De retour à la maison — deuxième phase

Félix-Antoine Huard
Monsieur et Madame Tout-le-monde
3 min readOct 6, 2015

« Bon! Quand est-ce qu’on part en voyage? »

C’était la question à 100 piastres de Félix hier soir.

Évidemment, j’avais envie de répondre « DEMAIN! », mais la réalité, c’est que notre prochaine épopée sera en réalité une virée à Shawinigan pour le weekend de l’Action de grâce. J’ai hâte là — don’t get me wrong — mais c’pas tout à fait l’équivalent de Barcelone.

Je suis allée au lit un tantinet déçue et j’ai réalisé quelque chose : je suis en plein dans la deuxième étape de mon retour, la première phase s’étant terminée il y a quelque temps. Et cette seconde étape, elle fait mal pour plusieurs raisons :

L’excitation fait place à la monotonie

Soudainement, tes photos ne valent plus trop la peine de se retrouver sur ton mur Facebook (non mais y’a des limites à écœurer l’monde). Tes cadeaux ont tous été distribués et plus personne ne t’en parle. Et comble de malheur, tes beaux bracelets souvenirs sont décolorés et sentent le fond d’évier de vaisselle. Joie.

Tes responsabilités te rattrapent

En voyage, chaque minute rime avec aventure, découverte ou rencontre. À la maison, j’ai l’impression de tout faire pour garder un certain rythme d’exotisme, mais chaque jour, ma vaisselle sale me nargue et ma salle de bain me rappelle que je ne l’ai pas lavée depuis belle lurette. On se met à courir après le temps, mais c’est plus fort que nous, on le meuble à 95 % d’activités insignifiantes.

Tu peines à mettre des sous de côté

Je suis renversée par l’ampleur des dépenses des gens sédentaires. Tu as beau cuisiner avec seulement une casserole bossée et un peu d’huile d’olive dans les auberges, quand tu retrouves ton confort, il te manque toujours quelque chose : une spatule se détruit dans tes mains, ton ouvre-boîtes devient soudainement aussi coincé qu’Hermione à ses 11 ans et tu renverses immanquablement ton pot d’origan moulu sur ton plancher. Ensuite, tu réalises que tu es à court de nettoyant tout usage. Damn. Wal-Mart vient de s’enrichir de 30 $, tandis que ton voyage à San Jose vient de perdre une séance de surf.

Tu perds trop de temps à entretenir de la jalousie

Si tu n’es pas en route vers l’aéroport Montréal Trudeau à l’heure actuelle, quelqu’un l’est. Un de tes amis fait en ce moment ses valises pour la Thaïlande et ta voisine s’envole demain pour un échange étudiant à Sydney. Pis toi, si t’es freak comme moi, bien tu déprimes dès que tu vois apparaître leurs photos sur Instagram. Tu aimes, mais tu verses une larme en regardant ta pôle à rideau qui t’attends pour être installée.

Vous trouvez ça lourd? C’est vrai. Or, semble-t-il que la pluie est nécessaire pour que le soleil retrouve sa splendeur. Alors je vais laisser passer ces petits nuages, je vais me plonger dans des récits de voyage et apprécier chaque chose autour de moi : les couleurs de l’automne québécois, les sourires de mes amis, les soirées à écouter des films collée contre mon amoureux… Si j’étais toujours dans mes valises, une chose est certaine, je ne ressentirais pas le sentiment incroyable qui nous habite lorsqu’on planifie une prochaine aventure.

J’vais te tolérer, deuxième phase, mais juste parce que tu es celle qui me motive à repartir. En d’autres termes, je vais te tolérer, juste parce que tu es essentielle.

Pour se motiver :

“ Why do you go away? So that you can come back. So that you can see the place you came from with new eyes and extra colors. And the people there see you differently, too. Coming back to where you started is not the same as never leaving.”

Terry Pratchett

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