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Intrapreneuriat et crise COVID : et si la communauté était une solution pour réinventer votre programme et lui permettre de survivre ?

7 min readNov 22, 2021

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Credits : Pexels kindel media

Chez makesense comme à l’Institut de l’Intrapreneuriat, nous constatons que l’intrapreneuriat connaît un véritable boom depuis quelques années. Mais la crise COVID a frappé de plein fouet les programmes d’intrapreneuriat amenant leurs sponsors à les remettre en cause voire les arrêter. Pourtant il y a à peine 2 ans, ils étaient vus comme la solution miracle pour transformer la culture d’entreprise, générer des innovations et engager les employés. De nombreux groupes du CAC 40, mais aussi des entreprises plus modestes, se sont lancés. Ces programmes sont souvent structurés de façon similaire : en amont, un appel à projets destiné à encourager la participation la plus large possible, une première phase de sélection donnant accès à un accompagnement qui va permettre aux intrapreneurs d’élaborer une proposition attractive, suivie d’une seconde étape de sélection donnant accès à des financements et un accompagnement qui doivent permettre aux intrapreneurs de “passer à l’échelle”. Si tout va bien, cette séquence est relancée périodiquement. Mais voilà qu’arrive la crise COVID qui est venue perturber ces mécanismes !

En effet les programmes d’intrapreneuriat ne sont pas à l’abri des critiques : tout d’abord, ils sont relativement onéreux, et même très onéreux, dès lors que l’on met en place des outils sophistiqués (plateformes collaboratives ou d’appels à projet), qu’on recoure à des prestataires de haut niveau et que le nombre d’idées et d’équipes pris en compte est élevé. On parle dans certains cas de plusieurs centaines d’idées évaluées et de plusieurs dizaines de projets accompagnés… par année. Et les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des attentes : même les programmes les mieux conçus n’aboutissent au final qu’à quelques réussites et beaucoup s’essoufflent. Dans ces conditions, le retour à la normale peut s’avérer difficile pour les intrapreneurs les plus engagés et il n’est pas rare que certains d’entre eux décident de quitter l’entreprise (selon une étude de 2021 portant sur 41 intrapreneurs engagés dans des programmes, 40% pensent à quitter l’entreprise avec ou sans leur projet).

Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain car l’intrapreneuriat demeure pertinent même et surtout en temps de crise. En effet, il constitue est un puissant levier de réengagement des collaborateurs, un vrai défi à l’heure actuelle ! Il fournit un cadre à l’intelligence collective qui émerge en réponse aux défis de la crise, et il constitue une approche agile qui permet de saisir rapidement les opportunités créées par la crise.

Pour que l’intrapreneuriat perdure, il faut imaginer d’autres modèles plus frugaux et agiles. C’est la démarche engagée par Sodexo depuis début 2021, une entreprise particulièrement touchée par la crise mais dont la direction est convaincue qu’il faut “ré-insuffler l’esprit d’entreprendre”. L’approche adoptée par Sodexo repose sur la création d’une communauté d’intrapreneurs et d’ambassadeurs. Côté VINCI, cela fait 6 ans qu’on a parié sur les communautés comme moyen pour former largement à l’innovation, faire émerger des projets et les flécher vers le bon parcours de développement (intrapreneuriat ou autre).

La création de communautés au sein des entreprises a le vent en poupe et ces entreprises ne sont pas les seules à s’engager dans cette démarche. makesense, leader dans la création et l’animation de communautés met ses compétences à la disposition des entreprises et les aide à mettre en place et à animer des communautés en lien ou non avec l’intrapreneuriat. Depuis la crise, l’institut de l’intrapreneuriat préconise également la mise en place de communautés pour pallier les faiblesses des programmes et assurer à l’intrapreneuriat un fort ancrage dans l’organisation.

Dans cet article, nous allons voir comment les communautés peuvent contribuer concrètement et de différentes façons au succès de l’intrapreneuriat. Mais tout d’abord, quelques mots sur les communautés corporate. Elles consistent en un groupe de collaborateurs et collaboratrices réunis autour d’un objectif commun. Les communautés les plus fréquentes ont pour mission la transmission d’informations (ex : veille sectorielle, formation), la transversalité inter-services autour d’une thématique (ex : cercle des référents handicap), le partage de valeurs ou centres d’intérêts communs (ex : le club écologie, le club des parents) ou l’innovation interne (ex : groupe de créativité sur l’économie circulaire). L’adhésion au collectif peut se faire de trois manières : sur candidature, sur nomination (du manager ou des pairs) ou, le plus souvent, de manière spontanée.

La communauté d’intrapreneuriat frugal : l’exemple de Sodexo

La mise en œuvre de l’intrapreneuriat chez Sodexo, accompagnée par l’Institut, a démarré en janvier 2021 avec la constitution d’un groupe de travail d’une douzaine de managers répartis sur tout le territoire français. Ces personnes ont en commun leur posture intrapreneuriale et l’envie de s’investir dans une nouvelle démarche. Ensemble, elles ont défini les conditions à réunir pour que l’intrapreneuriat puisse fonctionner et s’adapter au contexte de l’entreprise (appui de la direction, financement, processus, etc.). Ces premiers travaux leur ont permis de se constituer en communauté et de découvrir en le vivant le fonctionnement d’une communauté corporate. Les membres ont ensuite identifié des premières idées de projets business à lancer, ils en ont sélectionné trois et participé à des ateliers (design thinking, lean startup) pour acquérir les méthodes leur permettant de développer ces projets en mode agile. La mini-communauté nouvellement constituée s’est alors donné deux grandes missions : 1) elle doit identifier des projets et des porteurs de projets, leur permettre de présenter leur idée, les sélectionner et les aider à accéder à des ressources et 2) ses membres doivent être des ambassadeurs de l’intrapreneuriat, communiquer ses valeurs, exemplifier ses postures et recruter de nouveaux membres.

