Mission Biosphère — Semaine 3

Le 20 février 2018, Nomade des Mers a lancé la phase 2 de son exploration low-tech : La Mission Biosphère, ou 4 mois en autonomie grâce aux low-tech. Chaque semaine, Corentin nous partage son journal de bord.

Gold of Bengal
Low-tech Lab Stories
20 min readApr 24, 2018

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Corentin lit en pédalant sur le générateur — Février 2018 — © Gold of Bengal

Jour 11

La semaine #3 a commencé par une visite de l’aquaculteur voisin.
Cette fois, j’ai refusé sa nourriture avec des gestes, lui montrant que j’ai ce qu’il faut. Cette fois, je crois que l’information est bien passée.

Pendant ce temps, un orage imposant au loin menace la Biosphère. Je ne me sens pas prêt à l’arrivée d’un coup de vent violent... J’ai replié les bâches des patates (le nouveau système me plait), j’ai rangé tout ce qui pouvait s’envoler, j’ai couvert tout ce qui craignait la pluie.

Et … l’orage n’est pas venu.
Mais je maitrise mieux la procédure d’urgence.

Parmi les patates issues du stock, certaines sont infestées par de petits vers blancs. Elles font pourrir les patates en creusant des galeries. Cela réduit ma dose quotidienne (je donne aux poules et aux grillons les parties infestées) et menace mon stock. Je me demande à quelle vitesse ces vers vont se propager.

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Toujours le stress de l’eau et des patates. Et maintenant celui des vers…

Jour 12

Les chenilles ont maintenant envahi les plans de menthe et mangent les feuilles de patates à grande vitesse. À chaque fois que je passe devant, j’en repère des nouvelles. Je les écrase une par une entre le pouce et l’index. Je me demande comment elles sont arrivées jusqu’ici, comment elles se reproduisent si vite. Et surtout, comment en venir à bout…

J’utilise 3 panneaux solaires pour les bulleurs, 3 autres pour charger la batterie qui charge l’ordinateur, le téléphone, les caméras et ma lampe. J’en ai 3 inutilisées en stock. Je réfléchis à comment les utiliser. Soit pour remplacer la batterie pour le matériel électronique qui peine à charger mon ordinateur, soit pour le futur biofiltre des patates.

Je n’ai pas pu respecter mon idée de consacrer le dimanche à l’exploration des alentours. J’ai quand même pu faire une sortie courte d’une heure et demi en fin de journée. Ça m’a fait du bien. Je me rends compte que je n’étais pas sorti depuis 12 jours !

Je vis sur une surface de 120 m2, quasiment occupée pour moitié, soit 70m2 d’espace libre. 90% de mon temps, je suis dans le camp. À peine 20m2… Ce n’est pas comme sur le Nomade des Mers : ici, le décor est splendide mais ne change pas. Il faut que je prévois des excursions plus fréquentes sur l’île pour me dégournir les jambes.

J’ai repéré une plage où je pourrais courir un peu.

Vue de la Biosphère — Février 2018 — ©Gold of Bengal

État d’esprit < 0

J’ai du mal à lire longtemps. Au choix :

  • mon livre n’est pas assez prenant
  • j’ai des difficultés à me concentrer
  • le camp est trop inconfortable pour lire avec plaisir

Les trois peut-être …!

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Le fait de sortir de la plateforme m’a fait prendre du recul sur la crise des patates. Il ne faut pas que je délaisse le reste, car les patates sont certes importantes pour atteindre un bon niveau d’autonomie, mais il y a beaucoup d’autres low-tech à tester. Les patates me prennent du temps et 30% de la réserve d’eau, pour un résultat très médiocre.

Jour 13

Journée dédiée à la fabrication d’un grand dessalinisateur. J’ai commencé par inspecter l’état des 2 dessalinisateurs fabriqués avant l’arrivée sur la Biosphère. Le petit a des fuites au niveau de la sortie d’eau douce et sa bâche est déformée. Idem pour le grand. J’ai donc décidé d’en fabriquer un nouveau, plus grand, avec les optimisations suivantes :

