Diététique de l’information

Philippe Francais
Le monde qui vient
Published in
3 min readSep 15, 2013

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Peut-on digérer l’information quand le flux continu des news inonde notre «temps de cerveau disponible» ?

Entre les breaking news de LCiTVbfm, les rumeurs lancées à partir des batteries de YouTube et le maëlstrom des yahoonews ! a-t-on encore la capacité de faire la part des choses, de prendre du recul ou tout simplement de prendre plaisir à écouter le bruit du monde en marche ? Comment éviter l’infobésité et mieux consommer l’information ?

D’abord, calculer sa surcharge pondérale en matière d’information, appelée aussi «surcharge informationnelle».Imaginons une application smart phone (What’sup?) qui nous permet de calculer notre graisse informationnelle. Son algorithme mixe le nombre d’emails spamés que nous recevons chaque jour, le nombre de newsletter auxquelles nous sommes abonnés, le nombre d’alertes Google que nous avons paramétrés, le nombre de signes que nos yeux eyetrackés (grâce aux Google Glass) reçoivent chaque minute. Il ajoute un facteur x de sérendipidité égal à nos vagabondages sur la toile.

Nous obtenons ainsi notre surpoids informationnel et nous pouvons commencer le régime…

Le docteur Boucan, nutritionniste de l’information, auteur du célèbre régime caféïné (la caféine est, on le sait, un substitut de protéine très utilisé dans les salles de rédaction) propose quatre recommandations :

  1. Premièrement, vérifier la source, l’origine des produits. Pardon, des informations… Comment éviter de prendre des vessies pour des lanternes, autrement dit de la viande chevaline pour des lasagnes à la bolognaise ? Savoir qui émet l’information, quelles sont ses intentions, pour qui il travaille, permet d’avaler l’information avec discernement. Une bonne méthode est la traçabilité, très facile à mettre en place sur internet. On peut remonter facilement à la source dans le big data.
  2. Deuxièmement, éviter les informations grasses. Par exemple celles qui dégoulinent de flatteries mielleuses, celles qui défilent sur le fiel des news. Vous trouverez de beaux échantillons dans les rayons de «Touche pas à mon poste» et autre Morandineries qui sont devenus les poubelles de tout ce que vous n’avez jamais eu envie de savoir.
  3. Troisièmement, faire de l’exercice : muscler nos neurones, c’est à dire réfléchir à ce que vous lisez : mettre l’information en perspective, contextualiser, porter un regard critique. Réfléchissez en groupe. Vous verrez qu’on enrichit très vite ses neurones en participant à des débats…
  4. Enfin, manger diversifié et équilibré. Ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier est une règle diététique. On pourrait prendre une autre image : il s’agit de manger à tous les râteliers. En recoupant vos informations avec des sauces différentes, vous leur donnez du relief. Vous ne serez plus dans l’unidirectionnel, vous ajoutez de la profondeur, de la longueur en bouche, du piment, de la saveur…

Pour conclure, un dernier conseil, faîtes carême à certaines périodes. Un week-end de décrochage. Une soirée hors du flux. Une semaine avec les doigts de pied en éventail. Au retour, vous verrez que votre appétit sera revenu et que vous prendrez plaisir à ouvrir votre journal et à découvrir le monde en marche…

De Philippe Français

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