Voyager seul, le nouveau rite de passage avant la vie professionnelle ?

Etat des lieux

Clara Abitbol
MASTER DMC : Digital Médias Cinéma
5 min readJan 6, 2018

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Nouvelle tendance de ces dernières années, le voyage à l’étranger pendant quelques mois, l’année de césure, devient de plus en plus populaire auprès des étudiants français. Faire une pause dans les études et aller découvrir le monde semble être pour nous un moyen de se ressourcer avant d’affronter la recherche d’emploi.

Auparavant mal vu par les professionnels qui y voyaient l’image du jeune un peu perdu, qui ne sait pas ce qu’il veut et qui préfère fuir plutôt que de se poser des questions « d’adulte », on remarque qu’aujourd’hui les esprits changent et que ce genre d’expérience est de plus en plus appréciée et même demandée.

Même l’éducation supérieure s’y est mise. Au-delà des programmes Erasmus, quasiment toutes les écoles de commerce proposent une année à l’étranger et la tendance commence à toucher tout le secteur. Mais ici nous nous concentrerons sur le voyage seul sans structure universitaire.

Au-delà du bénéfice personnel et professionnel de ce genre d’expérience, que nous développerons un peu plus loin, il est tout d’abord important de noter que tout ceci est possible grâce à une mondialisation qui nous permet à nous, citoyens européens de passer les frontières très aisément. Les visas sont généralement faciles à obtenir, pour certains pays il n’y en a même pas besoin. D’autre part, il existe aujourd’hui le working holiday ; qui donne la possibilité au détenteur de travailler dans un pays donné généralement pour une durée de un an. Un argument économique indéniable pour l’étudiant moyen qui n’a habituellement pas les fonds nécessaires pour tenir un an complet sans travailler ou n’a pas forcément les parents pour assurer ses arrières.

Bien que cette forme de visa ne soit pas présente dans tous les pays, il existe une multitude d’alternatives si vous n’avez pas le droit de travailler dans le pays que vous visitez. Par exemple, certains sites comme woofing ou workaway proposent des listes d’hôtes qui vous accueillerons chez eux en échange de quelques heures par jour de volontariat à leur domicile ou dans leur commerce contre un endroit où dormir et parfois même les repas. Vous avez ainsi accès à une multitude d’emplois différents allant de la nounou, au prof de langue, au personnel d’auberge de jeunesse en passant par des jobs de pêcheur sur les côtes irlandaises, éleveur de moutons en Islande ou tailleur de bambou au Japon. Vous découvrez des professions nouvelles qui pourraient vous servir plus tard, qui ajouteront un petit plus exotique à votre profil, ou qui constitueront simplement un bon souvenir.

Un voyage personnel qui prépare au professionnel

Le fait de voyage seul ou en tout cas de faire la démarche de partir seul est primordial. A l’inverse du confort et du côté rassurant de partir avec un ami, voyager seul demande un réel effort de sociabilité, de planification et une certaine forme d’audace.

Loin de l’image stéréotypée du backpaker en sarouel, tapis de yoga sous le bras et petit tatouage thaïlandais au poignet, une telle entreprise demande un set de qualités et d’aptitudes que vous serez forcément amenés à développer. Des compétences que vous pourrez ensuite faire valoir auprès d’un possible employeur.

Parlons d’abord de l’organisation ; bien que vous soyez peut être la personne la plus désorganisée du monde, vous allez devoir vous y mettre pour pouvoir voyager sereinement. Il faut trouver le bon visa, faire des vaccins si vous partez dans un pays exotique, trouvez les logements sur place, savoir comment se déplacer etc. Ça tombe bien, les recruteurs adorent les gens qui savent planifier, qui ne sont pas perdu face à un calendrier. Votre capacité d’anticipation est un plus a absolument faire valoir lors d’un entretient.

Vous devenez également inventifs et réactifs ; on le sait tous un voyage, sauf si vous allez en club, ne se passe jamais comme prévu. On tombe malade dans les endroits les plus reculés où il n’y a pas l’ombre d’un médecin, on se perd dans le fin fond de la montagne, on arrive dans une ville où tous les logements sont occupés et bien d’autres. Vous vous retrouverez forcément dans une situation de ce genre mais ce qui comptera c’est comment vous réussirez à vous en sortir. Savoir gérer le stress, toujours avoir une solution sont des qualités plus qu’appréciées. Sur une note plus personnelle, même si sur le moment vous aurez envie de vous cacher dans un coin et appeler votre maman, à terme ces moments délicats constitueront vos souvenirs les plus drôles.

Vous deviendrez également bien plus sociable (si vous ne l’êtes pas déjà) et découvrirez des facettes de votre personnalité que vous n’aviez jamais soupçonnées. A part si vous décidez de faire l’ermite en Alaska avec pour uniques compagnons votre tente et votre réchaud, le fait de partir seul vous force à rencontrer les autres. Qu’ils soient habitants du pays que vous visitez ou des voyageurs comme vous, vous verrez passer une multitude de personnalités diverses et variées avec des rencontres incroyables, qui n’auraient jamais pu avoir lieu autrement, et parfois d’autres beaucoup moins intéressantes. L’important est que vous savez vous sociabiliser, vous êtes ouverts aux autres.

En faisant ce voyage, vous allez vous confronter à des cultures parfois très éloignées de la vôtre, vous serez par moment choqué, surpris, amusés, vous apprendrez les codes et normes des autres et vous partagerez les vôtres. Dans un monde où le frontières entre les pays sont aujourd’hui si fines, où l’on reçoit des informations du monde entier, il est primordial d’apprendre à connaître ceux avec qui nous vivons sur cette planète. Cela vaut pour vous-même mais également d’un point de vue professionnel où l’on peut voir des entreprises avec des bureaux dans le monde entier et, où les stratégies de communications sont globales. Connaître la culture de l’autre, c’est savoir communiquer avec lui.

Enfin, vous apprendrez à vous connaître bien plus profondément qu’à l’abri dans votre vie de tous les jours. Vous serez souvent seul face à vous-même tout au long de ce voyage, vous découvrirez ce que vous pouvez ou non accepter, vous grandirez pour ainsi dire. Vous arriverez dans la jungle professionnelle armé et droit dans vos bottes.

Une tendance qui nous homogénéise ?

Bien sûr si tout le monde part faire son année à l’étranger, que cela devient un passage « obligatoire » avant la sortie des études, que cela s’institutionnalise, nous risquons fortement de nous retrouver avec des profils au final très similaires. Mon conseil est donc celui-ci, faites ce voyage comme vous l’entendez. Prenez les conseils, avis divers et faites en ce que vous voulez. Le plus important est votre expérience, avant de penser à la justifier auprès des professionnels. C’est un périple personnel et émotionnel avant tout. Voyager pour voyager, pour avoir quelque chose d’exotique à afficher sur le CV ne vous apportera rien à terme.

D’ailleurs libre à vous de ne pas le faire et de ne pas en avoir envie. Le tout est de prendre une décision en accord avec soi-même, car tout le monde n’est pas équipé pour une entreprise de ce genre.

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