Mission Biosphère — Semaine 8

Le 20 février 2018, Nomade des Mers a lancé la phase 2 de son exploration low-tech : La Mission Biosphère, ou 4 mois en autonomie grâce aux low-tech. Chaque semaine, Corentin nous partage son journal de bord.

Gold of Bengal
Low-tech Lab Stories
10 min readJun 15, 2018

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JOUR 46

J’ai repiqué 6 plans d’amarante rouge dans des sacs de billes d’argile. Chaque sac est percé au fond et sur les cotés et mesure 15cm de diamètre. La hauteur de billes d’argile est de 8cm. Les 6 sacs sont posés dans un bac. J’inonderai 4 fois par jour en moyenne le bac (4 litres de solution nutritive ECG=0.9, pour que le niveau monte à 5cm). Puis j’actionnerai le siphon pour que le bac se vide lentement dans la réserve de solution nutritive.

La technique demande peu d’efforts. C’est un système inspiré du principe de la “table à marée”. Il permet aux billes d’argiles et aux racines de rester toujours humides et bien oxygénées. Si ça fonctionne, c’est un système génial, peu couteux, peu chronophage et économe en eau.

Test d’un système “Table à Marée — Avril 2018 — © Gold of Bengal

Il a plu cette nuit et en fin de journée. La réserve d’eau est à nouveau à son maximum.

JOUR 47

Après-midi dédiée à l’optimisation des conditions de vie. J’ai rangé la tente. Elle contenait trop de matériel encombrant et inutile au quotidien. J’ai réparé mon casque audio en soudant 2 câbles jacks usagés. Étant donné mon usage intensif de ce casque, je ne peux pas mettre ça sur le dos de l’obsolescence programmée.

Tentative échouée de faire un nouveau système d’ombrage du camp. Je n’ai pas de bâche adaptée.

En fin de journée je suis allé ramasser du bois sur la plage. J’ai observé un rapace blanc vraiment magnifique.

JOUR 48

Le vent a soufflé fort hier et aujourd’hui. C’est fatigant de subir son souffle en permanence, les bruits de bâche et les sifflements, le stress que quelque chose s’envole, et les vaguelettes qui font bouger la plateforme.

Le vent réduit énormément l’efficacité du four solaire. Les patates ne cuisent pas. Je dois les cuire au stone, ce qui prend beaucoup de temps et de bois. Preuve que le four solaire réduit énormément la consommation de bois et est un gain de temps énorme. Je vais essayer de l’améliorer pour qu’il soit performant même en cas de vent fort.

Système d’hydroponie en test — Avril 2018 — © Gold of Bengal

Après de longues hésitations, j’ai réalisé un nouveau système d’hydroponie avec des billes d’argiles comme substrat. Il sera en compétition avec la table à marée. C’est une double gouttière formée avec une bâche agrafée sur un cadre. 2 rangées de 5 amarantes sont plantées dans un lit de billes d’argile. Une petite pompe d’essuie glace de voiture reliée à un panneau solaire envoie la solution nutritive contenue dans un bac (20 litres, ECG=0.9) à la base de cette gouttière double. Elle s’écoule à travers les billes d’argile puis retourne dans le bac. Il y a un bulleur dans le bac pour bien oxygéner la solution.

Le test lancé le jour 38 (amarante repiquée dans un fond de bouteille de 5 litres rempli de billes d’argile) a l’air de porter ses fruits car les feuilles sont d’une belle couleur rouge-violet foncé. J’ai protégé le substrat du soleil avec une bâche opaque. À partir de maintenant, je l’arroserai en vaporisant la solution nutritive. Ainsi, je mène 3 tests en parallèle avec le substrat billes d’argile :

  • Solution nutritive vaporisée 4 fois par jour
  • Marée de solution nutritive 4 fois par jour
  • Débit continu de solution nutritive toute la journée (8h30–16h)

Nouvelle chute de production des champignons. Quasiment tous les sacs ont produit 2 fois des champignons. Aucun n’a produit 3 fois. Peut être qu’ils arrivent au bout de leur capacité ? Dans ce cas, il ne faut pas que je tarde à les cloner. Ou peut-être est-ce à cause de la température, qui augmente fortement ces jours-ci ??

Pas d’œufs depuis 2 jours, c’est mystérieux. Est-ce qu’elles n’aiment pas leurs nouveaux granulés ? Ils ont un aspect différent mais sont bien faits pour poules pondeuses. Le vendeur m’a montré que le sac était imprimé d’un dessin d’une poule avec des œufs.

Poulailler embarqué sur la Biosphère low-tech — Février 2018 — © Gold of Bengal

JOUR 49

La baisse de performance du four solaire ces derniers jours m’a poussé à le repenser. Au fil des semaines, il s’est bien dégradé : une bonne partie du polystyrène a fondu avec la chaleur, une des 2 vitres est cassée, les réflecteurs ne réfléchissent plus autant qu’avant.

