Le système éducatif est malade, sera-t-il capable de se soigner ?

Une orthophoniste au pays de l’école…

Le Petit Buisson
Published in
15 min readApr 7, 2016

--

J’ai lu récemment de très bons articles sur Medium qui m’ont donné envie de réagir parce qu’ils me touchent à double titre, en tant que parent d’abord mais aussi en tant que professionnelle. Il s’agit des articles de valbecmeur (1) et Marine Kervella (2).

Je ne suis pas professionnelle de l’éducation, mais de la rééducation. Je ne suis pas employée de l’éducation nationale, mais professionnelle de santé, dont les actes sont remboursés par la sécurité sociale. On m’appelle orthophoniste en France, logopède en Belgique, et speech therapist partout ailleurs où ce métier existe, ce qui n’est pas pléthore. Je prends en charge l’ensemble des troubles de l’oralité, du langage et de la communication de l’enfant en bas âge jusqu’au vieillard grabataire. Cette définition de mon métier est suffisamment large pour faire renter dans mon champ de compétences un panel très diversifié de pathologies, ce qui en fait à mon avis tout son intérêt et tout son sens. Je n’ai pas l’intention ici de publier la nomenclature des actes d’orthophonie, que l’on se rassure!

Mes études et ma pratique me permettent d’avoir une vision assez transversale dans le domaine du langage, de la communication et des apprentissages, mais avec un point de vue qui n’est pas le même que celui du parent ni du professeur, si je ne parle que des enfants.

Il se trouve donc que, souhaitant rester généraliste, je prends en charge beaucoup d’enfants qui, devinez quoi, vont aussi à l’école. Il se trouve même que, dans beaucoup de cas, le véritable prescripteur des soins que je “prodigue” n’est pas le médecin mais l’enseignant. Il se trouve aussi que, comme la très grande majorité de mes collègues libérales, je ne peux répondre à toutes les demandes et ma liste d’attente s’allonge. Je ne devrais pas m’en plaindre, sauf qu’il me semble y voir quelque chose de symptomatique de l’évolution de la maladie dont souffre l’école.

Pour tout dire, je me sens régulièrement confrontée à l’idée d’être considérée comme une espèce de roue de secours qui permet au système éducatif actuel de continuer à rouler, et c’est très très désagréable… J’ai souvent l’impression que, dès que l’élève est en difficulté à l’école, l’enseignant se dit: “il va faire de l’orthophonie, et on verra bien”, ce qui peut vouloir dire “je m’en lave les mains” ou “on verra bien si elle sait faire mieux que nous” ou “on ne sait jamais, des fois qu’on passerait à côté de quelque chose”. Ceci est particulièrement le cas à l’école primaire et au collège, quand il s’agit d’apprendre à lire et à écrire. En tout cas, très souvent, ça ressemble soit à une démission, soit un aveu d’impuissance, soit à un appel au secours de la part de l’école. Je suis devenue persuadée que c’est surtout la pathologie du système scolaire qui alimente et fait s’allonger ma liste d’attente. Je me retrouve donc dans un piège assez inextricable où je suis consciente de ne pas prendre en charge assez vite des enfants qui ont vraiment besoin de soins, mais je ne peux pas le savoir à l’avance tant que je ne les ai pas reçus. Et en même temps, je suis consciente que les difficultés d’apprentissage d’un certain nombre d’enfants que je prends en charge trouvent essentiellement leur cause dans le déficit pédagogique de l’école, mais je ne peux décemment pas les renvoyer en leur disant “débrouillez-vous, ce n’est pas mon problème!”

Cette question n’est pas nouvelle, et les instituts d’orthophonie travaillent depuis au moins 10 ans avec le ministère de l’éducation nationale, participent au grand plan contre l’illettrisme, mènent des actions de formation, de dépistage et de prévention au sein des écoles. J’ai moi-même été partie prenante dans deux projets différents de partenariat avec l’école, à l’échelle de ma région. J’ai été dans des écoles et collèges pour animer des formations, j’ai discuté avec des enseignants, dans le cadre de ces partenariats. Le partenariat est une notion importante car cela va au-delà de la collaboration: les partenaires se retrouvent autour d’une problématique commune qui les touche tous les deux, pour mettre en commun des savoirs, des compétences et des angles de vues différents afin de trouver des solutions qui intègrent l’ensemble de cette problématique. En l’occurrence, les deux projets dont je parle s’attelaient à l’échec scolaire à l’école primaire. Je suis entrée dans ces projets avec beaucoup d’enthousiasme. J’en suis sortie avec l’impression qu’ils représentaient un dixième de goutte d’eau dans l’Océan Pacifique. Pourquoi de belles idées deviennent-elles des serpents de mer que l’on traînent pendant des décennies? Franchement, je n’en sais fichtrement rien… si ce n’est par manque de combattants. De tels projets de partenariat n’ont de sens que dans la mesure où les personnes qui en sont à l’origine réussissent à trouver des relais nombreux qui s’organisent au sein des deux corps de métier. Le partenariat devrait aboutir à un mélange des cultures. Et bien, ce que j’ai entendu m’a beaucoup remuée et m’a fait relativiser l’idée du partenariat. En voilà un petit résumé:

