La Ferme de Chasse Nuage

Laura Jalbert
Deligreens
Published in
6 min readMay 11, 2018

C’est à 40 minutes de Lyon, perché dans les douces collines verdoyantes des alentours de Condrieu, que sont fabriqués les fromages de chèvre dont vous raffolez chez Deligreens : ceux de la Ferme de Chasse Nuage. Nous sommes allés leur rendre visite par une belle journée de Printemps, pour vous en dire plus sur leurs producteurs et leur fabrication.

Lorsque l’on arrive en voiture par cette route du Parc Régional du Pilat, que l’on aperçoit des petites nuées de biquettes blanches au-delà d’un champ d’herbe bien grasse tachetée par des pissenlits dorés, qu’Avril -la chienne de la ferme et gardienne des chèvres- se précipite vers nous toute langue dehors, on pourrait se prendre à rêver d’une reconversion dans le fromage de chèvre, comme Sébastien et Nathalie.

Sébastien, Nathalie et Avril dans leur bureau.

Les producteurs

Le frère et la sœur, originaires de Bretagne, ont travaillé dans des domaines bien différents avant de se lancer dans cette exploitation. Sébastien rachète il y a quatre ans une partie de l’exploitation d’un fermier après avoir travaillé dans la communication.

Nathalie, elle, a été documentaliste, journaliste puis informaticienne en France et en Irlande avant de rejoindre l’aventure.

“Quand Sébastien s’est installé, nous explique-t-elle, je venais lui filer des petits coups de main au début, tout en travaillant à côté, avant de tout plaquer ! J’ai fait un an de formation en fromagerie, comme Sébastien et Mathilde, à l’ENIL (Ecole Nationale d’Industrie Laitière) pour faire de la transformation fermière”.

Mathilde est la dernière arrivée : après un an d’apprentissage, elle est embauchée en Septembre 2017 et habite à la ferme. N’oublions pas Avril : la jeune chienne qui garde fièrement son troupeau blanc immaculé.

La ferme

Située tout près du village de Longes, l’exploitation comprend 52 hectares autour de la ferme qui descendent jusqu’à la rivière : 25 hectares qui leur permettent de faire pâturer les chèvres, et de faire un peu de culture -le reste est difficilement exploitable du fait que les terrains sont assez pentus, avec beaucoup d’érosion. Les autres terres sont dans le village de Longes ou autour, au maximum à deux kilomètres. Le nom de la ferme vient du col de Chassenoud tout proche, et “chasse noud” en vieux Français correspondrait à “chasse nuage”.

“Quand tu bosses 7 jours sur 7, il y a des moments où c’est difficile, c’est physique, c’est très prenant… Mais en même temps tu as la satisfaction de produire de bons fromages, faits avec le lait de nos chèvres qui mangent de la bonne herbe”

La ferme de Chasse Nuage produit des fromages de chèvre au lait cru : rigottes fraîches et mi-sèches, rigottes de Condrieu, faisselles, palets cendrés, bûches, bouchons “apéribic”, tommes ou encore cervelle de canut. L’exploitation est certifiée BIO depuis quelques mois, et s’est pourvue cette année d’un magnifique atelier de transformation avec vue sur les collines.

“Le travail au lait cru, c’est compliqué parce que ça ne marche pas toujours comme on veut : le goût change toute l’année suivant ce que les chèvres mangent, et puis on utilise notre petit lait et non des ferments industriels, ce qui entraîne également des variations.”

Mais c’est aussi ça les produits fermiers : des goûts très loin de l’uniformisation des produits industriels. Et c’est ce qu’on aime.

La fabrication des fromages

Après avoir gambadé dans les près avec les chèvres, il est temps pour nous d’aller faire un tour du côté de la fromagerie pour tout savoir du processus de fabrication, dans une atmosphère chaude et humide à 21°C.

