Covid-19 : Mesures intéressant la vie des entreprises

Greg Loustalet
Loustalet-avocats
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23 min readApr 3, 2020

Les mesures de confinement impliquent-elles un arrêt de l’activité des entreprises ?

Ces mesures de confinement ne doivent pas se traduire par un arrêt de l’activité économique du pays, mais par un aménagement de celle-ci pour faire face à la crise sanitaire.

Principe : continuité de l’activité, en appliquant les mesures adaptées, notamment pour les secteurs professionnels qui ne génèrent pas habituellement des rassemblements de clientèle.

Mais il est nécessaire de prendre des mesures adaptées :

  1. mettre en télétravail dès que c’est possible,
  2. offrir des mesures de protection pour les salariés qui doivent travailler sur place,
  3. à défaut, mettre en chômage partiel.

Seules sont arrêtées certaines activités en fonction de leurs spécificités jusqu’au 15 avril 2020 (établissements recevant du public : bars, cafés, restaurants, cinémas, centres commerciaux, etc.), c’est-à-dire :

  1. Impliquant des regroupements de population ET
  2. ne présentant pas un caractère essentiel à la vie de la nation (contrairement aux commerces alimentaires, pharmacies, banques, stations-services ou de distribution de la presse)

Les restaurants peuvent continuer leur activité de vente à emporter.

En cas de baisse d’activité, il est possible de recourir au chômage partiel ou bien d’utiliser les congés, RTT, CET des salariés :

  1. Chômage partiel : possible en cas de fermeture de l’entreprise, baisse d’activité, impossibilité de mettre en place des mesures de prévention. Le ministère du Travail a annoncé que les procédures sont allégées et que le contrôle se ferait a posteriori. Quoi ? Objectif de protéger l’emploi et le paiement du salarié qui reste à son domicile par l’employeur. Qui ? Salariés des secteurs privés. Comment ? Diminution de la rémunération de 16 %, ils conservent donc 84 % de leur salaire net. Exception : les salaires aux SMIC sont maintenus à 100 %. Remboursement intégral par l’État pour les salaires jusqu’à 6 927 euros bruts mensuels, c’est à dire 4,5 fois le SMIC. L’employeur doit faire une demande auprès de la Direcctee de sa région. Le ministère du Travail donne 30 jours aux entreprises pour déclarer leur activité partielle, avec effet rétroactif. + d’informations
  2. Congés, RTT et CET : L’employeur peut imposer aux salariés de prendre 6 jours de congés, s’ils disposent d’un accord d’entreprise ou d’un accord de branche en ce sens. Pour les RTT, l’employeur peut imposer la prise de RTT ou l’utilisation CET dans la limite de 10 jours.

Le recours aux dispositifs d’aides nécessite qu’elles fassent attention en amont de bien respecter les conditions. Les demandes seront accueillies sans contrôle a priori. Les contrôles viendront ensuite.

En tout état de cause, les entrepreneurs restent libres d’organiser le fonctionnement de leur entreprise en fonction de l’évolution de leur activité en cette période d’État d’urgence sanitaire et de recourir ou non aux aides mises en place par l’État.

Soutien financier aux entreprises

Le Fonds de solidarité

Objet : Versement d’aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation. (cf. Art. 1er, Ordonnance n° 2020–317)

Financement : par l’État et, sur la base du volontariat, par les régions, les collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution, la Nouvelle-Calédonie et toute autre collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre. (cf. Art. 2, Ordonnance n° 2020–317)

Durée : trois mois prolongeables par décret (dans une limite de 3 mois). (cf. Art. 1er, Ordonnance n° 2020–317).