  • “Ah! ben nous, les orthophonistes, on ne les voit jamais!” (oui c’est vrai, hélas!)
  • “Ah! ben nous, on n’est pas formé à tout ça! (oui c’est vrai…hélas!)
  • “Ah! ben nous, on nous a dit de venir à la formation, mais on ne savait pas pourquoi!” (ah bon… ben je vais vous expliquer alors…)
  • “Ah! ben nous, on trouve que c’est bien ce que vous nous expliquez, mais bon, on ne peut quand même pas s’intéresser à chaque cas particulier! On n’est pas comme vous, on n’en a pas qu’un à s’occuper, on a 30 élèves nous!” (oui ça je le sais bien…mais vous n’avez jamais entendu parler de la pédagogie différenciée??)
  • “Ah! ben nous, on ne demande pas mieux que nos élèves réussissent, mais bon vous savez, en 20 ans de métier, on voit bien que les enfants sont plus pareils…(ah bon… vous voulez dire quoi exactement…)

Ce que j’en ai conclu tient en quelques mots: l’école sait qu’elle est malade, elle sait que c’est une maladie grave, mais elle est un peu comme le cancéreux du poumon qui ne peut pas s’arrêter de fumer, elle se dit qu’il n’y a plus rien à faire, que tout cela la dépasse, qu’elle a beau lutter avec ses petits poings dans sa petite classe, elle n’y comprend rien à ce qu’on lui demande de faire, alors, faute de mieux, elle continue à faire comme elle a l’habitude. Faire de la bonne école pour les bons élèves, et pour les autres … c’est du bricolage. Petits bidouillages par ci, yakafokon par là …. Chacun a ses petites idées dans son petit coin, il y en a même qui ont d’excellentes idées mais il ne faut pas trop le dire des fois que ça ne plairait pas au nouvel inspecteur d’académie…

La fuite en avant…

Evidemment, je souhaite à plus d’un titre que le système éducatif change. Cependant, plus sa maladie avance, plus l’école se dégrade, plus je trouve urgent de poser les vrais problèmes et de ne pas s’embarquer dans des espèces d’utopies idéologiques pour espérer les résoudre. Dans le même temps, quand on écoute les médias nationaux, par exemple à l’occasion de la réforme du collège ou en son temps la réforme des rythmes scolaires, on a l’impression que les choses sont appréhendées par le petit bout de la lorgnette, et c’est assez navrant.

Je comprends donc pourquoi il semble aujourd’hui important, pour qui cherche à défendre un véritable changement du système éducatif, de faire appel à des courants pédagogiques libertaires comme A S. Neill, cité par valbecmeur. Il n’aura échappé à personne, qui s’intéresse à ce sujet, comme Mme Montessori est devenue une superstar top à la mode (RIP, j’espère que ses ayants-droits en profitent). Dans son sillage réapparaissent les noms de Freinet, Decroly, Steiner pour ne citer que les plus célèbres.

Le constat d’échec de masse du système éducatif actuel est patent, plus personne n’oserait le nier. C’est le moment idéal pour refaire parler les partisans d’une pédagogie dite naturelle, centrée sur les besoins de l’enfant, qui ont été très vite marginalisés en leur temps (c’est-à-dire vers 1920–1930), si vite qu’on a oublié de tirer les enseignements de leurs recherches.

Parler et discuter sur les nuances qu’il convient d’apporter à la notion d’autorité, comme le font Marine Kervella et valbecmeur, me semble tout à fait indispensable dans notre société actuelle, tant les parents et éducateurs en général sont en manque de repères sur cette question.

