[Bordeaux — Nicolas Calvo] 2/3 « Le monde est abondant et on ne s’en rend pas compte. »

Dans cette deuxième partie, Nicolas nous partage un moment fort de sa renaissance: l’apparition d’un double cancer de sa mère. Il nous raconte comment lui et sa famille ont réagi, ses apprentissages de cette dure expérience et son changement professionnel vers le coaching et la facilitation.

Quel moment fort as-tu vécu en 2012 ?

Ma mère est diagnostiquée d’un double cancer (poumons et seins), j’apprends cela avant Noël. Nous recevons un vrai coup de massue avec ma famille. C’est la première fois que je voyais mon père pleurer devant moi, lui qui n’exprimait jamais ses émotions. Je suis très proche de ma mère, c’est elle qui m’a éduquée, qui venait me chercher le soir à l’école. Étant fils unique, c’est vraiment une alchimie forte entre elle et moi.

Très vite, on se rend compte qu’il y a un des deux poumons qui es complètement obstrués du fait de la maladie. Elle subira une opération afin qu’on lui enlève le poumon malade, celle-ci se passa très bien. Et dans le même temps, elle commencera à faire de la chimio… Le début d’un parcours difficile, notamment en raison de tous les effets secondaires dû au traitement.

Quelle anecdote peux-tu raconter sur cette expérience ?

L’anecdote dont je me souviendrai toute ma vie, c’est le moment où ma mère me demande de lui raser la tête puisqu’elle n’a plus beaucoup de cheveux, suite aux différences séances de chimio. J’accepte sans hésiter de partager ce moment avec elle. Je me rappelle qu’il était hors de question pour elle de se regarder dans le miroir. Je lui rase la tête, je lui dis qu’elle est belle et, surtout, de prendre son temps pour se regarder dans le miroir.

Elle se tourne devant la glace et s’effondre en larmes dans mes bras. Je comprends alors pourquoi elle m’a demandé que ce soit moi. Je comprends à ce moment, toute la symbolique des cheveux pour une femme (symbole de féminité). Ce moment difficile nous l’avons vécu à deux, nous nous sommes soutenues mutuellement. Je lui ai dit que je serai toujours là pour elle peu importe ce que nous rencontrerons dans la vie.

Avec du recul, elle m’a fait un cadeau merveilleux de me faire partager ce moment douloureux avec elle. Par la suite ma maman a continué à vivre en achetant des perruques, des turbans.

J’en parle assez librement puisque cet évènement fait partie de ma vie, et c’est très important pour moi puisque toutes ces “aventures” ont conditionné qui je suis maintenant.

En quoi ce contexte te fait penser que tu vis une renaissance ?

Ces deux événements m’ont fait prendre conscience de ceci:

« Nicolas, si tu as envie de faire quelque chose, fais-le ».

J’ai eu instantanément des questionnements sur le sens de la vie. On ne sait pas ce que demain sera fait, si un jour je suis malade comme ma mère, il faut que je vive pleinement ma vie. Une vie sans regret!

Je me suis dit : « Je quitte mon boulot, j’ai plus de salaires, ce n’est pas grave! Je vais avoir du chômage pendant deux ans, et même si je n’ai plus de chômage, je retournerais chez mes parents. ».

Problème: je sais ce que je veux plus, mais je n’ai aucune idée de ce que j’ai envie de faire!

Pour me retrouver, j’ai commencé à faire du développement personnel avec des interrogations simples.

“Qui est Nicolas Calvo qui a fait des études de comptabilité et qui s’est perdu dans ce métier-là ?”

“ Quels sont mes rêves et mes aspirations profondes?”

Par ces questionnements personnels et toutes mes lectures, je me suis redécouvert peu à peu. J’ai commencé à faire un travail sur moi. J’ai essayé aussi de trouver des réponses à la maladie de ma mère. Ce temps-là m’a aussi permis d’être auprès de ma mère quasiment tous les jours pour partager des moments de vies extraordinaires avec elle. C’est un véritable cadeau que l’on s’est fait. C’est un bonheur incommensurable d’être auprès de sa famille, surtout dans ces conditions-là.

Le monde est abondant et on ne s’en rend pas compte.