Qui ? Micro entrepreneurs/indépendants/TPE/profession libérale modeste ayant un chiffre d’affaires inférieur à 1 million d’euros qui :

– Subissent une fermeture administrative

– Connaissent une perte de chiffre d’affaires de plus de 50 % au mois de mars 2020 par rapport au mois de mars 2019. « Chacun devra nous dire avec une déclaration qui fera foi qu’il a perdu 70 % de son CA d’une année sur l’autre », précise le ministre de l’Économie

https://www.netpme.fr/actualite/coronavirus-fond-de-solidarite-les-independants-ont-leur-filet-de-securite/

Les entrepreneurs et autoentrepreneurs ayant démarré leur activité après mars 2019 sont également concernés.

Quoi ? Création d’un fonds de solidarité d’un milliard d’euros minimum ainsi qu’une première liquidité directe et immédiate annoncée par Bruno Lemaire, ministre de l’Économie le 17/03/2020.

Bénéfice de l’aide de 1 500 €, tarif de base garanti sous forme forfaitaire. Le fonds de solidarité sera accessible sur la base du revenu mensuel qui a été perçu au cours des derniers mois à partir de la création. Pour les situations les plus difficiles, un soutien complémentaire pourra être octroyé pour éviter la faillite au cas par cas. L’instruction des dossiers associera les services des Régions et de l’État au niveau régional.

o Attention, les micro-entrepreneurs qui bénéficient du fond de solidarité ne peuvent pas bénéficier de l’arrêt de travail simplifié.

Quand ? À partir du 31 mars

Comment ? Toutes les entreprises concernées pourront faire une simple déclaration sur le site des impôts – impots.gouv.fr – pour recevoir le versement automatique de 1 500 €.

Cette somme sera défiscalisée.

Dans le pipe : Le Ministère de l’économie améliore les aides aux entreprises apporté par le fonds de solidarité. Il est notamment prévu que l’aide en cas de très grande difficulté pourra passer de 2.000 à 5.000 euros pour intégrer les loyers.

Les garanties BPI

Garanties de prêt par Bpifrance

Quoi ? Fond de 300 milliards d’euros débloqués pour garantir les prêts bancaires des entreprises :

  • La garantie de l’État sera accordée pour les nouveaux prêts apportés par les banques et le réseau bancaire. Le prêt pourra représenter jusqu’à 3 mois de chiffre d’affaires 2019, ou deux années de masse salariale pour les entreprises innovantes ou créées depuis le 1er janvier 2019. Aucun remboursement ne sera exigé la première année ; l’entreprise pourra choisir d’amortir le prêt sur une durée maximale de cinq ans.
  • Les banques françaises se sont engagées à reporter jusqu’à 6 mois le remboursement de crédits des entreprises, sans frais.

Qui ? Les entreprises de toute taille, quelle que soit la forme juridique de l’entreprise, à l’exception des sociétés civiles immobilières, des établissements de crédit et des sociétés de financement, pourront demander à leur banque habituelle un prêt garanti par l’État pour soutenir leur trésorerie.

Quand ? Jusqu’au 31 décembre prochain.

Comment ? Les banques examinent les demandes adressées. Pour plus d’information sur la marche à suivre voir point 5 (Mobilisation de l’État à hauteur de 300 milliards d’euros pour garantir des lignes de trésorerie bancaires dont les entreprises pourraient avoir besoin à cause de l’épidémie

+ d’informations

Les reports d’échéances sociales et fiscales et remboursement accélérés de crédits d’impôt

1 Charges sociales et fiscales

Les charges sociales et fiscales, s’agissant des impôts directs, feront l’objet de reports dans le cadre d’un examen individualisé des demandes : demander au service des impôts des entreprises le report sans pénalité du règlement de leurs prochaines échéances d’impôts directs [acompte d’impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires]. En effet, Gérald Darmanin a rappelé que les cotisations et charges dues peuvent bénéficier d’un échéancier de cotisation auprès de l’URSAFF, tous comme les impôts directs [à l’exclusion de la TVA]. En effet, la TVA est toujours due, car nécessaire à l’action de l’État. Les créances de TVA seront néanmoins remboursées plus rapidement, a précisé le ministre.