Réaffirmer que l’enfant n’est pas un récipient que l’on remplit de connaissances, que le savoir n’est pas une accumulation de connaissances mais qu’il se construit au travers d’expériences répétées et diversifiées, est évidemment indispensable. Quand on lit les études en psychologie cognitive, on ne discute même plus cela, c’est une évidence.

Pourtant, le système éducatif actuel n’a à aucun moment réussi à se saisir des données fournies par les études de psychologies cognitives. C’est à peine si les professeurs qui exercent dans nos écoles ont étudié et appris des travaux de Piaget, pédagogue au demeurant, alors qu’il fait partie des pères fondateurs et néanmoins dépassés de la psychologie moderne. C’est tout dire.

Pourquoi? Comment cela est-il possible? Comment se fait-il qu’une pétition circule sur Change.org (que j’ai signée) pour demander à notre ministre de l’éducation de donner le droit à tous les parents sur tout le territoire d’avoir accès aux pédagogies alternatives?

Ce qui me choque le plus là dedans, c’est le mot “alternatives”!

Saviez-vous qu’il n’y a encore pas si longtemps, une mère de famille de 3 enfants et plus pouvait s’inscrire au concours de professeur des écoles sans autre besoin de diplôme. Voilà comment on considère ce qu’est la pédagogie en France: l’affaire des mères, en tout cas, une chose qui relève de l’instinct, comme le soit-disant instinct maternel, et qui ne s’apprend que sur le tas…

La pédagogie n’est pas affaire d’instinct. On ne naît pas pédagogue, on le devient avec de l’expérience mais aussi avec un bagage théorique. Il faut une école de la pédagogie!

Je me demande vraiment ce qu’il vaut mieux espérer comme renversement du système: détruire l’école et proposer des grands jardins pour jouer au ballon jusqu’à 14 ans ou renverser totalement le mode de recrutement et de formation des professeurs?

En réalité, je ne me le demande pas tant que ça. Tout simplement parce que je souhaite rester pragmatique.

En sciences de l’éducation, largement nourries par les neurosciences, il y a un consensus pour dire que:

  • Le sentiment de liberté est une donnée essentielle de l’apprentissage parce qu’elle nourrit la motivation, et la motivation est le moteur de l’apprentissage;
  • l’enfant est “quasi” programmé pour structurer et enrichir ses connaissances du monde environnant par un processus essai/erreur, hypothèse/anticipation/vérification ou non-vérification de l’hypothèse, l’ensemble ayant comme support biologique un processus neuronal dynamique de connexion sélective, de spécialisation et d’inhibition, avec des périodes sensibles de développement.

Rien qu’en regardant ces deux points, on est saisi par l’apparente contradiction entre le mot liberté et les mots sélection ou inhibition, cela vaut bien quelques années sur les bancs de la fac pour en comprendre les théories sousjacentes et savoir quoi en faire dans une classe, non?

Les pédagogies dites alternatives ont été marginalisées à leur époque parce qu’elles ne répondaient pas du tout à la définition de la mission de l’école qui était communément admise: éduquer les “classes moyennes et supérieures”. Quand l’idée de l’école pour tous s’est concrétisée, personne ne doutait que l’école allait réussir à éduquer en masse puisqu’elle réussissait très bien à éduquer les élites. A part quelques chercheurs qui ont commencé à parler de pédagogie différenciée (comme P. Meirieu ou P. Perrenoud) personne n’avait vraiment pensé que l’école, devenant ouverte à tous dans le but de promouvoir l’égalité des chances, serait obligée de changer ses pratiques pédagogiques. Ces belles pratiques, imaginées et somme toute efficaces pour des groupes sociaux homogènes, dans une société beaucoup plus figée, ont encore cours aujourd’hui alors que l’école ouverte à tous est par définition hétérogène, plurielle, diverse.

Figurez-vous que la raison pour laquelle il semble impensable pour le corps enseignant de changer sa culture de pratiques pédagogiques tient dans un seul mot: ÉGALITÉ.

Je ne compte pas le nombre de fois où j’ai entendu: “Il n’y a pas de raison que celui-là ait un traitement de faveur, il est à l’Ecole, il doit faire comme les autres, comment voulez-vous que je sois crédible vis à vis des autres élèves sinon!” (oui… mais en fait, il n’est pas tout à fait comme les autres…) C’est au nom du principe d’égalité que l’école applique la même pédagogie pour tous quand bien même elle se rend compte qu’elle ne marche pas pour tous. C’est au nom du principe d’égalité que l’école crée et accentue les inégalités. De quoi se cogner la tête contre les murs! (Lisez Alain Bentolila, il explique très bien cela).