  • Utilisation de la bâche de couverture de serre. Elle coute moins chère que celle utilisée pour les 2 autres dessalinisateur. Il est aussi probable qu’elle se déforme moins. J’en ai un stock important.
  • Renforts de structure plus nombreux. Les tasseaux de bois sont de très mauvaise qualité. Ils se déforment et cassent trop facilement. Le maillage doit donc être plus dense. Cela limitera en même temps la déformation de la bâche sous l’action du vent.
  • Possibilité de le coucher rapidement en cas de coup de vent.
  • Remplissage d’eau de mer avec un sceau
  • Sortie d’eau par siphon. En effet, les problèmes d’étanchéité sont trop fréquents. L’eau douce sera stockée dans le dessalinisateur jusqu’à la collecte en siphonnant un tuyau.
Le nouveau dessalinisateur — Mars 2018 — © Gold of Bengal

Les dimensions sont les suivantes : 2.50m de long, 1.30m de haut. Surface de tissu exposé : 2,50m2.

Production espérée par beau temps : …
Je ne préfère pas m’avancer la dessus… On verra.

En fin de journée, le cadre principal est presque terminé. Il restera à poser le système d’apport d’eau.

Dans un second temps je fabriquerai les réflecteurs.

J’ai arraché une par une les pousses de la patate qui avait le mieux germé. Je les ai mises dans un récipient avec 3cm d’eau, afin qu’elles développent des racines. Je les ai laissées en plein soleil.

Les plants de patates de Corentin — Mars 2018 — © Gold of Bengal

Grosse erreur… Après quelques heures je me suis rendu compte qu’elles étaient presque mortes. Je les ai mises à l’ombre dans le camp. Certaines ont repris de la force. J’ai peur que les autres ne survivent pas.

En fin de journée un orage se rapproche à nouveau. Le passage d’un orage est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Avec ses vents violents et les vagues qu’ils engendrent, il peut détruire beaucoup de choses sur son passage. Mais la pluie peut me permettre de remplir la réserve d’eau ! Le bruit du vent, l’agitation des bâches et la violence imprévisible rendent l’évènement stressant. Je me suis donc préparé au pire.

Ranger, couvrir la spiruline, les outils, attacher tout ce qui peut s’envoler, bien fermer la tente, qui contient tout le matériel électronique, refermer la bâche des patates. L’orage est cette fois bien arrivé…

Pendant la première phase, le vent était violent et irrégulier (on voit les rafales chargées d’embruns arriver sur la surface de l’eau). La pluie tombait avec un angle trop important pour que les gouttières récupèrent de l’eau. La barquette de graines tout juste germées s’est à moitié vidée dans une rafale. Pendant la seconde phase les vagues sont arrivées.

Quand elles buttent contre les flotteurs, elles éclaboussent la plateforme. J’ai peur que les patates aient pris l’eau. L’eau de mer est mortelle pour elles.

Les gouttières ne récoltaient toujours rien à cause du vent, trop fort. Pendant la troisième phase, le vent s’est calmé, il restait des vagues. Les gouttières ont commencé à se remplir. Comme elles sont mal installées, la collecte n’est pas optimale. J’estime à 30 litres le volume récupéré. Il devient urgent de terminer le chantier des gouttières. Faut-il le mettre en priorité devant les patates et les dessalinisateurs?

Cet orage était un moment stressant. La montre a enregistré des dépassements de 120 bpm pendant l’orage. Avec la venue de la mousson, leur violence risque de s’intensifier et leur fréquence d’augmenter. Il faut que je m’arrange pour que ce soit moins pénible.

Pesée de la récolte de champignons — Mars 2018 — © Gold of Bengal

5 packs de champignons sont nés ! Ce sont ceux du nouveau bac aménagé dans le camp. C’est une excellente nouvelle. J’avais peur que la chaleur les ai tués.

La température (prise entre 3 packs) est comprise entre 26°C la nuit et 31°C en pleine journée (quelques dépassements jusqu’à 35°C). Le taux d’humidité varie entre 75% et 85%. Je vaporise en moyenne 3 fois par jour de fines gouttelettes. J’humecte le tissu qui recouvre les cotés de la boite en moyenne 4 fois par jour.

Reste à faire en sorte que les 28 autres packs bénéficient des mêmes conditions.

Nouvelle attaque du voisin ! Cette fois il m’a proposé un stick de riz. J’adore ça. C’est un tube de riz gluant sucré cuit sur les braises dans un bambou, avec un gout fumé de barbecue.

