Réconciliation avec l’apprentissage ou raccrochage scolaire ?

cophetua
Le Petit Buisson
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3 min readOct 17, 2016

Nous avons remarqué que la plupart des jeunes qui sont déscolarisés avaient besoin d’en passer par un processus de résilience, d’apprentissage du vivre-ensemble et de respect des différences et besoins de chacun. Ils ont besoin d’un lieu où douceur, gentillesse et travail ne soient pas que des mots, mais des réalités, tangibles, dans les actes, à chaque seconde, et de façon sincère, au moins dans un premier temps.

Qui sont ces élèves qui ne vont plus à l’école? Certains ont des spécificités difficilement intégrables dans une classe de trente élèves (même si je connais des professeurs, des écoles notamment, qui relèvent admirablement bien ce genre de challenge) ; d’autres ont été victimes ou témoins d’accidents de la vie qui nécessitent une reconstruction ; chacun ses raisons …

Certains de ces élèves, qu’on appelle parfois des « décrocheurs » ne quittent plus leur chambre, ou leur maison, malgré toutes les tentatives de leurs parents …

Ils ont généralement besoin de thérapeutes, art-thérapeutes, coachs et sportifs, artistes, scientifiques, ingénieurs, précepteurs … : des adultes se mobilisant pour les aider à surmonter les obstacles, à se fixer des objectifs, et à découvrir la joie de la réussite. Ces adultes ne sont pas là pour leur dire quoi faire, dans leur vie future, ni pour leur imposer des activités ou apprentissages inutiles pour eux : dans un premier temps, ils les sauvent de leurs problèmes immédiats, parfois terriblement dangereux, puis, ensuite, ils définissent ensemble un programme adapté à chacun, selon ses aspirations et ses possibilités du moment. Sur le mode “préceptorat”, donc : apprentissage complètement individualisé.

Ce que je fais pour eux, c’est de créer des supports de cours, qui soient adaptés à leurs besoins et à leur potentiel … Je mobilise mes expériences, françaises, anglo-saxonnes, européennes, ma formation en sciences cognitives, en philosophie … et surtout … je pense à eux, en les créant.

« Qu’est-ce que R… comprendrait à cette phrase? ah non mais ça, L… si on lui écrit cela, elle va penser à autre chose. C’est beaucoup trop abstrait! A mon avis, cette image-là, ça évoquerait pas mal de choses pour eux … vu ce qu’ils regardent sur leur smartphone, à la pause … »

Lorsque je travaille, dans ma tête, je passe sans cesse d’eux à moi. Sur le papier, je leur pose des questions à chaque page. Parce que je crois que l’école doit être un espace dédié à la construction de leur vie future, doit les aider à pouvoir réaliser leur rêve, je fais appel à leurs souvenirs, leur imagination, leur personnalité, leur créativité … tout en leur transmettant les notions et outils « au programme » afin qu’ils puissent, à tout moment, rejoindre une structure publique, ou privée sous contrat, une université, une entreprise, réussir des concours …

Pourtant, le but ultime pour moi n’est pas de “raccrocher” ces élèves à tout prix, d’en faire des wagons d’une locomotive, ou de ramener la brebis égaré.

Je n’ai pas l’âme d’un pasteur, et mon envie est plutôt de leur faire comprendre qu’apprendre, progresser, c’est possible, et c’est dans leur intérêt, dans tous les domaines de la vie. Dès qu’ils comprennent cela, généralement, il y a un déclic … Des adultes qui ne sont pas contre eux, ou qui ne s’érigent pas en détenteurs absolus de la vérité, ou dépositaires de valeurs morales ou politiques à leur transmettre à tout prix, mais qui sont à leur service … Les enfants s’en rendent compte, et ils nous le rendent bien.

Merci à eux.

PS : La revue Zélie m’a interviewée sur le “raccrochage” scolaire : vous pouvez retrouver l’article en cliquant ici

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cophetua
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