Si elles ont déjà réglé leurs échéances de mars, elles ont peut-être encore la possibilité de s’opposer au prélèvement SEPA auprès de leur banque en ligne. Sinon, elles ont également la possibilité d’en demander le remboursement auprès de leur service des impôts des entreprises, une fois le prélèvement effectif.

Comment bénéficier des délais de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales [Urssaf, impôts directs] ?

  • Les employeurs dont la date d’échéance Urssaf intervient le 15 du mois [entreprises de moins de 50 salariés] ont pu reporter tout ou partie du paiement de leurs cotisations salariales et patronales pour l’échéance du 15 mars 2020.
  • Les employeurs dont la date d’échéance Urssaf intervient le 5 du mois [entreprises de plus de 50 salariés] peuvent reporter tout ou partie du paiement de leurs cotisations salariales et patronales pour l’échéance du 5 avril 2020. La date de paiement de ces cotisations pourra être reportée jusqu’à 3 mois : des informations seront communiquées ultérieurement sur la suite. Aucune pénalité ne sera appliquée.

o Comment ? Les employeurs peuvent moduler leur paiement en fonction de leurs besoins : montant à 0, ou montant correspondant à une partie des cotisations.

o Quand ? Il est impératif de déclarer et de transmettre la déclaration sociale nominative [DSN] avant lundi 6 avril 12 h.

o Si l’employeur ne souhaite pas opter pour un report de l’ensemble des cotisations et préfère régler les cotisations salariales, il peut échelonner le règlement des cotisations patronales, comme habituellement.

o Un report ou un accord de délai est également possible pour les cotisations de retraite complémentaire. Les employeurs sont invités à se rapprocher de leur institution de retraite complémentaire.

Les travailleurs indépendants = TNS agricole et non agricole :

Possible de moduler à tout moment le taux et les acomptes de prélèvement à la source. Il est aussi possible de reporter le paiement de leurs acomptes de prélèvement à la source sur leurs revenus professionnels d’un mois sur l’autre jusqu’à trois fois si leurs acomptes sont mensuels, ou d’un trimestre sur l’autre si leurs acomptes sont trimestriels. Toutes ces démarches sont accessibles via leur espace particulier, rubrique « Gérer mon prélèvement à la source » : toute intervention avant le 22 du mois sera prise en compte pour le mois suivant.

  • Report de l’échéance Urssaf du 20 mars :

– Quoi ? L’Urssaf a décidé pour les travailleurs indépendants [hors micro-entrepreneurs] : l’échéance mensuelle du 20 mars et celle du 5 avril ne seront pas prélevées. Dans l’attente de mesures à venir, le montant de cette échéance sera lissé sur les échéances ultérieures [avril à décembre].

– Comment ? Le report du paiement des dettes sociales et fiscales est de droit pour toutes les entreprises, sans autorisation préalable, mais pas de manière automatique. Les indépendants doivent solliciter l’Urssaf pour obtenir l’octroi de délais de paiement [sans majoration ni pénalité], l’ajustement de leur échéancier de cotisations [pour tenir compte d’une baisse de revenu], la prise en charge partielle ou totale de leurs cotisations ou encore l’attribution d’une aide financière exceptionnelle.

plus d’informations : https://www.urssaf.fr/portail/home/actualites/foire-aux-questions.html

2 Accord de prise en charge et d’aide financière exceptionnelle

– Obtenir la prise en charge partielle ou totale de leurs cotisations avec l’aide aux cotisants en difficulté [ACED] prévue « en cas de difficultés particulières de trésorerie liées à votre santé, à la conjoncture économique ou à un sinistre ».

– Obtenir l’aide financière exceptionnelle qui a pour objet « de soutenir le travailleur indépendant confronté à une difficulté exceptionnelle et ponctuelle susceptible de menacer la pérennité de son activité ».

Ces aides pour les indépendants actifs ou retraités sont gérées par les Instances régionales de la protection sociale des travailleurs indépendants [IRPSTI]. Pour les obtenir, il faut monter un dossier complet [pièces justificatives, mails d’annulation clients, bons de commande, etc.]. Les demandes sont étudiées au cas par cas.