J’ai réussi à refuser avec le sourire. Il était avec son fils. Je leur ai demandé leurs prénoms : Suleman (fils) et Cochim (père).

Quelque soit la culture dans le monde, le cadeau de base pour signifier la sympathie est la nourriture. Refuser n’est pas une chose facile. J’aimerais aussi offrir quelque chose, mais aucun produit comestible de la Biosphère n’est vraiment attrayant…

État d’esprit > 0

La bonne nouvelle du jour ce sont les champignons. Point de vue nutritionnel ce n’est pas une révolution, mais cela va apporter une vraie valeur ajoutée dans la composition de mes repas.

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L’orage qui est passé m’a rappelé à quel point un coup de vent pouvait être violent, soudain et dévastateur pour la Biosphère. Il faut que je protège mieux les légumes feuilles et que je haubane plus sérieusement la structure.

Frustration de ne pas avoir collecté plus d’eau.

Jour 14

Ce matin je me suis pesé sur Tanita. Elle a affiché 58,8kg. J’ai encore perdu du poids (2,7kg depuis le début de l’expérience). C’est principalement la quantité de muscles qui a diminué. Mon indice de condition physique est passé de 8/9 à 7/9.

Corentin se pèse sur Tanita, sa balance électronique permettant le contrôle physionomique — Mars 2018 — © Gold of Bengal

D’après Anne-Claire (notre coordinatrice scientifique) ce serait du au fait que je ne satisfais que 50% de mes besoins en protéines, qui jouent un rôle majeur dans le renouvellement des tissus musculaires. À confirmer par le nutritionniste.

Les protéines sont, avec les glucides et les lipides, l’une des trois grandes familles de macronutriments essentielles à l’organisme. Elles y jouent un rôle structural (au niveau musculaire ou encore cutané) mais sont également impliquées dans de très nombreux processus tels que la réponse immunitaire (anticorps), le transport de l’oxygène dans l’organisme (hémoglobine), ou encore la digestion (enzymes digestives). Source : anses.fr

Une quantité adéquate de protéines chaque jour doit être présente afin de prévenir la malnutrition protéino-énergètique.

Dans les pays en voie de développement, le marasme ainsi que le kwashiorkor sont deux formes de malnutrition protéino-énergètiques très présentes qui causent la mort d’environ 6 millions d’enfants chaque année. Source : passeportsante.net

Les grillons du premier nid sont nés. À la naissance, ils sont blancs comme les oeufs et grands comme des fourmis. Je dois les laisser encore quelques jours dans le sac plastique. Je vais préparer une 3è box pour les loger.

Troisième oeuf de poule rousse !

Je suis allé cherché des feuilles sur l’île. Elles ont adoré. J’en ai donné une petite quantité car je ne sais pas si elles savent détecter instinctivement si ces feuilles sont toxique ou pas. Je donnerai le reste demain après digestion.

Je leur ai aussi donné une noix de coco pourrie. Elles aiment la noix de coco.

Les chenilles dans les patates sont tous les jours un peu plus grandes et grasses. C’est une bonne nouvelle, car cela signifie que ce n’est qu’une génération ponctuelle, un baby boom et pas une colonie avec déjà une rotation dans la reproduction. Par contre, cela signifie aussi qu’il faut que je m’en débarrasse avant qu’elles ne se reproduisent. Plus elles grossissent plus elles sont repérables. Je me demande si c’est le genre de chenille qui se transforme en papillon. Un superbe papillon noir rode régulièrement dans la Biosphère.

Un autre pêcheur est passé. Il faisait signe avec ses doigts qu’il voulait venir voir. Je l’ai accueilli et lui ai fait faire un tour complet de toutes les installations. Il avait l’air content. Mais avant de partir il a refait le même signe avec ses doigts. En fait je l’avais mal interprété. Il voulait une cigarette. Je n’en ai pas…

J’ai installé le dessalinisateur à droite du poulailler.

Ses 2 extrémités sont posées sur des bambous. Il est orienté Nord-Sud. Entre ses extrémités, il est au dessus de l’eau. J’ai réalisé un premier réflecteur et branché une alimentation en eau de mer avec un système provisoire.

En fin de journée, il y avait déjà un peu d’eau douce. Elle a mauvais gout à cause du bois que j’ai utilisé. Ce sera le cas pour les premiers litres produits. L’eau produite sera dédiée aux plantes. Je garderai pour ma consommation de l’eau de pluie.

