La France est notre patrie, l’Europe est notre famille, notre avenir est le monde

Institut de l'Entreprise
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4 min readMar 30, 2017

Par Loïc Armand, Président du Groupe de travail « L’Europe que nous voulons » de l’Institut de l’Entreprise

Nous sommes tous ou presque d’accord sur l’analyse, avec toutes celles et ceux qui savent que le monde existe en dehors de notre pré hexagonal, que des mutations fondamentales sont en cours, que nous sommes riches de notre diversité, que les grands défis auxquels nous sommes confrontés exigent des réponses collectives et aussi que toutes les solutions se trouvent dans l’intelligence partagée, l’innovation et la coopération. Nous sommes d’accord avec tous celles et ceux qui considèrent que le choix européen de la France est la seule voie possible pour assurer la paix et la prospérité sur notre continent.

Nous craignions que l’élection présidentielle française escamote une fois de plus le débat européen. Ce n’est heureusement pas le cas. Par chance, si je puis dire, le contexte géopolitique, le Brexit, l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis et le hasard du calendrier, qui a fait de 2017 l’année du soixantième anniversaire du Traité de Rome, imposent ce débat européen. J’ajouterai que la présence de candidats, aux extrêmes de l’échiquier politique, qui veulent détruire l’Union européenne ou seraient prêts à la sacrifier, parce qu’ils ignorent que le monde est un écosystème, parce qu’ils croient qu’il suffit de construire des murs, ou pour satisfaire à leur idéologie mortifère, ouvre aussi une opportunité de débat.

De fait, hormis ces extrêmes, les analyses convergent. La déclaration des 27 réunis à Rome le 25 mars, le rapport de la Commission européenne sur le futur de l’Europe, celui que vient de produire l’Institut de l’Entreprise sur “l’Europe que nous voulons”, la doctrine Europe du MEDEF, convergent pour dire que L’Union des peuples d’Europe est la plus belle invention de l’histoire moderne et notre bien collectif le plus précieux. Dans un monde volatile, incertain, complexe et ambigu, nos valeurs partagées nous réunissent. L’Union européenne n’est pas seulement un grand marché de 510 millions de consommateurs, c’est une zone structurée par l’état de droit, la démocratie, le respect des autres, la solution pacifique des conflits, la conviction que la libre entreprise et l’innovation permettront une prospérité soutenable car respectueuse de l’environnement et de chacun d’entre-nous, la certitude que cet espace doit être protégé à ses frontières pour permettre la libre circulation des personnes et des biens sur son territoire, que nous sommes plus forts ensemble pour peser sur les destinées du monde. Tout est juste donc. Peut-on pour autant dire que tout est réglé ?

Nous avons fait le nécessaire, il reste à faire le plus important

L’originalité de l’approche des entreprises réside dans leur conviction existentielle que l’Europe ne tiendra ses promesses que si elle reconnait plus clairement encore et traduit dans ses décisions la priorité absolue du développement d’une offre compétitive fondée sur la liberté d’entreprendre et l’innovation. Il n’est de richesse matérielle que celle qui résulte de notre capacité à nous adapter aux changements de l’écosystème mondial et à délivrer les produits et services que souhaitent les consommateurs au prix qui leur convient. Cela ne veut en aucune façon dire que nous préconisons la régression écologique ou sociale, tout au contraire. Le monde traverse de grandes mutations qui appellent autant de transitions ordonnées : l’apparition de géants économiques appelle une transition économique; l’exigence climatique appelle une transition énergétique; la révolution digitale transforme les relations entre les gens et avec les objets; la bio-technologie offre de nouveaux horizons…le plancton créé de la lumière qui pourra un jour créer de l’énergie…un changement de paradigme parmi bien d’autres.

Les 27 Chefs d’Etats et de Gouvernements ont renouvelé à Rome les promesses du baptême européen, hommage leur soit rendu. Mais ils n’ont pas dit comment ils allaient s’y prendre. La triste réalité, c’est que l’Union européenne souffre de deux maladies par la contagion de la faiblesse économique et politique de ses membres et de la trop grande ignorance de l’exigence démocratique.

A nous français de commencer à balayer devant notre porte. Trop longtemps, nos gouvernements de droite comme de gauche ont repoussé les réformes qui eussent permis de préparer la transition économique et sociale qu’appelaient les mutations auxquelles nous sommes confrontés. Trop souvent, l’Europe a servi de bouc émissaire à nos insuffisances. La première exigence qui s’imposera au futur Président de la République, sera d’assumer le destin européen de la France.

Mais les mots ne suffiront pas. Nous, européens, sommes dans une situation paradoxale où nous prétendons servir de modèle démocratique au monde mais nous n’osons pas consulter nos peuples. Nos gouvernements prétendent faire son bonheur sinon contre lui, en tous cas sans lui.

Si l’on considère que la zone euro est le coeur du réacteur européen, on ne peut qu’être d’accord sur l’urgence de la constitution d’un Parlement de la zone euro, sans lequel toute convergence réelle, économique, budgétaire, fiscale et sociale est improbable. Nous l’appelons de nos voeux depuis plusieurs années. Notre Parlement européen actuel étant privé du privilège essentiel de tout Parlement qui est de voter l’impôt, ce n’est pas un Parlement. Rien ne se fera sans y associer les Parlements nationaux détenteurs de la légitimité fondamentale. On peut discuter la proposition. S’agit-il d’un “grand soir européen” ou d’une transition raisonnée ? Réforme des Traités ou évolution dans leur cadre. Une seule chose est sûre : l’europe sera démocratique ou ne sera pas.

Le projet européen doit être assumé au niveau national, mais aussi incarné au niveau européen. Assumer, ce sera le rôle du Président que les Français vont élire. Incarner, ne passera, en l’absence d’un hypothétique homme providentiel que par la réconciliation des niveaux de légitimité démocratique nationale et européenne.

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