3 Prélèvement à la source : modulation du taux et report des acomptes

Quoi ? En matière de prélèvement à la source, les indépendants peuvent moduler le taux de prélèvement et reporter leurs acomptes mensuels d’un mois sur l’autre jusqu’à 3 fois et leur acompte trimestriel d’un trimestre sur l’autre.

Quand ? Ils ont jusqu’au dimanche 22 mars pour se connecter à leur espace particulier sur impots.gouv.fr, rubrique « Gérer mon prélèvement à la source ». « Toute intervention avant le 22 du mois sera prise en compte pour le mois suivant », précise la DGFiP.

– Suspension de la CFE et de la taxe foncière : en adressant à leur service des impôts des entreprises [SIE] ce formulaire ou en contactant leur centre prélèvement service [CPS]. Le montant restant sera prélevé sans solde et sans pénalité.

4 TVA

Les délais de remboursement sont accélérés. L’État s’engage à rembourser la TVA en 1 mois pour 80 % des cas et les crédits de CICE en 3 mois pour 70 % des entreprises.

ATTENTION : aucun report de déclaration et paiement de la TVA n’est admis.

5 Contrats de mensualisation

Pour le paiement du CFE ou de la taxe foncière, il est possible de le suspendre dans leur espace professionnel ou en contactant le Centre prélèvement service : le montant restant sera prélevé au solde, sans pénalité.

Report des dates de dépôt des déclarations fiscales

Bercy a décalé les dates limites de déclarations :

  • Dépôt de la liasse fiscale : 31 mai 2020 (pour les entreprises clôturant leur exercice au 31 décembre 2019)
  • Dépôt des déclarations d’impôt sur le revenu :

Paiement des fournisseurs et des loyers commerciaux du 2e trimestre 2020 ?

Protection des TPE & PME : suspension des factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que des loyers.

Qui ? Les plus petites entreprises éligibles au fonds de solidarité financé par l’État et les Régions. « Les critères d’éligibilité des entreprises à ce fonds sont définis par décret, lesquels déterminent notamment les seuils d’effectifs et de chiffre d’affaires ainsi que le seuil de perte de chiffre d’affaires constatée du fait de la crise sanitaire » [cf. Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020–316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie de covid-19]. Plus précisément, pour les TPE & PME :

  1. Dont l’activité a été interrompue par arrêté
  2. Bénéficiant de l’aide financière accordée par le fonds de solidarité

Comment ? L’ordonnance n° 2020–316 du 25 mars 2020 prévoit possibilité pour ces entreprises de demander l’échelonnement du paiement des factures correspondantes, exigibles au cours de la même période, sans aucune pénalité, auprès des fournisseurs et ce, réparti également sur les échéances de paiement des factures postérieures sur six mois, à partir du mois suivant la date de fin de l’état d’urgence sanitaire [Art. 3 de l’ordonnance n° 2020–316].

Les loyers et charges quant à eux seront appelés mensuellement et non plus trimestriellement.

Le recouvrement des loyers et charges est suspendu à partir du 1er avril 2020, et pour les périodes postérieures d’arrêt d’activité imposées par l’arrêté.

Lorsque l’activité reprendra, ces loyers et charges feront l’objet de différés de paiement ou d’étalements sans pénalité ni intérêts de retard et adaptés à la situation des entreprises en question.

Par ailleurs, l’application de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions est interdit en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents aux locaux professionnels et commerciaux [Art. 4 de l’ordonnance n° 2020–316].

Quand ? Mesures prises si l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Pour les autres entreprises : si leur activité, sans être interrompue, a été fortement dégradée par la crise, leur situation sera étudiée au cas par cas, avec bienveillance en fonction de leurs réalités économiques.

Peut-on invoquer la force majeure ?