C’est au nom du principe d’égalité que l’école crée et accentue les inégalités.

Revenons à l’idée de programmation du cerveau du jeune humain à apprendre de manière innée. Est-ce une raison pour se dire que l’éducateur n’a rien à y faire “là-dedans”? Est-ce une raison pour finalement dire que le meilleur éducateur serait celui qui parviendrait à intervenir le moins possible dans le processus? Est-ce que l’enfant totalement libre dans son environnement, sans guide ni tuteur, serait capable de devenir un adulte intelligent sur le plan cognitif, social et affectif? Est-ce qu’il faut vraiment penser l’enfant comme une espèce de représentant de la pureté originelle de l’humanité pervertie au contact de l’adulte et qu’il convient de préserver à tout prix, comme on “doit” préserver la nature de la pollution environnante? Voilà ce qui devient de l’idéologie.

Ce qui se passe avec la réactivation des Montessori et consor n’a rien à voir avec de l’idéologie, en tout cas il me semble assez contre-productif d’en faire une affaire idéologique. Il se passe que Madame Montessori, travaillant avec des enfants handicapés, a eu le nez de construire pléthore de matériels pédagogiques en cherchant à comprendre ce qui permettrait à tous les enfants d’apprendre, handicapés ou non. La liberté laissée aux enfants pour construire leurs apprentissages à leur rythme propre est une liberté encadrée. Elle est encadrée par l’environnement créé avec le matériel pédagogique et par l’enseignant capable de gérer un groupe d’enfants hétérogène tant en âge qu’en stade d’apprentissage. Il se trouve que cette façon intégrative d’envisager la pédagogie trouve des liens et résonances dans de très nombreuses études scientifiques. J’aurais envie de parler de l’expérience menée par Céline Alvarez en classe maternelle, qui bouscule les choses très brillamment à mon avis, mais cela mériterait un autre billet. Je voudrais faire remarquer au passage que Mme Montessori comme M. Freinet étaient d’abord des médecins, avec une culture scientifique, et sont ensuite devenus des pédagogues.

Il se trouve que maintenant les parents réagissent fortement, avec raison, à la pathologie scolaire.

Les parents se mettent à comprendre que l’école a renoncé, sans le dire, à l’école pour tous.

Ça les rend très très colère!!! La colère est rarement bonne conseillère et je constate une tendance à la méfiance, à la défiance vis à vis de l’école (Ex: grosse question tendance: est-ce mieux de faire l’école à la maison?) Moi, personnellement, je n’ai pas envie de renoncer à l’école pour tous. Je n’ai pas envie qu’il y ait des classes d’élites (avec allemand 1ère langue), des écoles d’élites (avec option internationale), des écoles communautaires (avec catéchèse obligatoire), des écoles ghettoïsées (avec bordel obligatoire). Je veux que l’école pour tous existe pour de vrai. Alors oui, je préfère appeler à faire rentrer les pédagogies dites alternatives dans le giron de l’éducation nationale.

Mais au fond, pour changer fondamentalement et durablement quelque chose dans le système éducatif, ce qui me semble être le levier le plus fondamental, et qui pourtant n’est jamais discuté, c’est bien le mode de recrutement et de formation des enseignants.

Les réformes se suivent, s’entassent, se digèrent plus ou moins bien, et elles soulèvent à chaque fois des rassemblements pour crier sa colère face à l’incompréhension des gens d’en haut qui ne comprennent rien à la réalité du terrain. A chaque nouvelle réforme, des mouvements de protestations indignées viennent nous avertir que les fondements de l’Ecole de la République sont en danger. Et l’on entend toujours le même refrain idéologique qui veut transformer les choses par décisions supérieures, en faisant comme si la culture, l’histoire pouvait se modifier d’un coup de réformette.

La pédagogie ne doit pas être idéologique, elle doit être efficace.