J’ai fait un tour de paddle en fin de journée jusqu’à une grotte de la falaise est de l’île.

Escapade aux abords de la Biosphère — Février 2018 — © Gold of Bengal

C’est un bon moyen de se vider la tête car sur la plateforme le cerveau est tout le temps en “warning” : “je devrais humecter les champignons car ils sont fait plus de 30°C / je devrais collecter les grillons maintenant sinon ils ne se déshydrateront pas assez avant la nuit / ce serait bien que j’arrose les graines germées / ces cumulonimbus vont peut-être former un orage, il faut que je prépare les gouttières / …”

Deux semaines se sont écoulées depuis le début de l’expérience. C’est le temps que j’avais compté pour l’installation. En réalité cette phase prendra plus de temps. La spiruline n’est qu’au 1/3 du volume souhaité, les feuilles ne prennent que 5% de la surface dédiée, 1 seul des dessalinisateurs est construit, …

J’ai le sentiment de passer mon temps à rattraper un retard plutôt que de construire. J’ai hâte d’être dans la phase suivante qui consistera à prendre des mesures et optimiser la Biosphère sur fond d’une routine bien rodée ! Cela me laissera aussi plus de temps libre pour lire. Ceci dit la mise en place et le rodage de la Biosphère constituent une phase très intéressante.

C’est une bonne nouvelle de voir que le dessalinisateur fonctionne déjà. Belle récompense pour ce travail réalisé sous un soleil écrasant.

La naissance des bébés grillons est un excellent point, qui arrive au un moment ou j’ai besoin de protéines. Parfait.

La culture de grillons — Février 2018 — © Gold of Bengal

État d’esprit < 0

J’ai mal au dos. Je passe mes journées à enjamber des objets, passer sous les barres de la serre, porter des choses lourdes, etc. Il faut absolument que je fabrique une assise avec dossier pour le reposer.

J’étais fier d’avoir un indice de condition physique de 8 sur 9. Passer à 7 en si peu de temps est une mauvaise nouvelle.

Jour 15

J’ai arrêté d’augmenter le volume de spiruline. Il est proche de 100 litres, ce qui correspond au premier palier déterminé. J’ai réalisé une première collecte. 4 litres de solution filtrée ont donné 7g de spiruline pressée. Le gout n’est ni bon ni mauvais. Sensation de manger des algues. La consistance pâteuse est agréable. Je l’ai mélangée à mon déjeuner.

Ayant la possibilité de filtrer au maximum 1/4 du volume chaque jour (soit 25 litres), si la concentration est homogène, la capacité maximale de production de la spiruline serait de 43.75g. Cela est bien supérieur à mes prévisions.

J’ai trouvé une recette satisfaisante pour manger le maïs concassé pour poules. Je le laisse tremper dans 2 fois son volume en eau (dont 1/4 d’eau de mer) pendant 24h. Il absorbe de l’eau et gonfle. Je le fais alors revenir dans un fond d’huile jusqu’à ce qu’une pellicule caramélisée se forme. C’est alors très bon.

Mon plat classique, que j’appelle “cachupa” est maintenant composé de patates douces, maïs caramélisé, ail et huile.

Allumer 3 feux dans une journée demande trop de bois et de temps. Je prépare une grande cachupa le matin et une autre le soir.

Quand je mange directement dans le plat, j’ai envie de le manger en une fois. Pour lutter contre cette envie je me sers une ration dans une noix de coco toutes les heures. La digestion est plus facile.

J’ai repiqué 4 YellowLeafAmarante dans la Box 3. J’ai collecté 25g de GreenLeafAmarante. C’est la première récolte de légumes feuilles. Mangées fraiches le gout n’est pas excellent. Je les ai mélangées à ma cachupa.

Les plants de graines germées — Février 2018 — © Gold of Bengal

J’ai commencé la fabrication du deuxième réflecteur du dessalinisateur et installé un système d’approvisionnement d’eau de mer pratique. Il est perché à 1.60m de haut, sur une barre de l’avant de la serre. Ainsi je peux le remplir avec un seau sans avoir à rejoindre la zone poulailler/dessalinisateur (pour atteindre cette zone il faut passer en équilibre au dessus de l’eau, en plein soleil).