J’ai donc retaillé des plaques de polystyrène pour faire une bonne isolation. Je les ai protégées avec des boites d’œufs. J’ai tapissé l’intérieur avec un tissu noir. Cela forme un espace suffisamment grand pour y loger le récipient qui contient mon kilo de patates quotidien.

Mise à niveau du four solaire — Avril 2018 — © Gold of Bengal

J’ai refait entièrement les surfaces réfléchissantes des 3 réflecteurs et amélioré le système de fermeture de la porte.

Simple vitrage car je n’ai plus qu’une vitre, mais je pourrai éventuellement créer une sorte de deuxième vitre avec une bâche si besoin.

Un nouveau type de chenilles est apparu dans la menthe qui pousse au pied des patates. Elles roulent des feuilles pour faire un nid et s’y logent. Ces feuilles meurent très rapidement. Il y en a beaucoup. Je donne aux poules ces feuilles roulées contenant des chenilles. J’imagine que pour elles ce sont de bons petits fours.

Les chenilles élisent domicile dans la menthe — Avril 2018 — © Gold of Bengal

Pour le moment cela se limite à la menthe. Pas d’attaque des patates ni des arachides.

JOUR 50

Naissance du premier nid de grands grillons. Ils sont très nombreux. Comme je n’ai pas encore fabriqué la grande boite dans laquelle je veux les élever, je les ai installés provisoirement dans un bac vide avec quelques boites d’œufs. Puis j’ai démarré la construction de la big box.

Naissance de grillons — Avril 2018 — © Gold of Bengal

Elle mesure 1.25m*0.85m*0.85m, soit 0.9m3. Cela devrait me permettre de collecter entre 3,5 et 4kg de grillons tous les 45 jours, soit un apport de 90g par jour.

La boite est un parallépipède, fait de tasseaux de bois pour la structure et de bâche plastique transparente pour les parois.

Nouvelle box de culture de champignons — Avril 2018 — © Gold of Bengal

Dans la SideBox1 (espèce de petits grillons) de plus en plus de grillons chantent. Mais ils ne sont pas très nombreux. J’espère qu’il y en a suffisamment pour assurer un baby boom.

Repiquage de 12 amarantes rouges dans une nouvelle table à marée.
Elle est placée sur la table de la nursery.

L’amarante mise dans des billes d’argile il y a 11 jours est très belle.

Les 6 amarantes de la table à marée 1 ont de belles nouvelles feuilles.

Pas encore de changement visible sur les amarantes du système de gouttières. Il est sans doute trop tôt. Je suis confiant, cette solution me parait idéale.

Coté semis, les jeunes pousses de choux chinois poussent difficilement. J’ai semé 100 morning glory, car je pense que le système des billes d’argiles leur est bien adapté.

Depuis maintenant 50 jours, je ne mange quasiment pas de feuilles. J’ai donc décidé de lancer une production de microgreens (jeunes pousses). Tous les jours, je vais semer densément dans des barquettes de 10*15cm. Je les laisserai 5 jours à l’ombre sous un drap humide, puis 5 jours à la lumière avec vaporisation de solution nutritive. Au bout de 10 jours, je pourrai commencer à récolter tous les jours le contenu d’une barquette. Je commence par des semis de graines de moutarde car elles germent vite et ont un bon gout.

Graines germées — Avril 2018 — © Gold of Bengal

J’ai trouvé quelques informations sur les jeunes pousses. Ça a l’air très intéressant nutritivement.

Among the 25 microgreens assayed, red cabbage, cilantro, garnet amaranth, and green daikon radish had the highest concentrations of ascorbic acids, carotenoids, phylloquinone, and tocopherols, respectively. In comparison with nutritional concentrations in mature leaves (USDA National Nutrient Database), the microgreen cotyledon leaves possessed higher nutritional densities. The phytonutrient data may provide a scientific basis for evaluating nutritional values of microgreens and contribute to food composition database. These data also may be used as a reference for health agencies’ recommendations and consumers’ choices of fresh vegetables.” / Source : “Assessment of vitamin and carotenoid concentrations of emerging food products: edible microgreens.”

Les graines germées ont des propriétés nutritionnelles supérieures aux graines sèches : les taux de vitamines et enzymes peuvent être fortement augmentés lors du processus de germination. Dans un germe de blé, on trouve même certaines molécules, telles que la vitamine C, que l’on ne trouve pas dans le grain de blé.” / Source : wikipedia

Il commence à faire très chaud.

JOUR 51

Tous les 3 jours, j’ajoute 150ml d’urine dans la spiruline. Mais je décide de ne plus apporter de cendre. En ce moment j’utilise du bois flotté ramassé sur la plage comme combustible. Je pense qu’il est plein de sel. La cendre qu’il produit doit en être chargé. J’ai maintenant une hantise du sel.