Ce modèle a plusieurs avantages : tout d’abord il est très frugal. La communauté se charge de repérer des projets, de les sélectionner et de communiquer autour de l’intrapreneuriat. Aucune dépense n’est engagée dans les étapes amont d’identification des projets et de première sélection. Seuls les projets pré-sélectionnés sont accompagnés et financés. Un autre avantage est que le recrutement des intrapreneurs s’effectue au fil de l’eau et en fonction des ressources (temps, argent) disponibles. Autre avantage, la communauté est profondément enracinée dans l’organisation, elle fonctionne en réseau et mutualise les problèmes et les opportunités.

Après dix mois de fonctionnement en mode informel, les principaux défis des intrapreneurs Sodexo sont :

1) de faire vivre la communauté dans la durée, ce qui requiert l’identification et la formation d’un “community manager”,

2) de donner de la visibilité à la communauté et de la faire grandir

3) d’obtenir le soutien pérenne de la haute direction.

La communauté d’innovation “tout-en-un” : l’exemple de VINCI

Depuis 2015, la communauté ecowork rassemble au sein du Groupe VINCI les collaborateurs et collaboratrices passionnés par les enjeux de l’éco-construction et des infrastructures durables. Pour un géant industriel de près de 220 000 collaborateurs, le défi initial de cette communauté est de taille : acculturer largement les équipes aux problématiques environnementales et aux solutions existantes (ils visent 50% des collaborateurs) et stimuler les passages à l’action (dont l’intrapreneuriat) !

Tout démarre par la rencontre entre des salariés et des chercheurs du laboratoire interne de l’entreprise (Lab recherche environnement, co-porté par les écoles de ParisTECH). Ce début de communauté a d’abord eu pour vocation de familiariser aux enjeux environnementaux les individus volontaires, curieux et impliqués. Bref ceux qui se portaient volontaires pour venir à des événements (sessions de partage, conférences inspirantes…) en plus de leur travail. Aujourd’hui, la portée et le public cible sont beaucoup plus larges : en plus de ces temps de connexion et d’information, la Direction Environnement organise des parcours de formations à destination de tous les niveaux de l’entreprise (managers, cadres, employés ainsi que des formats accessibles aux salariés sur chantiers). Objectif : diffuser un socle de connaissances environnementales à l’ensemble des salariés.

Une fois cette base commune acquise, on passe à l’action. Là encore, plusieurs voies sont proposées :

  • Devenir “Booster” et mobiliser ses collègues, via un programme de formation à la sensibilisation et à l’animation de micro-communautés internes
  • Devenir intrapreneur ou idéateur en proposant dans la communauté des idées ou projets en lien avec l’environnement et en fléchant ensuite ces idées vers des parcours d’intrapreneuriat chez Léonard (programme d’incubation interne) ou le Prix de l’Environnement (tremplin d’innovation), qui aident les projets à se structurer et se déployer
  • Devenir ambassadeurs en aidant à la réplication de projets dont l’efficacité a été démontrée, les porteurs de projets prennent alors un nouveau rôle et sont formés et outillés pour répliquer leurs initiatives.

Cette communauté est un exemple d’un modèle “tout-en-un” qui permet d’aller de l’acculturation des collaborateurs (à l’intrapreneuriat, à l’innovation, à une thématique) au déploiement de projets en s’appuyant sur leurs envies et en utilisant les programmes existants (Leonard, VINCI Academy…). Cela permet aussi d’ajouter au fil de l’eau des briques permanentes ou temporaires (appel à projet thématique, formation spécifique etc.) car la communauté entretient un vivier de personnes formées et intéressées par les sujets d’innovation qui peuvent être sollicités de manière ad hoc pour relayer un nouvel appel à projets, organiser des ateliers d’idéation, proposer des idées, orienter les porteurs de projets etc.

Alors on ferme les programmes d’intrapreneuriat pour lancer une communauté d’innovation ? Pour vous inspirer, être formé, partager avec d’autres responsables de communauté, rejoignez le Club des communautés ou prenez rendez-vous avec l’équipe de l’Institut de l’intrapreneuriat pour adapter votre programme.

Cet article a été écrit en collaboration avec Lola Virolle, co-directrice de l’incubateur et directrice des programmes d’intrapreneuriat et Open Innovation à makesense.

Professeure de stratégie à emlyon business school depuis plus de vingt ans, Véronique comprend et analyse les leviers organisationnels pour déployer l’innovation et l’esprit d’initiative dans les entreprises. Intrapreneure, elle fonde au sein d’emlyon l’Institut de l’Intrapreneuriat pour structurer et partager les savoirs et développer un écosystème d’experts sur le sujet.

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