est de permettre le passage à l’échelle, sujet au coeur de l’évolution de la plateforme : amélioration des performances, meilleure décentralisation, optimisation du stockage, … Les sujets sont nombreux, et beaucoup de chantiers sont d’ores et déjà engagés autour du sharding, du changement de consensus vers Proof-Of-Stake, de la beacon chain.

Mais en parallèle de ces évolutions majeures du protocole, une autre tendance est en train de se dessiner pour 2019 : faciliter l’accès du grand public à ces technologies décentralisées.

Réduire la barrière à l’entrée du Web3

L’accès à l’Internet décentralisé reste peu intuitif.

L’objectif du projet Ethereum est avant tout de concevoir les bases d’un Internet plus accessible, plus fiable et plus distribué que le réseau actuel : le fameux « Web 3 ». Et force est de constater que même si les briques technologiques sont aujourd’hui en place, cette révolution reste assez obscure et complexe pour la majorité des utilisateurs de l’Internet centralisé.

Installer un wallet Ethereum, gérer ses clés d’accès, accéder à une application décentralisée, … tout ceci est encore peu intuitif, et représente un frein à l’adoption massive de ces services décentralisés.

Cependant, différentes initiatives cherchent aujourd’hui à améliorer l’expérience utilisateur générale, et il se pourrait bien que 2019 soit l’année de l’ouverture d’Ethereum à un nouveau public.

Wallets

La gestion des clés privées pour les utilisateurs a toujours été un point de friction. L’ergonomie des wallets n’est pas optimale, en tout cas pas comparable à ce qui est proposé habituellement par les applications grand public centralisées. Et pour cause, les contraintes et les enjeux sont différents : il s’agit bien de conserver des secrets, qui en cas de perte condamnent définitivement l’accès aux fonds de l’utilisateur !

Le parcours d’un nouvel utilisateur vers le web décentralisé commence bien souvent par l’installation d’une application wallet, qui va nécessairement générer une fameuse « phrase mnémonique ». Ces 12 ou 24 mots aléatoires et forcément impossibles à mémoriser, qu’il sera pourtant nécessaire de conserver en sécurité pour être capable de récupérer ses accès. Et c’est la même procédure pour conserver quelques fractions d’ETH…. comme des dizaines de milliers !

C’est à partir de ce constat qu’a été imaginé le « Burner Wallet ». Il s’agit d’un wallet minimaliste, exécuté dans le navigateur et qui va générer et stocker ces clés de façon transparente pour l’utilisateur. Alors bien sûr, le niveau de sécurité n’est pas le même qu’un portefeuille physique tel que le Ledger Nano S… Mais pour stocker temporairement quelques tokens, recevoir un paiement ou payer un achat, cela reste aussi sûr qu’un billet de monnaie physique, qui peut également être perdu ou volé. Et ainsi, n’importe quel utilisateur peut en quelques secondes, via son navigateur, commencer à recevoir ou envoyer des crypto-monnaies sans aucune procédure d’enregistrement ou de recopie de mots étranges.

Stable coins

La volatilité des cours des crypto-monnaies est également un frein à l’adoption massive de ces technologies blockchain. Difficile de concevoir, de commercialiser ou d’acheter des nouveaux produits disponibles sur ces architectures décentralisées si la crypto-monnaie sur laquelle ils reposent est très instable.

Les « stable coins » apportent une réponse à cette problématique de volatilité, en garantissant un taux de change stable. Le DAI par exemple, lancé par Maker sur le mainnet Ethereum, a un taux de change fixe de 1 DAI = 1 USD. Ce taux fixe est garanti par des dépôts en ETH de la part des possesseurs de DAI, et une gestion quotidienne de ce collatéral par l’organisation décentralisée Maker.

DAI/USD depuis mars 2018 — https://coinmarketcap.com/currencies/dai

La stabilité du DAI lui permet de devenir un réel moyen d’échange sur ces blockchains, et un pont entre les crypto-monnaies et les devises traditionnelles.

Frais de transaction

Chaque opération sur Ethereum a des frais de transaction associés, nécessaires pour assurer la stabilité et la sécurité du réseau. Que ce soit pour un simple transfert entre deux comptes, ou pour l’exécution d’un Smart Contrat, l’utilisateur devra laisser quelques fractions d’ETH pour l’exécution de sa transaction. Le frein à l’utilisation de ces Smart Contract n’est pas tant le coût de ces transactions, mais plutôt le fait que pour interagir avec Ethereum, il est nécessaire de posséder une petite quantité d’ETH. Se pose alors le problème de l’onboarding d’un nouvel utilisateur : doit-on lui conseiller d’acheter de l’ETH sur des plateformes d’échange décentralisées ? Les frais de transactions doivent-ils être pris en charge par le fournisseur de service, avec le risque que cela implique ?

L’initiative de POA Network pour répondre à cette problématique est très intéressante. L’organisation a lancé fin 2018 une sidechain nommée xDAI : une blockchain publique qui existe en parallèle d’Ethereum et qui est basée sur la même technologie, donc compatible au niveau des Smart Contracts. Un détenteur de DAI sur Ethereum peut transférer une partie de ses tokens vers cette sidechain. Le xDAI étant la monnaie native de cette blockchain, tous les frais liés à son utilisation (frais de transaction, déploiement de Smart Contract, échange de crypto-monnaie) sont payés en xDAI avec une parité par rapport au dollar.

dApps

Un des objectifs du projet Ethereum est l’émergence des dApps : ces applications décentralisées, accessibles via un navigateur, qui permettent d’interagir directement avec les Smart Contract de la blockchain.

Même si l’interface utilisateur de ces dApps repose sur les mêmes technologies que les applications web traditionnelles, les particularités liées au « backend blockchain » sont encore très présentes dans l’ergonomie de ces applications. Une grande majorité de ces dApps utilisent l’extension de navigateur MetaMask pour identifier l’utilisateur, accéder à ses informations ou lui permettre de signer ses transactions. MetaMask est un outil très efficace, mais apporte des contraintes pour l’utilisateur : utiliser un navigateur supporté, l’installation d’un plugin, et surtout, pas de support sur le mobile.

Des alternatives crédibles sont en train d’émerger, telles que le wallet mobile Argent par exemple, qui permet notamment de simplifier l’utilisation de ces dApps, en générant des clés dédiées à l’application décentralisée. Ces clés vont permette à l’application d’agir directement au nom de l’utilisateur sans nécessiter de plugin ni de signature de transaction, tout en garantissant sa sécurité grâce à un mécanisme de gestion de limites et de droits d’accès.

2019 = Ethereum 2.0 + UX ?

En parallèle de l’évolution des couches basses d’Ethereum pour permettre un stockage optimal des données, exécuter plus de transactions par bloc ou assurer une meilleure décentralisation, ces exemples parmi d’autres témoignent des initiatives pour faciliter la conception et la commercialisation de nouveaux produits sur Ethereum, et pour faciliter l’accès à tous à ce réseau décentralisé. Il y a fort à parier que 2019 verra alors l’émergence de nouveaux services, désormais accessibles à de nouveaux utilisateurs qui n’étaient pas encore entrés dans ce monde des blockchains. Avec la maturité des technologies des couches basses, l’enjeu se tourne maintenant vers l’amélioration de l’expérience des utilisateurs.

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