l’Énigme

Félix-Antoine Huard
Monsieur et Madame Tout-le-monde
2 min readNov 23, 2015

Découvrir le monde, c’est aussi prendre conscience du portrait de l’actualité géopolitique internationale. Peu élogieuse à bien des égards, elle met souvent en lumière une société estropiée.

Période sombre. Période lourde. Commencée depuis trop longtemps pour plusieurs ; depuis peu pour d’autres. La coupable, dans toute cette histoire — si elle peut se résumer en un mot : la haine. Arme de destruction massive, elle attaque ce qui pourrait s’avérer être le plus puissant en l’humain : sa capacité à aimer.

Aimer. Action, disposition, nécessité innées. Sentiment à la fois fluide et solide.

Aimer nous lie les uns aux autres ; l’amour est une colle. Il enlace, amarre, noue, mais ne peut fusionner deux parties. Il peut seulement réduire la distance qui les sépare. C’est que l’amour respecte qu’il y aura toujours deux touts distincts.

La haine, à l’inverse, ne tolère pas cette divergence. Elle refuse les seuils, étouffe la symbiose. Elle écartèle violemment et creuse une profonde tranchée entre elle et l’autre. Il faut beaucoup de colle pour réparer une crevasse qui se rend jusqu’aux limites de l’humanité.

Deux options s’offrent donc à nous : nous pouvons appréhender l’autre avec curiosité ou avec méfiance.

Je crois que les voyages nous enseignent cette première option.

La curiosité, vis-à-vis de l’autre, est un chemin qui peut mener à aimer sa différence. Il y a longtemps, j’ai lu La sagesse de l’amour, du philosophe Alain Finkielkraut. Il y écrit : « Aimer, c’est être tenu en éveil par une énigme ». Voilà. Le voyage nous tient en éveil par une énigme.

Jamais nous ne pourrons tout savoir, tout posséder de l’autre. Le voyage permet d’accepter l’inconnu, ce qui ne sera jamais soi, ce qui sera toujours étranger.

C’est ça, voyager. Incarner la curiosité. Apprendre à aimer l’impalpable et insaisissable parcelle de l’autre qui nous échappera toujours.

crédit photo : Fanny Allaire Poliquin

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