Des élections directes, maintenant !

Gwenaelle Iarovay Clerc
Latinioo
Published in
3 min readNov 28, 2017

C’est un écho de l’histoire qui résonne aujourd’hui partout au Brésil. Le slogan « des élections directes, maintenant », avait, en 1984 mobilisé des dizaines de milliers de Brésiliens afin de faire tomber la dictature en place depuis 1964, en exigeant de nouvelles élections présidentielles. Ce slogan est de nouveau d’actualité et les Brésiliens réclament, en le scandant, l’avancée des élections afin de renverser Michel Temer, le président brésilien de la corruption.

Ces mots avaient, à l’époque été le symbole d’un soulèvement populaire historique, d’une révolte du peuple contre le gouvernement en place. A en croire les derniers évènements, on pourrait croire que rien n’a vraiment changé. Les manifestants descendent dans les rues suite aux nombreuses accusations contre le Président Tomer, inculpé dans plusieurs affaires judiciaires de corruption et de blanchiment d’argent.

Le slogan affirme que la seule solution à la crise politique actuelle sera la démission de celui-ci et l’appel à de nouvelles élections présidentielles, officiellement prévues pour octobre 2018.

Cependant, cette solution n’est pas si facile qu’il n’y parait puisqu’elle nécessiterait un remaniement constitutionnel. En effet, selon la Constitution brésilienne, la démission d’un président peut être ne peut être accordée que si le Congrès accepte d’organiser de nouvelles élections dans les deux premières années du quadriennat. Or, les prochaines élections ayant lieu en 2018, ce délai est aujourd’hui dépassé. Dans le cas présent, le président peut donc démissionner mais cela maintiendrait la date des prochaines élections. Le pouvoir présidentiel serait alors repris par un candidat élu par le Congrès. Ce serait alors des élections indirectes alors que le peuple brésilien réclame, lui, un nouveau dirigeant directement élu.

En revanche, si le président Temer décide de ne pas démissionner, il faudrait soit :
- Que les deux tiers des membres du Congrès s’accordent et acceptent de le démettre de ses fonctions
- Ou bien que la Cours suprême trouve des preuves criminelles contre lui afin de pouvoir le congédier. Dans ce cas, il faudrait également l’accord des deux tiers des membres du Congrès.

Le problème est que les membres du Congrès brésilien ne parviennent pas à trouver un accord, et à statuer sur le sort politique de Temer, et ce depuis des mois.

Même dans l’éventualité d’un arrangement commun et immédiat, il semble impossible de mettre en place une nouvelle procédure avant janvier 2018. De plus, organiser des élections dans les prochains mois favoriserait grandement Lula, ex président de gauche, récemment condamné à 9 ans de prison pour corruption et blanchiment d’argent, favori dans les sondages. Il existe d’autres candidats mais la quasi-totalité d’entre eux est accusée de corruption. Tous ces éléments n’incitent pas les députés de tous bords à trouver une solution dans les plus brefs délais.

Il y existe une troisième possibilité, peut-être la plus rapide et la plus commentée par les politistes brésiliens : celle de disqualifier Temer pour avoir illégalement financé sa campagne présidentielle de 2014. Dans ce cas, la présidence provisoire reviendrait au président du de la chambre des députés ou du sénat, tous deux sujets d’une enquête dans le scandale de Petrobras. La seule fonction de cette présidence provisoire serait alors d’organiser de nouvelles élections, directes, dans l’idéal. Encore faudrait-il réussir à trouver les preuves suffisantes contre Temer et ainsi le décharger de ses fonctions.

Cette crise politique dure depuis des mois et ne semble pas avoir de fin. Espérons qu’il est encore possible pour le Brésil de trouver rapidement ce qui lui manque : des dirigeants de confiance, non corrompus, animé non pas par l’avidité mais par le souhait de mettre la politique de leur pays dans le droit chemin de la transparence et de la moralité.

El pais, La oposición brasileña se moviliza para pedir nuevas elecciones, 19/05/17 :https://elpais.com/internacional/2017/05/19/america/1495147287_750010.html

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