Modèles mentaux #1 : Le biais du survivant

Valentin Decker
L'atelier Verrochio
5 min readJan 22, 2017

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Avant de commencer la lecture de cet article, je vous conseille fortement de lire l’introduction aux modèles mentaux que j’ai rédigé ici, qui vous permettra de mieux comprendre de quoi je vais parler.

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Pour comprendre le biais du survivant, laissez moi vous faire une proposition. Je vous propose de jouer à un jeu dans lequel vous avez 5 chances sur 6 de gagner. Et si vous gagnez je vous offre 5 Millions €. Ca vous tente ?

→ Vous vous demandez certainement où est le piège ?

Je vous propose en fait de jouer à la Roulette russe*. Vous placez une seule balle dans votre chargeur de révolver qui peut en contenir normalement 6. Vous placez le révolver au niveau de votre crâne. Vous appuyez. Vous avez 1 chance sur 6 de mourrir et 5 chances sur 6 de devenir riche.

Bien que n’étant qu’un jeu, la Roulette russe est une bonne analogie nous permettant de comprendre comment notre perception de certains éléments peut être erronée.

→ Admettons que vous gagnez. Que se passera t-il ?

Le public observera alors vos signes extérieurs de richesse, sans forcément savoir que vous avez joué à la Roulette russe. Vous obtiendrez l’admiration et serez vanté pour votre mérite. Et finalement on vous considerera comme une personne ayant eu du succès dans la vie.

→ Mais quel est le problème avec cela ?

Et bien pour exactement la même action (appuyer sur la détente), le résultat aurait pu être différent et vous seriez mort. C’est ce que l’on appelle “une histoire alternative”.

Vous voyez donc que la croyance générale qui veut que “si le résultat est bon, c’est parce que le processus et les décisions prises ont été les bonnes” ne tient pas toujours.

Parfois, la même action initiale peut donner une grande quantité de conséquences différentes. La vie n’est pas un processus linéaire : le hasard et les facteurs externes jouent un rôle très important.

Pour bien comprendre, prenons un deuxième exemple.

Les chances de gagner au Loto sont infimes. Pourtant toutes sortes de charlatants essaient de vous vendre des livres/formations mystiques vous assurant des gains assurés. Rationellement aucune formation ou technique magique ne peut vous faire gagner au Loto.
Mais si des centaines de milliers de personnes appliquent ces formations tous les jours pendant plusieurs dizaine d’années, alors il y aura forcément un gagnant un jour. C’est mathématique. Que se passera t-il alors ? La personne gagnante estimera qu’elle a gagné grâce aux techniques magiques qu’elle a mis en place. Et le vendeur de la formation s’assurera des ventes à vie.
Evidemment, c’est sans compter sur les centaines d’autres miliers de personnes qui ont appliqués ces techniques sans succès. Car eux, on ne les entend pas.

Les organisateurs de ce type de loterie l’ont bien compris et vous vendent le fameux : “100% des gagnants ont joués au Loto”. Même décision initiale, différents résultats.

→ Le biais du survivant peut être énnoncé ainsi :

On ne voit que les personnes qui ont eu du succès sans considérer ceux qui ont fait exactement la même chose mais ont échoués (généralement, ils sont morts et n’ont écrit aucun livre).

Ce biais cognitif est particulièrement présent dans le monde de la finance.

Il existe parfois des “chanceux idiots”. Des personnes qui vivent pendant plusieurs années / décennies grâce à un pari réussi qui semblait totalement improbable, extrême et défiant toute rationnalité au moment de sa réalisation.

Idem pour le monde du sport. Un footballeur peut bâtir une carrière entière et une réputation sur un but incroyable, mais extrêmement chanceux.

→ Alors comment se prémunir de ce biais du survivant pour éviter qu’il affecte nos décisions ?

La règle d’or : ne pas juger une décision en fonction de son résultat. C’est une solution de facilité qui peut nous induire en erreur dans de nombreuses situations. Une mauvaise décision peut avoir une conséquence positive à court terme (gagner à la roulette russe). Mais la répétition de mauvaises décisions similaires aura des conséquences désastreuses à long terme (mort à la roulette russe).

La matrice suivante permet de bien comprendre :

Si vous prenez de mauvaises décisions, il est possible que le résultat soit bon à court terme. Mais il sera inévitablement mauvais à long terme.

Demandez vous en permanance si la décision que vous prenez est la plus rationnelle possible, compte tenu des élements que vous avez en votre possession.

Lorsque l’on étudie le succès d’une personne ou d’une entreprise, il faut essayer de comprendre son processus de décision. Les choix faits étaient-ils rationnels au moment où ils ont été pris ? Quels facteurs ont été pris en compte ? Si les choix faits sont les bons, les résultats seront forcément bons à long terme. Et inversement.

“La justess d’une décision ne peut pas être jugé selon son résultat. Néanmoins, c’est comme ça que les gens font. Une bonne décision est une décision optimale au moment où elle est prise, quand le futur est, par définition, incertain.”

Nassim Thaleb

Essayez également de réfléchir aux possibles histoires alternatives. Essayez d’inverser votre mode de pensée. Essayez d’imaginer quelles pourraient être toutes les conséquences possibles (positives et négatives) du choix que vous allez faire. En gardant à l’esprit que le hasard joue un grand rôle.

Analysez l’ensemble des éléments en votre possession, de la manière la plus rationelle et objective. Maximisez les pour finalement prendre la meilleure décision possible.

Et n’oubliez pas, nos biais cognitifs faussent notre raisonnement … Même si on se pense à l’abri. Personne n’y échappe.

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→ Pour retrouver le reste de ma série sur les biais cognitifs :

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