Ce qui me porte chaque jour, c’est de me dire que peu importe ce que demain soit fait, je ne dois pas avoir de regret. Tout le temps dont je disposais était donc consacré d’une part à me retrouver et d’autre part à vivre cette maladie auprès de mes parents…

Qu’est-ce que tu as appris de ces questionnements ?

Le monde est abondant et on ne s’en rend pas compte. On a tout ce qu’il faut là où il faut. Il y a tout sur cette Terre, il y a juste à avoir l’esprit et le coeur ouvert.Qu’on s’autorise à être ce que l’on est, et à faire ce que l’on a envie de faire. Notre vie est précieuse et notre temps est malheureusement limité, alors croquons là avec simplicité et passion.

C’est ce que j’ai appris grâce à la maladie de ma mère.

J’ai aussi pris conscience que j’aimais mes parents mais je leur avais jamais dit… nous ne l’avions jamais exprimé entre nous. Depuis ce jour, j’ai mis un point d’honneur à exprimer ce que mon cœur vivait au plus profond de lui. Et à partir de ce moment-là, toute notre relation familiale a été complètement chamboulée: l’amour s’est révélé au grand jour pour mieux nous enrober. Pendant les 5 années passaient auprès de mes parents, je ne me suis jamais senti aussi vivant et en pleine conscience. Chaque moment était unique et tout mon être était là pour le ressentir et le vivre intensément.

Pourquoi le coaching ?

J’adore l’humain, la maladie de ma mère m’a rapproché encore plus de mes valeurs humanistes. Comment fonctionnons-nous ? Comment peut-on accompagner la fragilité humaine?

Pendant un an, je commence donc à me former en coaching. J’apprends la PNL, l’analyse transactionnelle, la communication non violente…

Je commence à coacher pas mal de personnes. Je me souviens d’une jeune femme qui avait des difficultés avec l’image qu’elle avait d’elle. Elle ne se trouvait pas bien. Voilà le cadeau que j’ai reçu suite à notre coaching :

« J’ai plus appris durant cette période avec toi qu’en 5 ans de psychanalyse. Nicolas, merci absolument pour ce que tu as fait pour moi »

C’est l’une de mes raisons qui me pousse à continuer. Elle m’a fait un beau cadeau.

A ce moment-là, je me dis que le coaching perso c’est cool et j’aime vraiment ça. Mais ce qui m’anime depuis toujours c’est les groupes, travailler en équipe, animer un collectif et le faire avancer.

On a totalement oublié notre interdépendance les uns des autres. A force de vivre détaché de nos émotions, nous oublions qu’elles rythment nos vies et nos décisions.

Je me forme donc à plein de pratiques et méthodes d’intelligence collective. J’organise des formations sur l’activation des talents de chacun, des formations sur l’intelligence collective. Ça marche bien, les gens découvrent d’autres manières d’être et faire ensemble. Bref, je m’éclate et eux aussi.

De fil en aiguille, j’ai intégré l’organisation du Tedx Bordeaux. Chaque année, je vis des histoires incroyables, l’humain est fascinant. Les histoires de vies me passionnent. Les gens ne s’en rendent pas compte, mais nous apprenons constamment les uns des autres.

On a totalement oublié notre interdépendance les uns des autres. A force de vivre détaché de nos émotions, nous oublions qu’elles rythment nos vies et nos décisions. C’est aussi elles qui nous relient aux autres. C’est fondamental pour moi!

Peux-tu détailler cette partie ?

Par exemple quand j’étais comptable, je me souviens d’une collègue qui avait pas mal de soucis personnels. Il lui arrivait régulièrement de venir le matin en larmes au travail. Son état eu un gros impact sur notre ambiance de travail. Il était difficile pour nous de travailler puisqu’elle ne se sentait pas bien. La tristesse de son état s’était propagé dans tout le service.

L’interdépendance se fait continuellement, même si on ne se parle pas, nous ressentons tous ce que nos personnes proches ressentent, nous arrivons à lire en l’autre (neurones miroires). Nous sommes tous interconnecté les uns aux autres.

Retrouver les deux autres parties du portrait de Nicolas Calvo sur La Fabrique des Solutions, vous pouvez interagir directement avec lui via son Twitter et son blog.