En fin de journée il y avait beaucoup d’eau collectée. Mais après test, cette eau était salée. Elle contenait une forte proportion d’eau de mer. Il y a sans doute un canal qui amène l’eau de mer directement dans les gouttières de collecte. Il faut que je révise la pose des bâches pour éviter ces transferts.

En fin de journée, un orage est passé en deux temps, espacés d’environ 1h. De fortes pluies sont tombées. Les gouttières ont relativement bien fonctionné.

Récupération de 299 litres d’eau. J’ai à présent une autonomie estimée à 11 jours. Fin du stress hydrique ! La crise de l’eau est terminée!

Je décidé de tout de même rester sur le palier de spiruline (100 litres), pour mieux satisfaire les apports en protéines.

Je suis allé à nouveau sur la plage de la côte Est. J’avais repéré un début de chemin qui part de la plage à travers la jungle. Je me suis donc équipé pour le remonter. Il s’arrête au bout de 10 mètres. Ce n’est pas un chemin, mais un fossé creusé par l’eau.

Il y a beaucoup de vie dans la jungle. J’ai reconnu le cri d’alerte de singes, vu des oiseaux et petits reptiles.

Visite des grottes alentours de la Biosphère — Février 2018 — © Gold of Bengal

Suite à la naissance des bébés grillons, j’ai collecté leurs parents. 250g de grillons vivants et 385g d’excréments. Soit avec la première collecte 521g au total dans cette boite de 0.13m3 (120cm*44cm*25cm). Soit 4kg par m3. C’est à peu près le rendement annoncé par Tui, mon expert grillons.

Ils arrivent à maturité en 45 jours (non encore vérifié). La production journalière est donc de 11.6g/jour dans ce volume, ou 89g/jour dans un mètre cube.

Grâce aux nouvelles pontes, 4 boites du même volume pourront être en fonctionnement simultanément, ce qui devrait apporter 46.4g/jour.

État d’esprit > 0

Une autonomie en eau de 11 jours est une excellente nouvelle. Je vais pouvoir mieux arroser les plantes.

État d’esprit < 0

Je suis déçu par la présence d’eau salée dans le dessalinisateur. Il me paraissait pourtant parfaitement monté…

Jour 16

J’ai estimé que les champignons étaient arrivés à maturité. Les bords des chapeaux commençaient à se recourber et se fendre. Leur taille, après seulement 3 jours, est impressionnante. J’ai collecté 400g, venant de 6 packs.

Mangés frais est agréable ! Ça enrichit la cachupa. J’en mange une partie, je laisserai les autres se déshydrater pour les conserver. Je n’aurai qu’à les plonger dans l’eau avant de les manger.

Le voisin est passé. Il a voulu m’offrir du Coca Cola. J’ai refusé… Je lui ai offert 2 gros champignons. Il avait l’air content.

Les germes ne prennent pas tous. Des racines se développent, mais les feuilles de nombreux germes deviennent flétries et marrons.

Je dois commencer à prévoir les nouveaux sacs pour les repiquer. Il va falloir trouver du sable non salé (ou le moins salé possible). C’est un challenge. Le sel est toxique pour les plantes. Si je prends du sable de plage il va falloir beaucoup d’eau pour le dessaler.

J’ai démarré la fabrication d’un nouveau biofiltre spécialement pour les patates. Il sera similaire aux autres.

L’apport de protéines est le point qui me préoccupe le plus. Je souhaite inverser la courbe de mon poids, stopper la perte de muscles et revenir à un indice de condition physique de 8.

D’après les ANC (Apports Nutritionnels conseillés) mes besoins en protéines sont de 87g par jour.

Je peux compter sur les aliments suivants pour le mois à venir :

  • 1 oeuf de poule rousse tous les 3 jours, soit 20g par jour.
  • 250g de grillons pour les 40 prochains jours, soit 6.25g par jour.
  • 46.4g de spiruline fraiche par jour. Je suppose que cela représente 23.2g de spiruline déshydratée.
  • mon alimentation de base (mais, huile, ail, noix de coco, patates douces).

Après remplissage du tableau des apports nutritionnels, ce régime ne m’apporte que 44g de protéines. Cela représente environ 50% de l’objectif.

