“Les bons mots, au bon endroit”

Audrey Dreillard
MAIF Data Design Tech etc.
6 min readJan 31, 2023

S’exprimer simplement quand il s’agit de parler de produits d’assurance ? Pas toujours évident 😊 Et si on y ajoute les contraintes liées au format digital, on se dit qu’on aurait bien besoin d’un expert ! Ça tombe bien : arrivée en septembre 2021 au sein de MAIF, Aude Lerner est UX writer. Petit tour d’horizon de ses missions.

UX writer, Aude Lerner a rejoint MAIF en septembre 2021

Pour ceux à qui ton métier ne parle pas, en quoi consiste l’UX writing ?

Aude Lerner. “On fait le même travail qu’un designer, mais avec les mots. Il s’agit de chercher à créer la meilleure expérience possible pour les utilisateurs, en choisissant les bons mots, et en les positionnant au bon endroit dans leur parcours, de façon à déclencher l’impact souhaité”.

Tu as rejoint MAIF en septembre 2021, en quoi consiste ta mission ?

A.L. “Je travaille principalement pour l’application mobile MAIF. J’accompagne l’équipe sur les nouvelles fonctionnalités. Récemment, j’ai par exemple travaillé l’onboarding des utilisateurs sur la fonctionnalité “Mes documents”. Outre les nouvelles fonctionnalités, il y a tout ce qui concerne l’existant et l’amélioration continue.

J’interviens aussi sur des sujets transverses, qui touchent à plusieurs univers. Là-dessus nous avons de gros enjeux de cohérence, il nous faut nous concerter et surtout éviter de travailler en silo.

Parmi les sujets communs à tous, nous avons par exemple celui de l’accessibilité, qui rejoint celui de l’inclusivité. Nous nous adressons à tout le monde et le critère principal est de s’exprimer de manière simple. Le travail ici concerne par exemple les formulaires, ou encore la formulation des messages d’erreur dans lesquels il convient d’expliquer, de décrire, d’ajouter des exemples… de façon à aider véritablement l’utilisateur.

J’ai aussi travaillé sur la refonte des mails qui sont adressés dans le cadre de la création de compte… qui constituent le premier échange entre MAIF et un futur sociétaire.

Mon temps se partage donc entre l’application mobile et les demandes ponctuelles d’autres squads (équipes), sur des sujets variés !”

Au quotidien, qui sont tes principaux interlocuteurs ?

A.L. “Je suis rattachée à l’entité design, et à ce titre je travaille en proximité avec les UX designers, mais aussi avec les UI designers, par exemple pour ce qui concerne la structure de l’information au sein de l’interface.

J’ai aussi des échanges avec les collègues de la communication externe. C’est le cas par exemple pour ce qui concerne l’orientation ou l’angle à privilégier pour certains messages.

Je suis aussi en relation avec les collègues en charge du contrôle technique et juridique, c’est-à-dire tout ce qui touche au respect de la réglementation en terme de wording. Et pour ce qui concerne le recueil de données et la vie privée, nous sommes en lien avec notre DPO (Data Protection Officer).

Je dirais que je suis un peu charnière”.

“Il ne s’agit pas uniquement de mots,
mais d’une expérience dans sa globalité”

En cas de désaccord, à qui appartient le dernier mot ?

A.L. “Il y a beaucoup de discussions autour des termes et nous sommes sans cesse dans le compromis ! Au-delà des enjeux de chacun, il ne faut pas perdre de vue qu’il ne s’agit pas que de mots, mais d’un produit, d’une expérience dans sa globalité !

Nous gagnerions vraiment à simplifier notre langage, à nous exprimer de façon moins compliquée. Mais c’est, je pense, une question de culture, dans laquelle on cherche beaucoup à se protéger. Nous avons des couches de langage réglementaire, qui ne sont pas faciles à percer, et une tendance à vouloir tout mettre sur la page alors que nous devrions chercher à déterminer les divers niveaux d’information : ce qui est essentiel et ce qui est secondaire”.

Des tendances plus vraies dans le monde de l’assurance selon toi ?

A.L. “Oui, c’est plus prononcé que dans d’autres secteurs. Auparavant j’ai travaillé dans le e-commerce et ce n’est pas comparable”.

Justement, peux-tu nous parler de ton parcours ?

A.L. “A la base, j’ai une formation de traductrice-interprète en anglais et allemand. J’adore tout ce qui touche aux langues et aux cultures étrangères ! J’ai arrêté ce travail car je ne voulais pas être en indépendant… ça ne me correspondait pas.

