Avant, pendant ou après le cancer : quand faut-il débuter une activité ?

L’activité physique constitue un atout précieux dès l’annonce du diagnostic.

Charlotte Mahr
myCharlotte
5 min readDec 18, 2018

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S i les bienfaits de l’activité physique sur le cancer du sein sont largement démontrés par la science, l’idée reçue que « cancer = repos » tient toujours une place importante dans la population. Publiée en 2017, l’enquête Podium, menée en France, montrait que, sur 1 500 patients atteints de cancers (majoritairement du sein), 13 % stoppaient toute activité à l’annonce du diagnostic de cancer. 36 % d’entre eux croyaient savoir qu’il fallait « se reposer » pour mieux vivre les traitements.

Pourtant, depuis dix ans, une nouvelle méthode a fait son apparition dans les grands centres de chirurgie puis de cancérologie : la pré-habilitation. Spécialiste du traitement de la douleur à l’hôpital de la Timone à Marseille, le Dr Stéphanie Ranque-Garnier en donne une définition : « L’idée est de ne pas laisser le patient dans la stupéfaction anxieuse du diagnostic mais de le préparer jusqu’au jour de la première intervention. La pré-habilitation, c’est optimiser sa condition physique, psychologique et nutritionnelle — et d’autres conditions spécifiques (par exemple, si on doit toucher un poumon, en incrémentant les capacités respiratoires). Avec la pré-habilitation, le patient fait quelque chose d’actif, d’intéressant et d’utile pour lui. » La comparaison avec le sportif est pour elle judicieuse : « On n’a pas idée de dire à un athlète de bien se reposer 3 semaines avant une compétition ou de manger n’importe quoi.» La méthode est déjà largement utilisée en chirurgie orthopédique, par exemple par le Pr Argenson à Marseille, afin d’optimiser la réhabilitation post-opératoire. En matière de cancérologie, il n’y a « aucune contre-indication, bien au contraire », glisse le Dr Ranque-Garnier. L’hôpital Foch, à Paris, s’est lancé en 2016 dans cette méthode sur le cancer colorectal, en préparant ses patients sur le plan physique, alimentaire et psychologique. Des résultats sont attendus dans les prochaines années.

“L’activité physique est le seul moyen de lutter contre la fatigue.” Crédit vidéo tournée par nos amis de Malades de Sport.

E n 2014, une équipe de chercheurs canadienne a fait faire des exercices d’aérobie à 77 patients atteints d’un cancer colorectal, quatre semaines avant l’opération. Un groupe test a fait le même exercice juste après l’opération, le tout pendant huit semaines. À la fin du programme, les deux groupes réalisaient le même test (marche de 6 min) qu’à l’annonce du diagnostic. Les patients ayant pratiqué la pré-habilitation ont gagné 23,7 mètres, tandis que le groupe neutre perdait 21,8 mètres. Mieux préparés, les malades du groupe de pré-habilitation ont su maintenir et même augmenter leur condition, là où celle du groupe « normal » a largement diminué.

Autre étude notable, celle d’une équipe britannique, en 2015, notait qu’après un programme d’entraînement de 6 semaines à vélo, 22 sujets qui allaient être traités par radio et chimiothérapie pour un cancer du rectum, ont vu leurs capacités cardio-respiratoires (VO2 max) augmenter « de façon significative » malgré les traitements. Les 17 patients qui n’ont pas eu recours à la pré-habilitation, n’ont vu aucune amélioration dans leurs résultats.

Ces études, encore peu nombreuses, tendent à prouver que la pré-habilitation améliore l’état général des patients et pourrait avoir un impact médico-économique en réduisant le temps d’hospitalisation ou de recours aux soins des malades. Il y aurait donc un intérêt certain à pratiquer une activité physique dès l’annonce du diagnostic, tout en surveillant son alimentation et en travaillant sur l’aspect psychologique.

Photo by Nick Scheerbart on Unsplash

L es études sur la pratique d’une activité physique pendant les traitements d’un cancer du sein, notent un gain certain sur la fatigue, l’estime de soi, et sans doute des bienfaits sur le risque de récidive ou la mortalité des patientes. Le Dr Battaglini s’est penché en 2007 sur l’impact d’exercices de type aérobie et de renforcement musculaire, sur des patientes en cours de traitement pour un cancer du sein. Il en ressort que ces patientes avaient augmenté leur masse musculaire, en comparaison du groupe traité « normalement ». Le maintien d’une masse musculaire suffisante est souvent associé à un bon pronostic de traitement.

Pour les patientes qui n’ont pas eu l’occasion de débuter ou de poursuivre une activité pendant leurs traitements, le choix de commencer après la rémission peut également s’avérer payant. Dans son rapport de 2017 sur les bénéfices de l’activité physique, l’Institut national du cancer compilait des études et indiquait que « des effets plus importants sont notés avec l’activité physique combinée (endurance + renforcement musculaire) vs endurance seule sur le poids et l’IMC, qui sont légèrement mais significativement diminués après intervention par l’activité physique. Aucun des autres paramètres n’est significativement amélioré par l’activité physique (pourcentage de masse grasse, masse grasse, tour de taille, masse musculaire). » Réduction de la fatigue, amélioration de la qualité de vie (sommeil, douleurs, bien-être…), restent des atouts soulignés dans le rapport, grâce à la pratique d’une activité physique après un cancer du sein.

Ce même rapport indique donc que « les programmes d’activité physique qui combinent endurance et renforcement musculaire semblent particulièrement efficaces sur la correction de la composition corporelle, surtout lorsqu’ils commencent pendant le traitement et sont poursuivis après ».

P our conclure, si l’activité physique semble avoir un meilleur impact quand elle est pratiquée dès l’annonce d’un cancer du sein, ses bienfaits sont prouvés dès lors qu’elle fait son entrée dans le parcours de soin du patient. C’est même un excellent moyen de reprendre confiance en soi. Selon des équipes australiennes ayant publié dans l’American Journal of Psychiatry en 2017, l’activité physique serait le meilleur antidépresseur. Sur 33 000 personnes « en bonne santé » étudiées pendant 11 ans, les résultats ont montré que les personnes qui ne faisaient aucun exercice physique présentaient 44 % de risque supplémentaire de développer une dépression que celles qui faisaient une activité physique, d’une à deux heures par ­semaine. Des résultats expliqués par la libération de neurotransmetteurs (endorphines, dopamine…) qui jouent sur la plasticité cérébrale et agissent sur le niveau de stress. Trouver une activité qui nous plaît et correspond à notre niveau de forme serait donc l’assurance de se sentir mieux dans sa tête…et dans son corps. Voilà pourquoi l’application myCharlotte vous propose conseils et activités faciles à réaliser chez vous, au quotidien, en tenant compte de vos capacités.

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Charlotte Mahr
myCharlotte

Prof de #Pilates et créatrice de #myCharlotte — l’app qui aide les patientes à vivre autrement leur #cancerdusein et les #effetssecondaires des traitements