Bruno Lemaire considère que la force majeure :

a) Limitée aux « marchés publics de l’État ».

b) Toutefois, la force majeure en matière contractuelle de l’art. 1218 c civ peut être caractérisée si trois conditions sont remplies :

  1. Extériorité : épidémie — débiteur n’en est pas l’origine

2. Imprévisibilité : si conclusion du contrat antérieurement à la survenance de l’épidémie emportant mesures de confinement.

3. Irrésistibilité : « dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées » et qui « empêche l’exécution de son obligation par le débiteur »

Exemples :

o Un arrêté a interdit l’ouverture d’un local commercial exploité en vertu d’un bail en raison de sa destination = pas d’exécution de l’obligation de délivrance qui a pour effet de suspendre l’exécution du contrat entre les parties.

De plus : en cas de privation totale de jouissance non imputable au preneur => possible exercice de l’art. 1220 c civ = permet au preneur de ne pas payer le bail à condition que (1) cette notification soit réalisée dans les meilleurs délais (2) lorsqu’il est manifeste que le bailleur ne s’exécutera pas à échéance et (3) que cette inexécution est suffisamment grave. En pratique, c’est le cas des entreprises dont l’activité économique est consubstantiellement attachée à l’exploitation de leur local commercial. Après notification il faudra se conformer au processus décrit dans le bail en cas de force majeure. Cette hypothèse de cessation des paiements des loyers n’emporte pas de risques.

o Baisse du chiffre d’affaires due à la survenance de l’épidémie rend impossible pour le preneur à bail commercial d’assurer le paiement des loyers. Cette situation entraine des risques si le bailleur exécute son obligation de délivrance, et que le preneur fait seulement face à des difficultés. Il est laissé au juge une large marge d’interprétation qui ne tend pas systématiquement vers la caractérisation de la FM : (pas de caractérisation de FM : Cass. com. 16 septembre 2014, n° 13–20.306//Caractérisation de FM CA, Bourges 21 mai 2010).

Comment procéder à la suspension ? Notifier au bailleur la suspension des paiements sur le fondement de la FL et dans le respect du processus décrit.

Preuve : rapportée par le preneur (documentation sérieuse sur le plan comptable et financier, l’impossibilité de régler le loyer pendant la période de confinement)

Coronavirus : traitement des entreprises en difficultés et procédure amiable/collective

Mise en place d’un numéro vert gratuit : 0 800 94 25 64

C’est une initiative du CNAJMJ et du Ministère de l’Économie et des Finances = Par les administrateurs et les mandataires judiciaires avec pour objectif de conseiller les dirigeants d’entreprises en difficultés pour renseigner sur les mesures de soutiens annoncées par Bercy (report des charges sociales et des créances fiscales, rééchelonnement des crédits bancaires, accès aux aides de Bpifrance).

À partir du lundi 23 mars 2020

Contentieux général

Fermeture des tribunaux de commerce et circonscription de l’activité judiciaire aux référés et aux autres mesures d’urgence, notamment l’examen des mesures privatives de liberté qui ne bénéficient pas de prorogation des délais échus (cf. Art 2, chap. 1er, Titre 1er, Ordonnance n° 2020–304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété).

Contentieux des entreprises en difficultés

Quelles conséquences pour les entreprises en difficultés en procédure amiable ? La Conférence générale des juges consulaires de France prévoit qu’une signature numérique devrait être rendue possible dans le cas des ordonnances de mandat ad hoc et conciliation rendues par le juge.

Ne relèvent pas davantage des procédures urgentes le traitement des requêtes aux fins de désignation d’un conciliateur.

Quelles conséquences pour les entreprises en difficultés envisageant des procédures amiables ? Réduction prévue des procédures collectives grâce à la souplesse annoncée par l’État sur les paiements à l’Urssaf et au fisc. Entraine une certaine clémence de la part des établissements de crédit.