Aujourd’hui, les enseignants sont recrutés sur la base d’une licence dans une discipline donnée, puis sont envoyés au charbon après une petite année de formation (qu’ils ont failli perdre il y a peu de temps..). Sont-ils réellement bien formés à être des pédagogues? Si au moins on les obligeait à lire Montaigne je serais un peu rassurée! Reçoivent-ils eux même une formation théorique suffisante pour acquérir un savoir de base sur la manière dont un enfant apprend? Ils sont lâchés devant 30 élèves avec tout leur savoir acquis parfois de haute lutte pour obtenir le diplôme puis le concours consacrant leur labeur à devenir savant dans leur domaine, mais ils n’ont à peu près aucune idée de comment ils vont s’y prendre pour le mettre dans la tête de ces 30 élèves. Ils ont bien sûr des méthodes et techniques à appliquer, que j’apellerais méchamment “trucs et astuces”, et s’y accrochent bien consciencieusement parce qu’ils seront bien notés par l’inspecteur. Seulement, quand ils se rendent compte que la classe ne se fait pas avec des trucs et astuces, quand ils se rendent compte que la méthode X ne donne pas les mêmes résultats avec Charles-Henri, Kevin, Bousiane et le petit sourd en supplément, ils se disent: “Au secours! On n’est pas formés!”

Je rencontre beaucoup d’enseignants qui aiment tellement leur métier qu’ils font des choses qu’ils ne sont même pas obligés de faire: ils vont se former. Souvent, ils se forment seuls, en lisant des livres sur la pédagogie, sur les difficultés d’apprentissages…etc. Ils demandent et même parfois doivent se battre pour obtenir des stages de formation sur un sujet qui leur semble intéressant pour eux. Quand bien même 95% des enseignants auraient ce désir de formation en parallèle de leur pratique, je crois que l’école serait en voie de rémission mais elle serait encore bien malade. Je n’y vois que des mouvements hiératiques liés à la bonne volonté de certains, donnant l’impression aux élèves comme aux parents d’aller à l’école comme à la loterie:

-“T’as qui comme prof?”

-“Ah, j’ai Mme Bidule! je suis trop content! Elle est trop bien! On comprend tout avec elle!”

-“T’as trop de la chance!! Moi, j’ai M. Machin! Quand il fait son cours, on dirait qu’il parle tout seul, c’est ch***t!”

Je ne vois aucune volonté d’organisation d’un système centré sur l’idée de la pédagogie. Louis Arenilla, dans un dictionnaire de la pédagogie (1996), en donne une définition ouverte qui pose la pédagogie comme une science: “On peut alors définir la pédagogie comme [la] discipline qui cherche à répondre à la question: comment l’enseigné s’approprie le savoir?” ou “comment préparer les jeunes à s’approprier les savoirs et comment les adultes doivent-ils agir pour les y aider efficacement”. On ne change pas de culture de métier à coup de stages de 2 semaines, même 3 fois par an. Une science, ça s’étudie.

Si l’on veut vraiment que l’école soit celle de la “réussite pour tous”, quelque soit la nature des différences entre les élèves (handicap, milieu socio-culturel, bilinguisme, etc…), il faut des enseignants avec un bagage conséquent en sciences de l’éducation, capables de mettre en oeuvre une pédagogie différenciée acceptée comme progrès pour tous et non comme punition. Ils comprendraient alors que penser une pédagogie pour les enfants en difficultés, les enfants différents, ceux qui “ne rentrent pas dans le moule” (expression consacrée s’il en est), ce n’est pas du tout niveler par le bas, ce n’est pas du tout faire des traitements de faveurs aux uns au détriment des autres, c’est au contraire penser une pédagogie qui profite à tous et qui n’est pas si difficile à mettre en place.

J’ai vraiment la conviction que l’école doit oublier toute idéologie, toute mission morale, sociétale et économique, et se centrer sur une seule chose: la pédagogie. C’est seulement de cette manière que l’école retrouvera la confiance des élèves, des parents et de la société toute entière pour promouvoir l’égalité des chances (si chère à notre république…). A quand une grande manif des prof pour réclamer non pas plus de moyens mais une meilleure formation de base?

En attendant que ce jour arrive, je ne m’encarterai dans aucun parti politique, je continuerai mon petit bonhomme de chemin dans mon petit cabinet d’orthophonie, et je continuerai à aller dans les écoles pour faire comprendre ma vision de la pédagogie auprès des enseignants de mes patients.

La seule raison pour laquelle j’écris cet article ici, sur Medium, tient en l’espoir que ce que j’exprime peut dépasser un peu les limites de mon environnement réel. S’il peut inspirer d’autres personnes, s’il peut enclencher d’autres articles, alors je me dirais que le brassage des idées n’est pas une utopie…

Pour compléter ce billet, découvrez ou relisez:

--

--

Le Petit Buisson

Passionnée idéaliste en quête de sens et d’énergies. J’aime les renards et les petits princes #utopieréaliste (et j’adore mon métier d’orthophoniste!)