J’ai passé l’après midi à fabriquer la big box pour accueillir les bébés grillons. Elle est terminée. J’y ai mis les nids 1 et 2 (le 2 est né cette nuit).

Je n’ai pas assez de boites d’œufs pour construire leurs buildings. J’en ai seulement 75. Pour remplir la big box il m’en faudrait encore 350. J’irai en acheter quand je partirai pour renouveler mon visa. Tant que les grillons sont petits, ce n’est pas un problème.

J’ai du mal à garder la température de la culture de champignons en dessous de 31°C. Elle atteint régulièrement 35°C. Il faudrait que je fabrique un système de zeer pot (frigo du désert) pour les rafraichir.

Culture de champignon à bord de la Biosphère — Février 2018 — © Gold of Bengal

JOUR 52

Les amarantes qui poussent dans les billes d’argile se portent bien. À priori, ce système diminue radicalement la consommation d’eau par rapport au système précédent. J’attends d’avoir un peu plus de données pour réaliser les calculs comparatifs. J’ai bon espoir d’avoir enfin trouvé la solution.

Au réveil je me suis rendu compte d’une fuite de grillons. Il y a un petit trou dans un coin de la big box. Heureusement, je l’avais posée au dessus d’un bac. J’ai pu récupérer une bonne partie des évadés. Certains ont réussi à fuir. Quelques dizaines sont donc devenus chasseur-cueilleurs.

J’ai réaménagé le volume sous la table de la nursery pour y placer la big box entre la culture de champignons et les biofiltres. Il n’y a pas de place perdue. Cela va augmenter le rendement surfacique (production par m≤) de la Biosphère. Le rassemblement de ces 3 systèmes est logique car ils ont besoin de fraicheur et d’ombre.

La big box est juste à coté de la tente. Cela posera peut-être problème de voisinage quand les grillons se mettront à chanter. Mais grâce à la bâche transparente, je peux les observer. C’est intéressant. Ils se promènent partout. Heureusement, ils ne peuvent pas marcher sur les parois verticales en bâche. Par contre, ils se coincent facilement dans des recoins et se noient dans de petites flaques d’eau.

Je suis allé ramasser du bois sur la plage et en ai profité pour faire de l’escalade le long de la falaise pour me dégourdir bras et jambes.

J’arrose tous les jours le rang de patates et arachides avec 6 litres d’eau. Elles poussent mais je ne pense pas qu’elles soient au maximum de leur capacité. Il y a toujours des araignées rouges. La menthe est de plus en plus envahie par les nouvelles chenilles.

J’ai un peu peur que cette culture de patates soit un échec.

Les graines ont germé en 24h et grandissent très rapidement. Enfin un type de culture a ma portée.

La production cumulée de la Biosphère Low-tech a été la suivante (semaines 3 à 8) :

Extrait de la Matrice de suivi de la Biosphère low-tech — Avril 2018

On peut observer que le pic de production de champignons est passé. Il devrait continuer à baisser. Il faudra prévoir de les cloner.

La production de spiruline est stable. Elle n’est pas limitée par la capacité de production mais par l’étape de filtration qui prend beaucoup de temps.

Celle de grillons devrait croître grâce à une collecte importante la semaine 13.

Celle d’œufs pourrait théoriquement augmenter mais je ne sais pas comment faire. Elles ont de l’eau et des granulés à volonté. Peut-être plus d’apports de verdure ?

INDICE D’AUTONOMIE ALIMENTAIRE

La production de la Biosphère les 2 dernières semaines a permis une autonomie de 20% des protéines, 78% de fer, 50% de cuivre, 25% de vitamine B12, 31% de vitamine B1, 96% de vitamine B2.

RDV dans quelques jours pour découvrir la Mission Biosphère — Semaine 9.

À PROPOS

Mission Biosphère, 4 mois en autonomie grâce aux low-tech.

Seul sur une plateforme au large de la Thaïlande, Corentin aura pour mission de combiner les low-technologies les plus prometteuses afin de constituer une base-vie autonome lui permettant de répondre à ses besoins vitaux.

Pour tout savoir de la Mission Biosphère, rendez-vous sur Nomade des Mers — Phase 2 : Mission Biosphère

Nomade des Mers, 4 ans autour du monde, à la découverte des low-technologies

Le 23 février 2016, le Nomade des Mers prenait la mer pour une grande expédition de découverte, d’expérimentation et de promotion des low-technologies. Son objectif ? Parcourir les océans à la recherche des meilleures solutions et des inventeurs les plus ingénieux. Plateforme d’expérimentation des low-tech, le Nomade des Mers permet également d’en faire la promotion et d’en assurer la diffusion. Au fil de ses expéditions, le Nomade des Mers a vocation à devenir un écosystème autonome exemplaire, porte-drapeau de l’innovation durable et solidaire.

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Corentin sera indisponible et injoignable jusqu’au mois de juin.

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