Mesures à prendre :

  • Oeufs : trouver le bon régime alimentaire pour les poules. Problème probable : elles aussi manquent de protéines. Leur donner de la spiruline ou des grillons serait une perte de rendement. La seule solution à court terme est d’importer sur la plateforme des granulés pour poules.
  • Grillons : pas d’option pour le moment, étant donné qu’il n’y a pas de phase de reproduction en cours. Je peux prévoir un import de nourriture spéciale grillons pour ne pas risquer une perte de productivité avec des essais de nourriture alternative.
  • Spiruline : l’option la plus raisonnable parait être d’alterner un jour sur deux entre augmentation du volume et collecte. L’augmentation du volume de culture pour augmenter la production, et la collecte pour continuer mes apports en protéines.

Mon alimentation de base apporte 29% des protéines (principalement les patates douces). Mais il n’est pas facile d’augmenter ces doses.

  • Enrichir le régime : possibilité de faire pousser des cacahuètes. Leur taux de protéine est élevé. Le cycle de culture de la cacahuète est de 90 jours. En les plantant maintenant, je pourrai donc connaitre sa compatibilité avec la culture hors-sol de la Biosphère et estimer la surface nécessaire pour l’autonomie d’une personne. Avec 100 grammes de cacahuètes par jour et le régime qui découle des points précédents, l’apport total journalier de protéines sera de 73%. Cela me semble satisfaisant pour cette phase.

Je dois donc trouver un moyen d’importer de la nourriture pour poules (9kg), de la nourriture pour grillons (3kg) et des cacahuètes (3kg).

FEELING > 0

L’arrivée des champignons, des légumes-feuilles et de la spiruline dans mon alimentation sont un vrai plaisir et une fierté.

Le fait de ne plus être en stress hydrique me relaxe beaucoup.

FEELING < 0

Je ressens le besoin d’alléger ma charge mentale. Chaque objet sur lequel je pose les yeux déclenche des ajouts dans ma to do list. C’est pénible. Il faut que je définisse le coeur de la Biosphère, et que je me focalise dessus jusqu’à ce qu’il fonctionne, avant de travailler sur les autres organes. Je sélectionne les éléments suivants :

Spiruline / Patates / Poules / Grillons / Champignons / Microgreens / Feuilles / Biofiltres / Capteurs / Sécurité

C’est déjà beaucoup. Le reste (c’est à dire les systèmes de production et stockage d’électricité, de recyclage, de production d’eau, de conservation de la nourriture, de cuisson, outils, etc.) attendra une seconde phase.

Jour 17

Depuis hier je trouve un dépôt type cristaux de sel au fond de la bouteille d’urine.

Hypothèse : c’est le résultat de plusieurs jours de dépôt. Il s’est décroché du fond de la bouteille hier et aujourd’hui. Veiller à bien la nettoyer.

Ce matin à 4h30, je suis allé cueillir des feuilles de menthe sur les pieds qui poussent dans les sacs de culture de patates. De nombreuses grosses chenilles mangeaient les feuilles. Elles doivent sortir principalement la nuit. Elles sont alors plus faciles à attraper. Je pense avoir presque éradiqué la colonie !

Dans la matinée j’en ai trouvé sur le citronnier, le calamondin et le capsicum (piment). Elles sont de différentes espèces. L’une est verte, massive, avec des antennes rouges. L’autre petite et grise. Je les ai données aux poules. J’ai trouvé 2 cocons. Je les ai laissés en place, car un cocon ne consomme pas de feuilles. Et parce que c’est très beau. Ces 2 chenilles ont gagné la bataille. Elles vont se transformer en papillon.

Je n’ai pas encore trouvé de moyen facile et rapide de filtrer la spiruline. Elle ne s’écoule pas toute seule dans le tissu. Dans mes souvenirs de la visite de la ferme de Mme Voula à Madagascar la filtration paraissait pourtant très simple.

Les voisins m’ont fait signe de venir boire un café. Ce sont les voisins qui ont la plateforme située à l’Ouest. C’est une grande plateforme, avec une petite maison posée dessus. Un toit en tôle verte, des murs en lattes de bambous tressés. Elle est très bien entretenue. Il y a en permanence du monde qui y vit et travaille. Je les ai rejoint en paddle. Ils sont 2 frères. Le plus jeune s’appelle Farein, l’autre s’appelle Guit. Je pense qu’ils ont moins de 30 ans. Leurs parents vivent à Laem Sak et viennent presque tous les jours. Ils élèvent des homards, des poissons et cultivent des algues (caulerpa lentillifera, dit “caviar vert”).

