Colorado, une excursion en bordure du Midwest

Nil sine numine, “Rien sans la Providence” est la devise de l’état du Colorado. Mon périple de 82 jours devait se contenter d’explorer le Midwest. Mais très vite, on m’a vanté la beauté du Colorado.

Luc Landrot
A European lost in the Midwest
6 min readApr 19, 2017

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Garden of the Gods, Colorado Springs

Depuis tout petit je caressais le rêve d’explorer cet état sauvage et civilisé en même temps. Habitué de la série Docteur Quinn Femme médecin (on n’avait pas le droit de regarder très souvent la télé quand j’étais petit) qui retrace la vie de ses pionniers, mais surtout fan de Stargate SG1, je me devais de me rendre à Colorado Springs pour voir les lieux de mes propres yeux. Mon amour des Alpes et des montagnes n’y est probablement pas étranger non plus.

Alors si proche de mon périple, à l’échelle américaine, j’ai décidé d’y faire une excursion. Rien de tel pour prendre du recul sur le Midwest, sur sa place dans les Etats-Unis, sur ses différences culturelles avec les autres parties du pays-continent, que d’y sortir brièvement pour pénétrer en territoire très différent. Moins ancien, très dynamique économiquement et démographiquement depuis une période récente, très touristique, ses caractéristiques tranchent avec celles du Midwest.

Dès le Kansas on s’aperçoit que la destination est populaire. Les SUV et autres pick-up affluent sur l’Interstate 70 de l’Oklahoma, du Missouri voire de plus loin encore, armés d’équipements de sports d’hiver, vers le nouvel eldorado du 21ème siècle : les stations de ski.

Quand on pénètre dans l’état par l’Est, la différence avec le Kansas est subtile. Ce sont toujours des grandes plaines d’herbe (jaune et desséchée à cette saison) mais on sent que le climat est de plus en plus sec et que l’air de rien, très lentement, on prend de l’altitude même si les montagnes sont encore loin et le paysage globalement plat. On se sent sur un plateau dominant les grandes plaines que j’ai mis des heures à traverser en voiture. Il faut 8 heures pour relier Kansas City à Denver. Huit heures de voiture sans traverser de ville significative. Huit heures de paysages semblables.

Le Welcome Center aux frontière du Colorado annonce la couleur.

Ici, on pénètre en territoire liberal (dans le sens anglais) où les prospectus informent des règles à respecter lors de la consommation de cannabis, récemment autorisé.

Le Colorado, ou plutôt Denver et ses zones touristiques, c’est un ilot progressiste au milieu d’états plus conservateurs les uns que les autres (Kansas, Oklahoma, Utah, Nebraska…). Le Colorado, c’est aussi cette rencontre entre la plaine et la montagne. Cette montagne qui marque une barrière naturelle entre la côte ouest et le Midwest. Cette montagne qui a offert autrefois de grandes quantités d’or et qui offre désormais de grandes quantités de neige aux touristes affluant des quatre coins du continent.

Alors au hasard des échappées, on croise des villes fantômes qui ont survécu juste le temps d’extraire les richesses du sous-sol ou des mines abandonnées. Aujourd’hui il ne reste plus qu’une seule mine encore exploitée près de Colorado Springs, à Cripple Creek.

Colorado Springs, comme Denver, se niche au pied de la chaîne. La dominent le Pikes Peak et Cheyenne Mountain. Le premier, 4302 mètres, est le plus haut du secteur. Et il se visite. Vous me direz “oui normal, tu peux randonner jusqu’au sommet comme toutes les montagnes”. Oui mais non. Ici il y a une route qui mène au sommet. Juste pour profiter de la vue, on peut prendre son 4x4 (moyennant le paiement d’un droit d’entrée de 10$ quand même, on est aux US, on paye pour accéder à la nature) et conduire jusqu’au sommet. Sinon, il existe aussi une sorte de funiculaire.

Pikes Peak enneigé

La deuxième montagne, bien plus modeste, abrite la base de l’air force américaine de Cheyenne Mountain. Connue des fans de Stargate pour abriter la porte des étoiles, elle est entièrement construite dans les entrailles du mont et sert de centre de commandement bunkerisé pour le continent en cas d’attaque nucléaire. Surtout prévue pour la Guerre Froide, elle sert aujourd’hui davantage de centre d’entraînement, faisant écho à la célèbre Air Force Academy s’étendant sur plusieurs hectares au nord de la ville. D’autres films comme Independence Day l’utilisent également pour les besoins de leur scénario.

Cheyenne Mountain depuis le Cheyenne Mountain State Park

Le Garden of the Gods est un site naturel exceptionnel en banlieue de Colorado Springs. Et il est gratuit en libre accès ! Son dernier propriétaire privé a effet légué ces terres à l’état en échange qu’il demeure à jamais ouvert gratuitement au public. Beau geste qui nous permet de profiter de ces roches rouge vif sculptées par la nature.

La route de l’ouest en partant de Denver est étonnante. L’autoroute monte en pente raide, quasiment en ligne droite, passant de 1600 mètres à 2200 mètres en l’espace de quelques kilomètres seulement. L’interstate 70 culmine au passage du tunnel Eisenhower à 3400 mètres d’altitude, le plus haut tunnel autoroutier des Etats-Unis et l’un des plus hauts au monde. Il marque le passage de la Continental Divide, limite du partage des eaux entre l’Atlantique (Golfe du Mexique) et le Pacifique.

Autour de ce point, les stations de ski pullulent. Winter Park ou, plus éloignée, Aspen, sont parmi les plus connues. Je me suis pour ma part rendu à Breckenridge. C’est joli, c’est touristique, il y a de l’animation dans la rue principale et des pistes à proximité. Mais pour les fans de ski, ce n’est pas la panacée et je comprends maintenant pourquoi des Nord-Américains préfèrent venir skier dans les Alpes. Ici, les pentes ne sont pas très raides, les pistes éloignées du centre ville et la neige pas très abondante pour la mi-mars.

Dans les rocheuses, on y trouve aussi des villes historiques témoignant des premiers habitants dans les années 1860.

Et même si l’immigration française à cette époque est quasiment inexistante, on tombe de temps en temps sur les traces d’un pionnier français.

L’un des avantages de vivre à Denver, c’est qu’on peut très rapidement se retrouver dans des étendues sauvages et désertes, au milieu des montagnes et des forêts de sapins. Quelques rares habitants habitent tout de même cachés des regards au bout de ces routes pittoresques.

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Luc Landrot
A European lost in the Midwest

Auteur de science-fiction, administrateur de l’Union des Fédéralistes Européens — France, ingénieur, Européen dans l’âme et dans la vie. #Subsidiarité