The Thing: c’est bon quand c’est cheap

Renaud du Peloux
Into the Scene
Published in
3 min readMay 24, 2018

John Carpenter. Même son nom fait bas-de-gamme.

C’est pourtant lui, avec ses petits budgets et ses acteurs de seconde zone, qui a fait du film d’horreur un produit de consommation de masse, un truc vraiment grand public.

Dans son chef-d’oeuvre The Thing (1982), une scène en particulier nous permet d’apprécier les ficelles de sa cinématographie bon marché. Que voulez-vous, le génie vit comme il peut.

Kurt Russell, en lequel chaque chômeur longue durée se reconnaît, se confie à son dictaphone. Une forme de vie extra-terrestre a envahi sa base arctique, éliminant un à un ses camarades. Mettez-vous un peu à sa place. Kurt en a gros sur la patate.

Voyez la couleur bleu primaire qui lui sert de toile de fond:

Les couleurs primaires sont extrêmement rare dans la vie courante, on peut presque dire qu’elles n’existent pas. Lorsque vous tombez sur de la couleur bleue, quelle que soit l’occasion, ça n’est jamais un bleu pur, mais un bleu mélangé à autre chose. Les couleurs primaires sont inhabituelles. C’est pourquoi elles sont souvent utilisées dans les films d’horreur: une couleur pure a déjà en soi quelque chose d’inquiétant.

Notez également l’angle de caméra légèrement décentré, qui attire notre attention sur la porte laissée, par mégarde, ouverte ! Mais voilà bien les ficelles du genre. Je peux vous assurer que si j’étais, moi, coincé dans une base arctique, traqué par une forme de vie extra-terrestre, je fermerais la porte derrière moi.

Comme Kurt se confie à son dictaphone, un traveling vient recomposer l’image, diminuant la valeur dramatique de la porte, offrant une composition plus classique, dans un moment d’intimité avec cet alcoolique mal rasé.

Un plan de détail vient couper cette intimité chaleureuse, interrompant le flot de sympathie canine que le spectateur éprouvait malgré lui:

Et c’est reparti avec la porte ouverte:

Derrière toi ! Espèce de vieille barrique de whisky !

Mais rien ne se passera… pour l’instant. La caméra se retire, abandonnant Kurt à une sorte de solitude de supermarché:

La grande leçon à retenir de ce chef-d’oeuvre, que votre narrateur confesse avoir visionné des dizaines de fois, c’est que le talent, ça ne s’achète pas.

L’extrait du film ici: https://www.youtube.com/watch?v=xp05VW0qlj0

Pensez à moi pour toutes vos productions vidéo.

--

--