La plateforme du voisin — Février 2018 — © Gold of Bengal

Un voisin d’une autre plateforme plus à l’Ouest était en train de partager un café avec eux.

J’ai refusé leur café mais j’ai bu de l’eau chaude. Ils m’ont demandé ce que je faisais. Grâce au traducteur du smartphone de Farein, j’ai pu tout expliquer. Ça a eu l’air de les intéresser. Ils m’ont souhaité la bienvenue.

J’y retourne demain. Ils vont m’apprendre à cultiver des algues. Elles seraient un excellent apport dans mon régime, notamment pour les glucides, les protéines et les minéraux.

Une partie des grillons du deuxième nid est née. J’ai préparé la Box4 pour les accueillir. Les 3 logements de grillons sont similaires. Il va falloir aménager de la même manière la Box3. Dans quelques jours, ceux du troisième nid devraient éclore.

Pas de grillons adultes en ce moment, c’est silencieux. Ceux de la Box2 devraient commencer à chanter dans 3 semaines.

Un vent d’Est s’est levé dans l’après-midi. Il était assez fort. Il entre dans la baie par rafales. C’est fatiguant. Ce vent assèche tout. Et il forme des vagues. Elles tapent contre les flotteurs et envoient des gouttes qui menacent les patates.

Un bateau de pêche rempli d’une dizaine de touristes européens est venu accoster la plateforme. Ce bateau vient de temps en temps amener des touristes sur une plateforme plus à l’Ouest, pour leur faire visiter un élevage de homards (et leur en vendre je suppose). Le guide m’a demandé s’ils pouvaient prendre des photos. J’ai dit oui. Leur arrivée ne m’a pas fait plaisir. Je ne suis pas une attraction touristique. Je suis resté planté devant la serre, en souriant mais ne sachant pas quoi dire et n’osant pas les refouler. Je devais avoir l’air d’un animal dans un zoo. Je crois que que je les a mis mal àl’aise. Le guide a alors tenté de faire quelques plaisanteries à propos des poules. Personne n’a rigolé. Ça a renforcé le malaise.

Parfait, je pense que ce guide ne reviendra pas avec son bateau.

État d’esprit >0

Je suis content d’avoir discuté avec les voisins. Ils sont vraiment gentils et accueillants. J’ai hâte de cultiver des algues. Je vais aussi pouvoir leur demander de m’acheter de la nourriture pour poules, grillons et des cacahuètes.

État d’esprit < 0

Le vent est vraiment épuisant. À part la tente où il fait chaud et où il est inconfortable de travailler, il n’y a pas d’endroit protégé.

Même le beau plan de patates a lourdement subit les attaques de chenilles. Toutes les feuilles sont percées.

État des plants de patate — Mars 2018 — © Gold of Bengal

RDV dans quelques jours pour découvrir la Mission Biosphère — Semaine 4.

À PROPOS

Mission Biosphère, 4 mois en autonomie grâce aux low-tech.

Seul sur une plateforme au large de la Thaïlande, en situation de totale autarcie, Corentin aura pour mission de combiner les low-technologies les plus prometteuses afin de constituer une base-vie autonome lui permettant de répondre à ses besoins vitaux.

Pour tout savoir de la Mission Biosphère, rendez-vous sur Nomade des Mers — Phase 2 : Mission Biosphère

Nomade des Mers, 4 ans autour du monde, à la découverte des low-technologies

Le 23 février 2016, le Nomade des Mers prenait la mer pour une grande expédition de découverte, d’expérimentation et de promotion des low-technologies. Son objectif ? Parcourir les océans à la recherche des meilleures solutions et des inventeurs les plus ingénieux. Plateforme d’expérimentation des low-tech, le Nomade des Mers permet également d’en faire la promotion et d’en assurer la diffusion. Au fil de ses expéditions, le Nomade des Mers a vocation à devenir un écosystème autonome exemplaire, porte-drapeau de l’innovation durable et solidaire.

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Pour toute information, contactez Amandine Garnier / Responsable du Développement / Low-tech Lab

Corentin sera indisponible et injoignable jusqu’au mois de juin.

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