L’application des dispositions de l’article L. 351–1 du code rural et de la pêche maritime peut apparaître utile également pour ne pas laisser isolés des exploitants en situation de détresse.

o Conciliation : En effet, la procédure de conciliation, organisée par les articles L. 611–4 à L. 611–6 du code de commerce imposent le respect de délais non compatibles avec la situation d’exception actuelle. Le cas échéant, il peut être fait application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 611–6 relatives à la prorogation.

o Mandat ad hoc : En revanche, la désignation d’un mandataire ad hoc, prévue par l’article L. 611–3 du code de commerce, peut être mise en œuvre dans le respect des mesures de protection sanitaire et peut être de nature à apporter un soutien aux entreprises qui n’ont pas cessé leur activité. Les dispositions de l’arrêté du 9 février 2016 portant application des dispositions du titre XXI du livre Ier du code de procédure civile aux greffiers des tribunaux de commerce le confirment.

Quelles conséquences pour les entreprises en difficultés en procédure collective ? Il n’y a aucune prise de décision claire à leur égard, mais le président de la Conférence générale des juges consulaires de France est en faveur du gel des procédures.

Toutefois, une seule audience par semaine sera maintenue pour traiter les sauvegardes, redressements judiciaires et les liquidations, afin que les salariés non payés puissent être pris en charge par l’AGS (le régime de garantie des salaires) (voir 3)). En effet, il convient que le tribunal puisse statuer sur des plans de cession, en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire, lorsque ceux-ci peuvent avoir une incidence significative sur l’emploi. Comme pour les procédures de référé, il appartient au président du tribunal d’identifier les procédures qui justifient une décision rapide, après s’être rapprochées notamment du ou des mandataires de justice désignés dans ces procédures. Toutes les mesures devront être naturellement prises pour prévenir tout risque de contamination, et une application stricte des règles de procédure doit conduire à limiter le nombre de personnes présentes lors de l’audience.

ATTENTION : Les mêmes règles peuvent s’appliquer à l’homologation des accords de conciliation prévue par l’article L. 611–8 du code de commerce.

Quelles conséquences pour les entreprises en difficultés envisageant une procédure collective ?

Dans ce contexte et ces conditions, l’ouverture de nouvelles procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ne paraît pas, en principe, relever de l’urgence et se révélerait inutile et inefficace compte tenu des moyens disponibles limités pour mettre en œuvre ces procédures. Il convient en effet de tenir compte de la capacité à mettre en œuvre les décisions des tribunaux de commerce statuant en matière de difficulté des entreprises, non seulement par les greffes des tribunaux, mais aussi les études des administrateurs judiciaires ou mandataires judiciaires.

Mesures spécifiquement prises pour les entreprises en difficultés :

Mesures prises pour faire bénéficier aux entreprises en difficultés du remboursement accéléré des crédits d’impôt sur les sociétés et de crédit de TVA :

Procédure accélérée de remboursement des créances d’impôt sur les sociétés restituables en 2020 : remboursement du solde de la créance disponible, après imputation le cas échéant sur leur impôt sur les sociétés dû au titre de l’exercice 2019, sans attendre le dépôt de la déclaration de résultat (« liasse fiscale »).

Pour obtenir un remboursement de crédit de TVA, l’entreprise doit effectuer sa demande par voie dématérialisée, directement depuis son espace professionnel ou par l’intermédiaire d’un partenaire agréé (partenaire EDI).

Mesures prises pour faire face à des difficultés financières : CCSF

Quoi ? La Commission des chefs de services financiers (CCSF) peut accorder aux entreprises qui rencontrent des difficultés financières des délais de paiement pour s’acquitter de leurs dettes fiscales et sociales (part patronale, les impôts, les taxes, les cotisations sociales aux régimes obligatoires de base exigibles — à l’exclusion des parts salariales et du prélèvement à la source) en toute confidentialité.

Par qui ? Peuvent saisir la CCSF : (1) le débiteur lui-même, qui peut être un commerçant, un artisan, un agriculteur, une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante et une personne morale de droit privé (sociétés, associations) ou (2) le mandataire ad hoc.