Rigottes et “apéribics” tout juste moulés.
  1. Le caillage : d’un côté de la fromagerie, les bacs de caillé attendent pour être transformés en fromage : dans 70 litres de lait de la traite du matin sont ajoutés 10,5ml de présure qui va permettre de le faire cailler (pour un mode de fabrication “lactique” qui concerne tous les fromages frais et affinés). Pour fabriquer un fromage à pâte pressée (comme une tomme), il faut ajouter environ 6 fois plus de présure après avoir été légèrement chauffé. La présure est un liquide présent dans l’estomac du chevreau qui lui permet de digérer le lait de sa mère. À une température de 18–19°C, on laisse le lait cailler pendant 24 à 48h.
  2. Le moulage : on moule ensuite le caillé dans différentes formes suivant le fromage que l’on souhaite obtenir. Toutes ces étapes sont réalisées à la main et sont extrêmement chronophages.
    Pour les tommes, on les moule et on les empile les unes sur les autres pour qu’elles s’égouttent le plus possible : elles sont démoulées et retournées 3 à 4 fois dans la journée pour avoir une jolie forme, avant d’être salées et mises en cave pour 5 à 6 semaines environ.
  3. Le ressuyage : il s’agit de l’étape pendant laquelle les fromages vont être égouttés pour perdre le maximum de petit lait. Cela dure de 24 à 48h. À ce stade, on veut que les fromages prennent une “flore” grâce à des bactéries qui vont se développer à une température de 21°C.
  4. Le salage : il s’effectue à la main, comme tout à la Ferme de Chasse Nuage.
  5. L’affinage : les fromages vont au hâloir (ou séchoir) pour différentes durées. Dans le séchoir, on va avoir une ambiance différente : 16°C et 70% d’humidité puisqu’on veut que le fromage perde de l’humidité. On voit qu’il n’a déjà plus la même couleur, il est un peu plus jaune, il commence à développer cette flore dont on parlait tout à l’heure : le geotrichum. Affinée, une rigotte doit faire environ 80 grammes.

Les chèvres

Mathilde, la maman spirituelle des chevrettes, leur apprend à boire au robinet.

Après la visite très instructive de la fromagerie avec Nathalie, direction la ferme avec Mathilde, qui nous présente la nouvelle génération de chevrettes, dont la première est née le 18 février. “J’ai la patience pour m’en occuper”, nous confie-t-elle. Cette année, dès la naissance, les bébés ont été retirés de leur mère et élevés “à la louve” (un dispositif permettant aux chevreaux de téter et de se nourrir). “En faisant de cette manière, on voit la différence avec les chevrettes : elles sont beaucoup plus calmes, plus câlines et même parfois assez pot-de-colle !”

Remontons un peu le temps, au mois de Septembre, lorsque les trois boucs de la ferme commencent à être en rut, et les chèvres en chaleur. L’expression “puer comme un bouc” prend alors tout son sens : ces messieurs, pour attirer la gent féminine, se mettent à dégager une odeur pestilentielle (pour nous autres êtres humains) et à s’uriner dessus. Sébastien, Nathalie et Mathilde essayent de regrouper les saillies afin d’avoir des mises bas regroupées et ainsi faire une meilleure sélection des chèvres. Cela permet également d’avoir une bonne quantité de lait pour commencer la production fromagère en février.

Arthur, un des trois heureux boucs de la Ferme de Chasse Nuage.

“Tout se passe à l’intérieur : lorsque les chèvres vont dans les prés, on garde les boucs à l’intérieur sinon ils ne s’arrêteraient jamais, ils en oublieraient même de manger, nous explique Mathilde. À la fin de la saison de saillie, ils ont complètement fondu. On ne leur demande pas beaucoup de boulot, mais quand c’est le cas, ils se sentent investis dans leur mission. On n’a pas trop à insister non plus…”

Après les saillies, les chèvres sont en gestation pendant 150 jours, soit environ 5 mois. Période pendant laquelle elles ne produisent pas de lait et sont au repos. Et ensuite, c’est reparti pour un tour !

Suivez la Ferme de Chasse Nuage sur leur page Facebook pour être tenu au courant de leurs prochaines portes ouvertes, prétexte pour une chouette excursion à 40 minutes de Lyon dans le Parc Régional du Pilat. Et retrouvez tous leurs délicieux produits sur Deligreens !

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