C’est pas grave

Félix-Antoine Huard
Monsieur et Madame Tout-le-monde
3 min readJan 14, 2016

Je suis plutôt du genre organisée dans la vie. Style comme que quand j’ai de l’insomnie, je me fais des to-do lists pour me sentir mieux, que mes menus sont soigneusement préparés avant de mettre le pied à l’épicerie et que j’ai un tableau Pinterest avec des trucs pour tout organiser de A à Z chez nous.

C’est donc pas peu dire que lorsque je pars en voyage, c’est à peu près la même histoire. Je fais des pratiques de bagages pour être certaine que tout rentre dans mon sac pis j’ai un Google doc pour suivre mon itinéraire (en plus d’une application que j’aime bien qui s’appelle Tripit et qui synchronise ta boîte de courriel pour concentrer toutes tes réservations de vols, de transports et d’hébergements au même endroit).

L’affaire, c’est que t’as beau essayer de tout prévoir, la vie, c’est pas comme ça que ça marche.

Comme dans n’importe quoi, il y a une marge d’erreur. Tu vas t’égarer, tu vas oublier quelque chose chez vous, tu vas perdre ton téléphone dans un club en Italie parce que t’es trop soûle (une bonne histoire pour un prochain article peut-être), mais vous savez quoi? C’est pas grave.

Quand je suis allée au Portugal avec une amie, on partait de Porto pour aller à Lisbonne. Notre trajet comprenait un transfert de train à la gare secondaire de Porto. Tout allait sur des roulettes, sauf que je me suis endormie dans le premier train. Arrivées à notre gare de transfert, mon amie me réveille en me demandant si c’était là qu’on débarquait. Oui, c’était là. Un peu paniquée et désorientée, je me dirige à l’arrière du wagon pour descendre, pour m’apercevoir que la porte est à l’avant. Mon amie descend, la porte se referme et je n’arrive plus à l’ouvrir parce que le train repart ! Elle me fait signe qu’elle va m’attendre sur le quai. La foule à l’air de trouver ça pas mal comique. Je me rassois, je descends au prochain arrêt pour revenir, ce qui bien sûr prend plus que les 15 minutes que nous avions à attendre entre nos deux trains. Une fois à la bonne gare, on vérifie les horaires de trains pour prendre le prochain. Quelle chance, il y en a un dans 45 minutes.

On attend une bonne heure au quai indiqué par l’affiche, puis soudainement l’indication de notre destination disparaît! Confuses, on se rend à l’intérieur et on tente de demander des comptes à un employé qui a un anglais approximatif et qui nous fait comprendre que le prochain est à 1 h 30 du matin (il est alors 21 h).

La mine un peu basse, on sort alors de la gare pour trouver de quoi se mettre sous la dent. On trouve un excellent restaurant de grillades (la grande force de la cuisine portugaise) qui ne coûte trois fois rien. Le ventre plein, on va acheter un paquet de cartes au dépanneur de la gare puis on s’installe à la terrasse d’un p’tit bar où il y a de la bonne musique et on invente une version alcoolisée du jeu golfe en buvant du vin cheap jusqu’à l’heure de notre prochain train. Le total de la facture pour 4 verres de vin, un café et des peanuts en écailles était de 2,8 Euros. Parle-moi d’un bon deal.

Bien sûr, comme la loi de Murphy est ce qu’elle est, ce n’était pas la fin de nos mésaventures. À Lisbonne, le chauffeur de taxi nous a déposées ailleurs que sur la rue indiquée et il y avait des squatteurs dans notre lit d’auberge de jeunesse. Mais tout compte fait, c’était quand même une bonne soirée d’anniversaire (parce que oui, c’était ma fête en plus).

On ne l’a pas nécessairement trouvée drôle sur le coup, mais dans le fond c’est l’histoire que j’ai le plus racontée en rentrant au bercail, parce que nos petites misères en voyage sont ce qui forme les meilleurs récits. Pas de péripéties, pas d’histoires.

C’est la leçon la plus importante que j’ai apprise au cours de ma dizaine de voyages. C’est ce qui fait l’aventure, et plutôt que de stresser avec ça, il faut embrasser cette réalité et en rire (éventuellement).

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