ANTOINE BOURDELLE

MUSÉE

LE LAPION INTRÉPIDE
LES CHRONIQUES DU LAPION

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Antoine Bourdelle, c’est un peu le type qui a tout raté. Il est né vingt ans trop tard, juste au moment où Manet fait scandale avec son Déjeuner sur l’herbe. Quelques années plus tard, lorsque Monet ouvre la fenêtre de son hôtel du Havre et peint son éblouissement dans Impression au soleil levant, Antoine est encore un ado. Quand il débarque de Montauban pour faire ses études artistiques à Paris, la messe impressionniste est dite. Mais au moment où Picasso déboule à Montparnasse avec sa bande du bateau-lavoir en 1904, Bourdelle approche de la quarantaine. Il a déjà forgé son style, très marqué par l’Antique, et il s’apprête à être prof d’art plastique.

Il fait dans le monumental, un peu pompeux, des statues immenses et des profils grecs. Rien à voir avec les happenings punks de Montparnasse.
C’est un peu ce que raconte son atelier musée, un lieu au charme unique qui baigne dans une atmosphère surannée, comme une bulle de temps suspendue au coeur de la frénésie urbaine. L’endroit est habité par les fantômes du Paris de la 3ème République. Il est gardé par d’énormes sculptures qui regardent le temps passer de leur gros yeux vides. On entre dans un patio vaguement oriental où un Adam haut de 3 mètres nous accueille, les cuisses généreusement ouvertes sur sa virilité. Tournant pudiquement le regard, on tombe sur des chaises longues, inoccupées, ce qui, à Paris, relève de l’oxymore et on comprend qu’on va finalement passer plus de temps que prévu ici.

La balade se poursuit dans l’ancien atelier qui sent le vieux bois, la poussière et la cire d’abeille. Quelques oeuvres, juste ce qu’il faut pour se sentir tout petit aux pieds de ces dieux de pierre, mais surtout un concert de sensations. Parce que le jardin intérieur, luxuriant de verdure, minéral et moussu est, en plein été, d’une fraîcheur revigorante. En outre, c’est le seul musée que je connaisse où le visiteur est invité à toucher les oeuvres, à sentir la rugosité des plâtres, la chaleur du bronze ou l’onctuosité charnelle du marbre. L’atelier est resté tellement dans son jus qu’on s’attend à voir passer une cocotte de la Belle Epoque au bras d’un moustachu en haut-de-forme et redingote.

Métro Ligne 6 • Montparnasse Bienvenue
Sortie 2

Site Officiel du musée Bourdelle

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