[La sélection du Lab] Mobilité : Quel modèle de partage pour les données ?

Charles Waubant
Le Lab OuiShare x Chronos
5 min readApr 14, 2017
( Praed Street Blue by =BSayler)

D’où viennent les données ? Quels usages servent-elles? Qui les possèdent ?
Le secteur de la mobilité, où de nombreux acteurs privés ont pu se substituer aux institutions pour la création de services d’utilité publiques, illustre bien l’enjeux des discussions actuelles autour de la Data.

Des modèles contributifs

Prenons le cas de Waze, leader dans la navigation routière collaborative, fort d’une communauté de 70 millions d’utilisateurs réguliers. En échange d’un accès gratuit au service,ceux-ci fournissent, activement et en temps réel, les données qui permettent à l’application de proposer ses prévisions si précises et services si performants.

L’utilisateur est également mis à contribution chez CityMapper, qui se définit comme “l’application ultime de transport urbain”, avec une approche de personnalisation locale forte. Cette application gratuite permettant de calculer des itinéraires urbains, en combinant plusieurs modes de transport.(métros, trains régionaux, vélos ou voitures en libre-service, VTC…)

Les contributeurs ne sont pas que des usagers : chez ZenBus, la solution s’appuie sur la récupération des données émises par le smartphone des conducteur de bus, afin de proposer gratuitement aux utilisateurs la visualisation du bus en temps réel, et une supervision facilitée aux exploitants.

De son coté, l’initiative gouvernementale française Le.Taxi espère rassembler une communauté de Taxis désireux d’accroître leur visibilité via une plateforme de mise en relation pour les clients à proximité. Une contre-offensive potentielle face à l’explosion actuelle des VTCs — sous réserve de participation et animation actives de la communauté de taxi — et qui rencontre pour l’instant un démarrage modéré.(Voir notre article détaillé )

Need a Taxi ? (crédit : jordi espel)

Données ouvertes… ou en cours d’ouverture !

Chez certains, la propriété reste la clef de leur business modèle. Pour le consortium de constructeur à la tête du logiciel de navigation Here, l’enjeu est clair : résister face à Waze et Google dans la bataille pour le contrôle des tableaux de bords. Spécialiste historique de la cartographie, équipant 80% des véhicules en Europe et Amérique du Nord, Here mise désormais son développement sur son projet Open location Platform. Une opportunité de monnayer l’exploitation des données issues des capteurs embarqués dans les véhicules, déclinée en plusieurs services : informations de circulations, danger, signalisation, parking… Zenbus, cité plus haut, se base également sur un système de données propriétaires.

De son coté, conscient de l’ambiguïté de son statut de service public rendu par une entreprise privée, Waze a lancé depuis fin 2014 le programme Connected Citizens. Les partenaires, institutions et opérateurs routiers, peuvent alors avoir accès aux données de trafic Waze, anonymisées, en échanges des informations sur les fermetures de routes, travaux, feux de circulation…

CityMapper contribue également à l’ouverture des données… des autres ! Ses algorithmes combinent les données ouvertes, celles des usagers, mais aussi celles de “partenaires” plus ou moins coopératifs : la pétition CityMapper est en effet en grande partie à l’origine de l’ouverture des données temps réels du matériel roulant à Paris, jusque-là chasse gardée de la RATP.

“Les données de transport doivent devenir un commun, un bien public” Yann Leriche, Transdev

L’ouverture des données est aussi l’enjeux des initiatives comme Catalogue, de Transdev ou encore Navitia (Keolis). Ces solutions entendent faciliter l’accès et l’utilisation des données de navigation par de nouveaux acteurs et services : ”Les données de transport doivent devenir un commun, un bien public” estime en effet Yann Leriche, directeur digital de Transdev. Ces deux initiatives, de par leur démarche ouverte, gratuite (potentiellement premium pour les gros utilisateurs) et à ambition globale, s’inscrivent dans le débat sur la donnée comme bien commun au cœur de nos “Smart” cités.

Non-profit et open-source : l’étape d’après ?

Au delà de ces initiatives privées, plusieurs projets à but non-lucratifs et complètement open source, contribuent à ce mouvement d’ouverture :

  • L’association Easy transport, qui propose une boite à outil afin de créer de manière collaborative un plan précis et fiable des transports pour les villes qui n’en possèdent pas. En mettant à disposition une application mobile qui permet de collecter les données des arrêts de bus directement sur le terrain, de les mettre en formes et d’offrir un rendu cartographique, le projet à déjà pu porter ses fruits dans une ville du Nicaragua.
  • Le projet académique One Bus Away, application gratuite regroupant les données ouvertes de transport . Elle est actuellement utilisée par 11 villes américaines, canadiennes et polonaises.
  • La plateforme opentraffic, soutenue par le Groupe de la Banque mondiale, récupère et traite, de manière anonymisée, les informations issues des flux GPS des smartphones et des véhicules, afin de créer des données de trafic fiables, ouvertes et participatives pour faciliter la création de services efficaces.
source : http://opentraffic.io/

Ces organisations sont autant d’invitations, pour les entreprises productrices de données et les opérateurs de transport, à collaborer avec les institutions et les acteurs de l’open data, afin de contribuer à un système efficient pour le bénéfice de tous.

A ce titre, mention spéciale pour Ride Austin. Après l’abandon de la ville par Uber et Lyft, un entrepreneur Austin a en effet décidé de lancer une application locale de mise en relation entre clients et conducteurs. Soutenu et financé par la Mairie d’Austin (au Texas), maintenue notamment grâce au dons de la communauté, ce service innove par son caractère participatif, son ambition Open source, sa visée sociale et non lucrative… un exemple réplicable pour lutter contre l’Uber-privatisation ?

Tous ces cas illustrent les enjeux du partage des données pour la mobilité de demain. Ils sont l’objet de l’exploration Datacités portée par Le Lab OuiShare x Chronos et ses partenaires.

Et ces sujets seront évidemment abordés lors du prochain Ouishare Fest des 5 au 7 juillet 2017 !

Si vous avez aimé l’article, aidez-nous… likez, partagez !

Pour aller plus loin :

Notre article à propos de la solution “Le Taxi” : https://medium.com/le-lab/le-taxi-une-plateforme-made-in-france-61ef9fe34c42

Notre article à propos de Ride Austin : https://medium.com/le-lab/ride-austin-la-plateforme-vtc-%C3%A0-impact-local-et-positif-7429216d3ec5

--

--