« Yes I am » not : et vous ?

Le retour en beauté de la marque Cacharel

Kenza Agnaou
4 min readMar 4, 2018

Janvier 2018 symbolise le grand retour de la maison Cacharel. En effet, la marque de prêt-à-porter et de parfumerie a annoncé la sortie de son nouveau parfum « Yes I am ». Cacharel n’a pas hésité à employer les grands moyens pour sa communication. Présence digitale importante et surtout, partenariats avec les maîtres du monde 2.0 : les influenceurs. Plus particulièrement les influenceuses, en effet, « Yes I am » n’est pas un simple parfum, il est le symbole même de l’indépendance des jeunes femmes actuelles. La fragrance, dont l’essence même est de jouer sur les paradoxes, mêle des senteurs douces avec les notes de framboise et mandarine, contrastées par la puissance du bois de santal. Le message semble clair : le parfum caractérise les différentes facettes des femmes, à la fois douces et fortes. Ce dernier est d’ailleurs contenu dans un packaging qui n’a pas été choisi au hasard : un tube de rouge à lèvres défini comme « l’objet le plus emblématique d’une femme » par la marque.

Animée par l’envie de représenter les jeunes femmes libres d’aujourd’hui, Cacharel propage son discours par le biais des influenceuses, avec lesquelles la marque est en partenariat.

Le flacon a envahi notre feed Instagram. En plus d’être plus qu’active sur les réseaux sociaux, la marque a organisé un évènement « Yes I am » à Paris, le 8 février. Soirée durant laquelle Izzy Bizu, l’égérie du parfum, a interprété sa chanson « White Tiger », hymne du nouveau produit phare de la maison, face aux invités de la soirée. Parmi eux, on compte d’anciennes Miss France, notamment Iris Mittenaere et Malika Ménard, des youtubeuses comme Horia ou encore ChloéB, possédant toutes un compte Instagram suivi par des milliers de followers.

Une stratégie qui peut s’avérer maladroite

Bien que la stratégie de communication soit indéniablement efficace, n’y-a-t-il pas une certaine limite dans la représentation de la féminité que veut incarner Cacharel ? Est-ce que le message que tente de faire passer la marque n’est pas un peu (voire trop) superficiel ? Une femme indépendante et puissante n’est pas nécessairement une femme qui ose aborder un « beau » brun au restaurant ou encore qui monte sur le toit d’un building pour en admirer la vue, comme on peut le voir dans le spot publicitaire. Aujourd’hui, le combat des femmes est bien plus profond, authentique, et surtout, il est basé sur des situations quotidiennes réelles et urgentes que toutes les femmes ont déjà vécu ou seront amenées à vivre. On pourrait voir une forme réductrice dans la communication de Cacharel, sûrement involontaire mais pourtant prégnante.

« Le symbole de la nouvelle femme d’aujourd’hui : indépendante, sensuelle mais aussi sexy ».

Une simple phrase qui nous fait retourner des décennies en arrière, quand la femme n’était qu’objet de désir de l’homme, rien de plus. De plus, lors de la soirée évènement pour le lancement du nouveau produit, nous pouvions apercevoir, parmi les invités, des femmes telles que Nabilla Bennatia, Ayem Nour, Iris Mittenaere, entre autres : des jeunes femmes à la plastique parfaite vivant de leur médiatisation à la télévision, et qui alimentent le culte de la parole vide, de la beauté superficielle et de la nudité.

La femme, en 2018, n’est pas qu’une enveloppe corporelle, contrairement aux influenceuses et youtubeuses qui détournent le fond du combat : elles utilisent leur notoriété pour servir des causes futiles au lieu de véhiculer un vrai message. Pourtant, on ne peut pas vraiment leur reprocher quoique ce soit : les femmes ont le droit de parler de sujets intelligents comme de thèmes dérisoires. On ne devrait pas être plus exigeants à cause de leur sexe, sinon, cela revient à creuser les inégalités de façon plus insidieuse qu’une remarque sexiste directe et explicite. En revanche, on peut montrer du doigt les marques qui, au lieu de s’intéresser à des personnes qui ont moins de followers sur les réseaux mais qui délivrent un vrai message, préfèrent placer la futilité sur un piédestal. La marque a peut être fait un faux pas en invitant, et de ce fait, en associant ces femmes à toutes les femmes, et en les plaçant en « modèles » pour toutes les jeunes filles. Pourquoi ne pas inviter des femmes qui inspirent de par leur parcours réellement indépendant, puissant et courageux, qu’il soit professionnel ou personnel ? Des femmes qui ont construit d’elles-même leur empire professionnel, qui se sont fait leur place dans des secteurs « réservés » aux hommes, des femmes dont la carrière repose sur l’aide humanitaire, des femmes qui ont fait le choix de ne pas travailler et de s’occuper de leur famille, des femmes qui combattent la maladie, que ce soit la leur ou celle d’un proche… finalement, des femmes qui font des choix et qui représentent la lutte pour leur indépendance en faisant preuve de force et de détermination. On ne ne manque d’exemples à donner aux plus jeunes : pensez-y un instant, on a tous en tête cette femme, peu importe qui elle est et ce qu’elle a fait, qui nous donne l’envie et la motivation d’aspirer à de beaux parcours de vie et à marquer l’Histoire. A notre façon. Sans rouge à lèvres.

Kenza AGNAOU

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