Comment ? 2 conditions de recevabilités de la saisine : (1) être à jour du dépôt de ses déclarations fiscales et sociales et du paiement des cotisations et contributions salariales ainsi que du prélèvement à la source et (2) ne pas avoir été condamné pour travail dissimulé.

Pour plus d’information ? https://www.impots.gouv.fr/portail/professionnel/ccsf-et-codeficiri

5) Solidarité entreprises COVID-19 : AGS

AGS : garantir la continuité de sa mission sociale aux services des entreprises en difficulté et de leurs salariés et en assurant la solidarité interentreprises. Elle prend des mesures exceptionnelles pour soutenir les entreprises en difficulté à partir du 23 mars 2020. Décisions applicables rétroactivement à la date du 16 mars 2020 et ce jusqu’au 30 juin 2020.

Objectifs : Faciliter l’adoption de plans de redressement ou de sauvegarde d’entreprises par l’octroi de délais de paiement exceptionnels ou du report des mensualités à échoir au cours de la période.

Procéder au paiement de créances des salariés des entreprises en difficulté sur simple demande et sous la responsabilité des mandataires judiciaires, sans vérification a priori des exigences légales.

COVID-19, le Régime de Garantie des Salaires (AGS) mobilisés

Modalités exceptionnelles de remboursement des créances dues par ces entreprises lorsque leurs difficultés économiques seraient générées ou accélérées par la propagation de la crise.

Octroi de délais et de remises des majorations de retard sur leurs cotisations dues au Régime AGS.

Le Régime AGS et les équipes de la Délégation Unédic AGS resteront mobilisés pour garantir le paiement des avances salariales aux salariés d’entreprises en difficulté impactées, dans un délai maximum de 72 heures, à compter de la réception des relevés de créances salariales établis par les mandataires judiciaires.

Formalités RCS/Enregistrement/Assemblées générales

Fonctionnement des Greffes

Il a été rappelé par les greffiers des tribunaux de commerce que l’ensemble de leurs démarches et formalités d’entreprise peuvent être effectuées en ligne.

Fonctionnement des services de l’enregistrement

Les services de l’enregistrement restent ouverts pendant la période d’état d’urgence sanitaire. Ils peuvent recevoir les documents à enregistrer, mais aucune information n’est donnée sur le délai de retour.

Tenues des assemblées générales pour les personnes morales

Possibilité de tenir une assemblée à huis clos, c’est-à-dire sans que les associés ou actionnaires ne soient présent physiquement. Il est possible d’organiser une conférence téléphonique ou audiovisuelle.

Il est égalemnet possible de reporter la tenue de l’assemblée générale annuelle au plus tard le 30/09/2020.

+ d’informations sur les modalités

Adaptation des règles applicables aux administrations et juridictions

Ordonnance n° 2020–306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période

– Détermination des délais (art. 1er)

Sont concernés par les dispositions de l’ordonnance les délais qui arrivent à échéance entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré, et le cas échéant prorogé, sur le fondement des articles L. 3131–20 à L. 3131–22 du code de la santé publique.

– Mécanisme de report de terme et d’échéance (art. 2, 3, 4 & 5, Titre 1er)

Actes prescrits par la loi ou le règlement (Art. 2) : Pour les actes, actions en justice, recours, formalités, inscriptions, déclarations, notifications, ou publications, à peine de nullité, sanction, y compris désistement d’office, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui devaient être réalisés dans la période mentionnée à l’article 1er, les délais sont prorogés à compter de la fin de cette période, pour la durée qui était légalement impartie, mais dans la limite de deux mois.

Actes prévus par des stipulations contractuelles (Art. 2) : Le paiement des obligations contractuelles doit toujours avoir lieu à la date prévue par le contrat. Sauf réunion des conditions pour la suspension de la prescription pour impossibilité d’agir en application de l’article 2224 du code civil, ou encore pour faire jouer la force majeure prévue par l’article 1218 du code civil

Sont exclus :

· Les délais dont le terme est échu avant le 12 mars 2020 (pas de report)

· Les délais dont le terme est fixé au-delà du mois suivant la date de la cessation de l’état d’urgence sanitaire (ni suspendus ni prorogés).

