On vire bien les robots aussi

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4 min readMay 10, 2019

Combler le fossé entre la recherche et la vie réelle en intelligence artificielle, tel a été le thème de l’événement qui s’est tenu au campus parisien d’emlyon business school, le 16 avril dernier. Démystifier l’IA et montrer qu’elle peut avoir un visage humain seront essentiels pour atteindre justement cet objectif : créer de meilleures expériences utilisateur par l’interaction avec de nouvelles intelligences.

Si l’IA peut paraître monolithique, elle est différente selon le lieu où elle se trouve, comme l’a souligné Grégory Desfosses, Chief Digital Officer chez BNP Paribas Personal Finance. « L’IA n’est pas la même au Brésil qu’en République tchèque. Il faut respecter le contexte local. Sinon, la situation peut s’avérer très délicate. »

C’est ce que montrent, par exemple, les différentes réactions des clients face aux robots de service dans les hôtels. Margherita Pagani, professeur de marketing digital et directrice de l’AIM Research Center for Artificial Intelligence in Value Creation d’emlyon business school, a présenté une étude révélant que la crainte de la destruction d’emplois serait la principale raison pour laquelle certains clients sont prêts à payer davantage pour un service d’hôtel assuré par un être humain.

On vire bien aussi les robots

D’autres clients choisissent le robot pour sa plus grande fiabilité ou par curiosité. Les attitudes changent selon les pays. Les clients des hôtels internationaux ont souvent une approche ‘cognitive’ : ils veulent en savoir plus sur le robot en interagissant avec lui. Les clients japonais, eux, ont une vision spécifiquement ‘hédoniste’ : ils veulent savoir si le robot peut être amusant.

Pour le moment, ce n’est vraiment le cas, apparemment. Margherita Pagani a signalé plusieurs rapports selon lesquels un hôtel au Japon avait dû, cette année, se défaire de la moitié de ses robots, car ses clients s’étaient plaints du service. Les clients des hôtels sont plus exigeants à l’égard des robots ; ils ne tolèrent aucune erreur. Mais les robots reviendront et feront mieux la prochaine fois. Bart Larivière, professeur associé de marketing à l’Université KU Leuven, a indiqué qu’il existait actuellement de nombreux robots de service ; le tout est de choisir les meilleurs.

Le raisonnement stratégique de l’IA est de s’améliorer

Les machines dotées d’intelligence artificielle ont progressé. Elles ont d’abord battu les meilleurs joueurs de jeux à information parfaite, comme les échecs ou le go, puis ceux de jeux à information incomplète, comme le poker. En 2017, deux machines ont été capables de battre à plate couture une équipe de joueurs de poker professionnels. L’IA peut, dans certains cas, avoir de plus grandes capacités de raisonnement stratégique avec des informations imparfaites que les êtres humains. Le logiciel d’IA utilisé pour battre les pros, DeepStack, a gagné en apprenant au fur et à mesure. Il n’a calculé que quelques coups d’avance, plutôt que la partie toute entière.

Malgré cela, il est peu probable que l’IA devienne capable d’imiter ou de répliquer les processus de la pensée humaine. Comme l’a signalé Eric Farro, Eco system and Business Developper chez Orange, nous en savons nous-mêmes peu sur le fonctionnement du cerveau humain. Pour l’instant, l’IA « n’a pas d’émotions, pas de contexte, rien ».

S’affranchir des écrans

L’IA peut néanmoins rendre nos environnements plus humains. Yves Lostanlen, Head of Europe de la société canadienne Element AI, considérée comme la plus grande startup IA du monde, a estimé que des valeurs comme la liberté et l’inclusion pourraient et devraient être intégrées dans la technologie. Yihyun Lim, directrice du Design Lab au MIT, a indiqué qu’une « IA ‘bienveillante’ serait sur le point d’avoir le même effet que la machine à laver en termes de libération.

« Contrairement aux valeurs, la technologie peut évoluer très vite ». Auparavant, la cheminée était l’espace central de la maison autour duquel la famille se réunissait. Au XXe siècle, elle a été remplacée par la télévision dans les pays développés. L’IA pourrait créer de nouveaux espaces au sein de la maison, à l’ère d’une solitude accrue. La clé est « d’utiliser les surfaces comme un moyen de communication ».

L’IA s’invite dans notre vie quotidienne

Yihyun Lim a évoqué le potentiel des systèmes d’éclairage pilotés par l’intelligence artificielle, dont la fonction est d’accompagner et de protéger les personnes en milieu urbain. Ces systèmes s’appuient sur des capteurs intégrés pour connaître progressivement nos habitudes quotidiennes. Ils pourraient nous inciter, bien mieux que des notifications, à faire une pause et à lever les yeux de l’ordinateur.

Les personnes atteintes de démence pourraient rester plus longtemps à domicile grâce à un système qui connaîtrait leurs habitudes quotidiennes et leur rappellerait l’heure de prendre leurs médicaments. L’abandon de l’écran au profit de surfaces comme les matériaux électroactifs ou les dispositifs à activation vocale, pourrait changer considérablement leur qualité de vie, avec un éclairage intérieur qui s’adapterait en douceur aux activités détectées.

La maladie d’Alzheimer est la forme la plus commune de démence. Le nombre d’Américains qui en souffrent est estimé à 5,7 millions. Les études menées au Lighting Research Center du Rensselaer Polytechnic Institute dans l’État de New York indiquent qu’un éclairage simulant l’alternance jour-nuit pourrait améliorer le sommeil et l’humeur de nombreux malades d’Alzheimer. Les problèmes de comportement et de sommeil sont les principales raisons pour lesquelles ces patients sont placés en établissement. Et il a été démontré qu’un éclairage intelligent pourrait entraîner une baisse significative des troubles du sommeil, de la dépression et de l’agitation. Ainsi, l’IA pourrait permettre à un plus grand nombre de patients de vivre plus longtemps chez eux.

David Whitehouse & Timothee Barriere

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