Après une transition dans un métier plutôt administratif, je suis revenue à mes premières amours : les mots et l’écriture. Cette période coïncidait avec l’essor du digital et je me suis dit que ce serait vraiment chouette de pouvoir mettre mes compétences au service de ce nouveau canal. Je suis donc devenue rédactrice web, notamment pour des ONG, puis pour une banque…

Pas simple d’écrire toutes ces petites lignes !

En 2016 j’ai travaillé sur la refonte d’un intranet et ensuite pour une start-up, et c’est là que j’ai découvert les micro-contenus … et je me suis dit que ce n’était pas simple d’écrire toutes ces petites lignes ! J’ai donc fait des recherches et pas mal de veille là-dessus et c’est comme ça que j’ai découvert l’UX writing. Ça m’a parlé, je me suis dit que ça avait du sens professionnellement, et j’ai décidé de me lancer.

Je me suis beaucoup documentée sur le sujet et j’ai suivi plusieurs formations.

J’ai ensuite travaillé en free-lance : dans le e-commerce d’abord pour une application qui permet de faire ses courses en ligne, et ensuite pour la MACIF. C’est là que j’ai mis le pied dans le monde de l’assurance !”

Comment as-tu l’habitude de travailler ?

A.L. “Je fais pas mal de benchmark, et j’échange beaucoup avec mes collègues. C’est vraiment important de partager.

Face à l’existant, il faut bien souvent aller à la pêche aux informations de façon à comprendre pourquoi on a choisi tel ou tel mot, mesurer si c’est challengeable, et surtout consigner ces choix pour ne pas oublier ce sur quoi nous nous étions mis d’accord.

Actuellement je ne suis pas assez impliquée dans la recherche utilisateurs car la part de production est très importante. Mais c’est un objectif pour 2023 car c’est fondamental ! D’ailleurs des séances sont maintenant organisées pour étudier tous les verbatims recueillis afin d’identifier les points d’amélioration. Il s’agit de trier et d’analyser la matière existante, mais aussi par exemple de compléter avec de la double écoute auprès de conseillers pour voir comment les utilisateurs parlent d’un sujet, être attentif au vocabulaire utilisé. Cela vaut de l’or si on veut aller vers de la vulgarisation. Je voudrais être plus proche de ceux qui sont au contact des sociétaires et être en mesure d’intégrer leurs retours plus en amont dans le produit”.

Tu as rejoint MAIF en septembre 2021. Auparavant, quelle image en avais-tu ?

A.L. “Je ne connaissais pas tellement MAIF, mais il m’était arrivé à plusieurs reprises d’aller sur le site maif.fr que je trouvais déjà super ! Les valeurs mutualistes de l’entreprise y sont prégnantes et j’avais une très bonne image de la marque.

MAIF est connue et reconnue pour la qualité de sa relation et sa proximité avec les sociétaires, l’ambition c’est d’avoir ce même lien sur le canal digital”.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

A.L. “Je lorgne pas mal du côté anglo-saxon car ils sont pionniers dans le domaine de l’UX et de l’UX writing ! J’apprécie particulièrement Shopify. Ils ont une manière de structurer l’information que je trouve hyper claire, simple, lisible. Shopify a un design system que j’adore, Polaris, qui inclut tout ce qui touche au content. Cela peut donner des idées sur la manière dont nous pourrions structurer le nôtre.

Cette partie documentation est selon moi tout aussi importante que la production. Il est important de consolider tout ce que l’on a déjà. On veut parfois partir d’une page blanche alors qu’il existe des choses qui fonctionnent. Or, ce qui fonctionne est précieux et certaines choses sont en lien direct avec l’image de marque. Il faut donc en prendre soin”.

Des conseils de lecture pour celles et ceux qui n’ont pas la chance d’avoir un(e) UX writer à leurs côtés ?

A.L. “Oui ! Je recommande vraiment le livre “UX writing, — le guide de la microcopie”, rédigé par Kinneret Yifrah(1). Il explique en détail les particularités de l’UX writing et contient des fiches récap’ qui permettent de se poser les bonnes questions. Les exemples sont plutôt tournés e-commerce, mais ça reste très intéressant !”

(1) Yifrah K., UX writing, — le guide de la microcopie, Dunod, 2020.

Propos recueillis par Audrey Dreillard

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