Mesures administratives ou juridictionnelles conservatoires, d’enquête, d’instruction, de conciliation ou de médiation (Art. 3) : si leur terme vient à échéance au cours de la période visée (cf. art. 1er, Titre I) sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivants la fin de cette période, sauf modification ou établissement d’un terme par le juge ou l’autorité compétente intervenus avant le 12 mars 2020 (Art. 3, 1°, Titre I).

Astreintes, clauses pénales, clauses résolutoires, les clauses prévoyant une déchéance (Art. 4, Titre I) : lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé,

1) Si ce délai a expiré pendant la période définie au I de l’article 1er (pour les astreintes et clauses pénales) : réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet. Elles prennent cours et ces clauses produisent leurs effets à compter de l’expiration d’un délai d’un mois après la fin de cette période si le débiteur n’a pas exécuté son obligation avant ce terme.

2) Si ce délai a pris effet avant le 12 mars 2020 (pour les autres mesures) : le cours des astreintes et l’application des clauses pénales sont suspendus.

Convention : prolongation de deux mois après la fin de la période définie au I de l’article 1er des délais pour la résilier ou la dénoncer lorsque sa résiliation ou l’opposition à son renouvellement devait avoir lieu dans une période ou un délai qui expire durant la période définie au I de l’article 1er.

– Dispositions particulières aux délais et procédures en matière administrative afin de tenir compte de certaines spécificités de l’action administrative (Titre II).

Suspension des délais imposés par l’administration conformément à la loi et au règlement : pour la réalisation des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions de toute nature à compter du 12 mars 2020 jusqu’à la fin du mois suivant la période d’état d’urgence sanitaire, sauf lorsqu’ils résultent d’une décision de justice. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant cette même période est reporté jusqu’à l’achèvement de celle-ci (Art. 8, Titre II).

Spécificités en matière de contrôle fiscal :

Suspension des délais de prescription du droit de reprise qui arrivent à terme le 31 décembre 2020 pour une durée égale à celle de la période comprise entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire (Art. 10, I, 1°, Titre II).

Suspension pendant la même période, tant pour le contribuable que pour les services de l’administration fiscale, de l’ensemble des délais prévus dans le cadre de la conduite des procédures de contrôle et de recherche en matière fiscale, sans qu’une décision en ce sens de l’autorité administrative ne soit nécessaire. La suspension des délais concerne également ceux applicables en matière de rescrit. Des dispositions identiques sont prises pour les délais de reprise, de contrôle et de rescrit prévus par le code des douanes. (Art. 10, I, 2°, Titre II)

Suspension des délais prévus à l’article 32 de la loi n° 2018–727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, relative à l’expérimentation de la limitation de la durée des contrôles administratifs sur certaines entreprises dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes. (Art. 10, I, 3°, Titre II)

Report des formalités déclaratives prévu par l’article 2 à l’exclusion des déclarations servant à l’imposition et à l’assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts droits et taxes. Il s’agit ici de préserver le recouvrement des recettes publiques nécessaires au fonctionnement des services publics et au soutien de l’économie (Art. 10, II, Titre II).

Ordonnance n° 2020–305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif

– Interruptions de délais pendant la période d’urgence sanitaire (à compter du 12 mars 2020) qui trouvent à s’appliquer devant les juridictions de l’ordre administratif, sauf dérogations en matière de droit des étrangers, de droit électoral et d’aide juridictionnelle (Art.15, titre II).

– Les clôtures d’instruction dont le terme vient à échéance du 12 mars 2020 jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de ladite période, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge (Art. 16, Titre II).

Durant cette même période, le point de départ des délais impartis au juge pour statuer est reporté au premier jour du deuxième mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire, sauf dérogations en matière de droit des étrangers et de droit électoral (article 17, Titre II).

Grégoire Loustalet & Paloma Cadon

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Sources :

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