“Nous souhaitons rendre nos équipes autonomes en UX Research” Mathilde Gauthier, PayFit
PayFit construit un SaaS de gestion de paie et de RH. La start up a levé 70M€ en juin 2019 pour une valuation inconnue. Nous avons eu la chance d’interviewer Mathilde Gauthier, seule UX Researcher de PayFit dans le cadre de notre séries avec les meilleurs UX Researchers français.
Peux-tu nous raconter un peu ton parcours ?
Dans le cadre d’études en communication plutôt généralistes, j’ai effectué un stage au sein de la fondation Orange, qui finance notamment des projets numériques pour accompagner des enfants en situation de handicap. La majorité des projets financés n’était pas centrée utilisateur : les parents dont les enfants découvraient la version beta s’étonnaient que le service conçu soit parfois inutilisable par leur enfant, puisqu’il négligeait leurs spécificités.
Je me suis alors demandé comment on pouvait aider les gens à développer des produits numériques plus adaptés aux utilisateurs. J’ai eu la chance de découvrir le mastère User Experience à l’ECV Digital, par lequel j’ai prolongé mes études de deux années en alternance. Une partie de cette alternance s’est déroulée dans une SSII et c’est là que j’ai rencontré Léa Mendez qui allait devenir VP Design chez PayFit. Lorsqu’elle a commencé à monter l’équipe Design, elle m’a proposé de les rejoindre pour développer la User Research : c’est ce que je fais depuis juillet 2019.
Plutôt que de devenir le goulot d’étranglement des équipes, on a préféré rendre les équipes autonomes en recherche
Qu’est-ce qui a changé pour la UX Research chez PayFit depuis l’avènement du télétravail ?
La transition a été fluide : PayFit est disponible dans 5 pays et nous avions déjà l’habitude de faire de la recherche à distance pour rencontrer le maximum d’utilisateurs, sans contrainte de distance ou de temps. L’équipe design est basée en France mais nous ne voulons pas construire un produit qui ne convienne qu’au marché français : nous évitons de n’interroger que nos amis de la French Tech et nous sommes organisés pour faire toute la recherche à distance.
Aujourd’hui, parmi les 500 personnes qui travaillent chez PayFit, une centaine travaille sur le produit et il n’y a qu’un poste de User Researcher. Plutôt que de devenir le goulot d’étranglement des équipes, on a préféré rendre les équipes autonomes en recherche : celles qui disposent d’un.e Product Designers s’appuient sur leurs compétences, les autres piochent dans un ensemble d’outils et de templates mis à leur disposition pour faire leur discovery.
Quels sont les challenges que tu as pu rencontrer ?
Pendant la période de Covid-19, c’était plus compliqué de recruter les personnes en charge de la paie dans leur entreprise pour faire de la recherche. On savait que nos interlocuteurs étaient préoccupés par la santé financière de leur entreprise, c’était délicat de leur envoyer des mails pour les inviter à participer à de la recherche sur des sujets variés.
Et la dernière de nos trouvailles, capitale pour partager les données utilisateur récoltées par les différentes équipes, c’est Dovetail.
Quels outils utilisez-vous ? Quel est votre “stack” ?
En termes de méthode de recherche, on privilégie la simplicité pour que le maximum d’équipes soit fréquemment en contact avec nos utilisateurs : on se concentre sur les interviews, les tests utilisateur et les questionnaires. Ces 3 techniques génèrent déjà beaucoup de valeur.
Côté tooling, on utilise tous G Suite, Slack et Notion. Pour rencontrer des utilisateurs à distance, même lorsqu’ils sont peu à l’aise avec le numérique, je conseille Whereby : rien à installer, pas d’authentification, ça simplifie les échanges ! Pour générer des parcours ou des mind maps, Whimsical est très pratique et Miro est une version équivalente mais collaborative : parfaite pour analyser les retours en groupe. Pour l’étape de prototypage, les Product Designers travaillent maintenant sur Figma.
Et la dernière de nos trouvailles, capitale pour partager les données utilisateur récoltées par les différentes équipes, c’est Dovetail. Avec cet outil, on centralise tous les verbatims récoltés, on les tague avec des mots clé pour avoir une vue globale des sujets, pour mesurer le nombre de verbatim associés à un sujet, mais également pour justifier nos synthèses par des verbatim réels, plus convaincants que des « les utilisateurs nous ont dit que… ». Une équipe qui veut savoir ce que les utilisateurs pensent de sa fonctionnalité peut trouver des réponses en quelques clics, grâce aux recherches précédemment menées par d’autres équipes.
Comment communiques-tu l’intérêt de pratiquer la recherche utilisateur ?
Pour faire en sorte que chaque PayFiter comprenne, toutes les personnes qui rejoignent l’entreprise assistent à une présentation de 30 min sur l’importance du design, quelle que soit leur fonction. Parmi les personnes qui travaillent sur le produit PayFit, les plus anciennes se souviennent des projets dans lesquels la recherche avait une place très limitée : ce sont des fonctionnalités peu utilisées ou inutilement complexes.
En tant que User Researcher, l’enjeu n’est plus tellement de communiquer autour de l’intérêt de la user research, mais davantage de proposer des méthodes et outils communs, faciles à prendre en main, pour transformer l’envie de faire de la recherche en une étape incontournable. Un jour, les sujets de recherche complexe représenteront 100% de mon temps : aujourd’hui, c’est plutôt 40%, auxquels s’ajoutent 25% d’accompagnement des équipes pendant leur recherche et 35% de structuration des méthodes et outils.
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