AdopteUnMec, la propagande de l’homme objet

Cette année, AdopteUnMec souffle ses 10 bougies. Avec plus de dix millions d’abonnés dont 20% à Paris, il est considéré comme le site de rencontres préféré des Français d’après le magazine best-rencontre. Son succès? Exploiter le filon d’émancipation des femmes en leur présentant des hommes-objets à disposition. La rencontre est alors vue comme « une bonne affaire » avec pour but d’amuser la “génération Y” et de faire le buzz. Or, cette instrumentalisation marketing du féminisme peut gêner.

AdopteUnMec revendique ce marketing de par son slogan « hommes-objets à câliner », mais également par son logo emblématique représentant une femme poussant un caddie de supermarché avec dedans… un homme en guise de marchandise. Sans compter un champ lexical généralement utilisé dans les publicités télévisées. Mais comment une marque infligeant une telle image de l’homme est-elle si populaire auprès des deux sexes?

Donner le pouvoir aux femmes, ça marche. On constate en effet un retour de la vague féministe. Auparavant, les sociétés occidentales accordaient un traitement favorisant les hommes au détriment des femmes. Mais ces sociétés ont subi d’importants changements sociaux, notamment au sujet de l’égalité des sexes. Cela a permis aux femmes de s’affirmer en tant que femmes modernes. Le supermarché virtuel de la drague l’a bien assimilé et profite de cette conjoncture pour créer le e-girl power de la séduction, avec une devise on ne peut plus claire: « Honneur aux dames ».

C’est en entrant sur le site que l’on découvre le féminisme 2.0 de l’amour. On y trouve des hommes qualifiés de « promos du jour» ou de «produit de la semaine». Des formules chocs « Aujourd’hui, “liquidation totale des frisés. Tout doit disparaître !”, “Un moustachu au panier, un barbu offert” et la douteuse catégorie roux “Spécial carotte, cultivez-les avec soin”. Quant à l’arrivage de “geeks”, il est tout simplement personnifié par un jeune Asiatique à lunettes.

En 2012, l’association Osez le féminisme s’était déjà insurgée contre ce concept, dans un article intitulé « AdopteUnMec, l’invertion des rôles, mon œil !». La journaliste Audrey Pulvar s’est également manifestée à travers un Tweet prônant l’égalité hommes-femmes.

Malgré de nombreuses réticences, les trentenaires raffolent de ce site autoproclamé « anti-sérieux », « anticonformiste », et « ludique et décomplexant ». Étonnement, il y autant de femmes inscrites que d’hommes. Encore plus curieux, 30000 garçons sont prêts à débourser 30 euros par mois pour s’auto étiqueter sur le marché de la rencontre. En clair, payer pour se faire « consommer ».

Le concept du site de rencontre a énormément plu aux femmes. Flattées, elles se sont inscrites en masse. De cette vague d’inscription s’ensuivit un nombre important d’inscriptions masculines. En effet les hommes ont vu en ce site une occasion de rencontrer un maximum de femmes. Le site ne pouvait que fonctionner, il est maintenant 4ème des sites français en terme de visiteurs et génère 4000 inscriptions par jour.

Le féminisme est avant tout basé sur l’égalité des sexes. Or, dans le cas d’AdopteUnMec, on peut parler de « féminisme extrémiste ». Dans la logique sociétale actuelle, une marque qui se baserait sur la femme-objet ne générerait pas l’amusement de la génération Y ou bien un buzz positif. Ni les hommes ni les femmes ne méritent d’être considérés comme de vulgaires marchandises.

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