Et si le Community Management était sous-exploité?

Esther Diane Naah
Les Mbindis Réflexions de Esta
5 min readJun 30, 2019
Les petites réflexions de Esta

Depuis quelques semaines déjà, je développe un intérêt de plus en plus grand pour les communautés de marque, très peu développées par les startups camerounaises. Cet attrait s’explique peut-être par l’environnement professionnel dans lequel j’évolue mais au-delà de cela, cette question est un vrai sujet d’actualité.

Je travaille actuellement sur des ateliers de formation au Community Management selon BIMSTR ([Bim-steur]). BIMSTR est un web-média musical camerounais qui s’est développé autour de la culture de la communauté, sur laquelle repose aujourd’hui son business model.

Dans le cadre de mes recherches, j’ai croisé plusieurs articles qui traitaient du métier de Community Manager et de son rôle dans l’entreprise. Il est décrit comme un animateur, un porte-parole, un modérateur des réseaux sociaux de l’entreprise. Je me suis alors demandée si le Community Management ne se limitait vraiment qu’à animer et modérer la page Facebook et Twitter de l’entreprise. C’est le point de départ de cette réflexion.

Avec les réseaux sociaux et la multiplication des points de contact, il est devenu facile pour les marques de toucher les consommateurs et de s’initier dans leur vie au quotidien. Cette surexposition a cependant un effet pervers, nous sommes de moins en moins réceptifs aux messages envoyés par les marques. Les professionnels parlent de l’ère de l’infobésité.

Les marques doivent donc surmonter un nouveau défi, celui de l’attention et penser à de nouvelles approches pour toucher et engager les consommateurs de manière plus authentique. La communauté apparaît alors comme l’une des réponses à cette problématique : s’appuyer sur ses clients/utilisateurs et les transformer en ambassadeurs de la marque pour acquérir de nouveaux clients/utilisateurs.

Dans l’écosystème Camerounais, en plus de la lutte pour l’attention, les porteurs de projets font face à des problématiques de ressources financières, humaines et matérielles. Cela limite les efforts déployés en terme de Marketing et de communication qui passent donc au second plan.

De plus, le Community Management se résume dans la pensée populaire à publier des posts sur Facebook, Twitter, Instagram et gagner plus de fans sur les plateformes.

Pourtant, nos startups gagneraient à impliquer davantage la Communauté dans leur stratégie de développement et leur culture d’entreprise. Je vous explique la raison de ce postulat.

Pour exister, les entreprises doivent aujourd’hui, être capables au-delà de vendre leurs produits ou leurs services, d’apporter de la valeur aux gens, d’améliorer leur quotidien. Démarrer son projet avec une communauté est un moyen efficace d’identifier des besoins et de répondre à des problématiques réelles rencontrées par cette dernière.

“Engineer the community, and the brand will be strong.”

Le porteur du projet doit donc se poser deux questions essentielles : “Pourquoi?” et “Pour qui?”. En réalité ce sont les deux premières questions que tout entrepreneur doit se poser avant même d’écrire sa première ligne de code, ou de proposer ses services.

Avec BIMSTR, chacune de nos prises de parole ou décisions doit apporter de la valeur aux membres de notre communauté, créer une expérience positive. Nous sommes un Web-média musical, notre travail est de diffuser et de promouvoir les œuvres camerounaises mais lorsque nous pensons contenu, notre objectif est d’abord d’informer, de divertir, de créer la conversation avec les Z’Experts (notre communauté), et surtout de leur offrir une plateforme sur laquelle ils peuvent exprimer librement leurs avis, ce sont eux les experts.

“When you provide value, it gives people the space to be proactive and offer it back.”

La réponse au “Pourquoi” est très importante car elle aide à identifier votre communauté et vous connecter à elle. Comment intervient le Community Manager ? En étant en immersion au quotidien parmi les membres, en les écoutant et en échangeant avec eux, le community manager permet à l’entreprise de connaitre les problématiques rencontrées par les membres de votre communauté, quels sont leurs besoins, quels sont les défis à relever et comment vous pouvez les aider à y faire face.

Résultat? Économie de temps et d’argent.

Démarrer son projet avec une communauté c’est s’appuyer sur des early adopters qui pourront vous aider grâce à des feedbacks et une relation personnalisée à améliorer le produit ou le service que vous souhaitez offrir. Un changement de fonctionnalité ou un pivot peut être opéré pour répondre à un besoin réel inspiré par et destiné à la communauté, ce qui rend votre offre plus pertinente. Énormément d’entrepreneurs échouent parce qu’ils commencent par commercialiser un produit, pour découvrir par la suite qu’il n’existe aucun marché pour ce dernier ou que leur produit ne fournit pas la solution qu’ils jugeaient nécessaire. Les ressources limitées ne leur permettent pas toujours d’effectuer le pivot ou le changement de stratégie nécessaire pour se relancer. La communauté n’arrive donc pas en aval du projet mais dès le départ.

“The best marketing strategy : Care!”

Tout ceci remet en question la place et la crédibilité accordée à ce rôle qu’est celui du Community Manager. Dans beaucoup de start-ups, l’entrepreneur lui-même “remplit” cette fonction, le confie à un ami ou à un stagiaire, ou encore à la personne la plus connectée sur internet de la boîte. Il s’agit pourtant d’une fonction hautement stratégique de l’entreprise, qui demande un certain nombre de compétences stratégiques, analytiques et créatives.

Le Community Management doit être alors vu comme une approche holistique qui permet à l’entreprise de connecter des personnes partageant des valeurs, des causes, des intérêts, une identité, qu’elles reconnaissent, nourrissent ou expriment à travers la marque, son message, ses produits.

Quand on pousse plus loin dans ce sens, on peut oser dire que le Community Management n’est pas la gestion des médias sociaux. La gestion des médias sociaux n’est qu’un des outils et des compétences d’un gestionnaire de communauté. Les médias sociaux ne sont qu’un canal de communication. Un groupe Facebook n’est pas une communauté, mais c’est l’expérience que les personnes se retrouvant dans ce groupe vivent, qui nourrit le sentiment d’appartenance à un ensemble, le socle de la communauté.

“Brands are the conversations and moments we have together, whether we are a community, a movement, or a crowd trying to create positive change.”

C’était une petite réflexion sur le métier de community manager et la place accordée à la fonction dans les startups locales et les entreprises au sens large. Un domaine clairement méconnu, mal compris et sous exploité dans notre environnement. La communauté doit être prise en compte dès le départ, dans l’élaboration de la stratégie de marque, et non après avoir déjà créé un produit, un site Web, vos médias sociaux et tous les autres canaux.

Nous pouvons prolonger la conversation en commentaire, sur linkedIn ou sur twitter : @esta__.

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Esther Diane Naah
Les Mbindis Réflexions de Esta

Creative Project Manager • Small Business Owner • Consultant • I talk about life, Branding and Entertainment.