Mais qu’arrive t-il à la vache mauve…?!

Focus sur les brand stretchings & cobrandings de Milka

Naofal Ali
naofalnotes
5 min readMay 13, 2014

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Depuis quelques mois maintenant, « elle nous en fait voir de toutes les couleurs » (oui, je sais que je ne mérite pas un oscar pour le jeu de mots bien trop facile). De son traditionnel segment du chocolat, Milka porté par le désir de se positionner sur d’autres moments de consommation s’invite désormais aux segments biscuits, gâteaux, confiserie, pâte à tartiner, et biscotte.
Stratégiquement il s’agit pour Mondelez, deuxième sur le marché du chocolat (Milka, côte d’or et Toblerone) avec 14% de PDM valeur de stretcher la marque de façon à user au maximum des 99% de taux de notoriété désormais atteint. Je vous propose un petit décryptage de ce brand stretching en analyse.

Comme pour les hommes et les femmes, il peut arriver pour les marques un moment de leur vie où après avoir très largement et longuement exploré le cadre traditionnel, on a envie d’espace, de nouvelles expériences et d’aventures. Dans les deux cas, les nouvelles orientations peuvent être enrichissantes, bénéfiques ou alors préjudiciables. Dans le cas de la vache mauve, (que j’adore) j’avoue me poser des questions sur cette (méga) extension de marque.

– le nombre important de nouveaux segments pénétrés
Milka est loin d’être la première marque a sortir de son segment d’origine. Toujours dans l’épicerie sucrée, d’autre marques l’ont fait. Bonne Maman par exemple est passé des biscuits aux yaourts. Toutefois, la vache mauve interpelle par le nombre très important de nouveaux segments attaqués dans la quasi même foulée. On ne doute pas que Mondelez, mastodonte du sucré a les ressources, la compréhension et des références clés dans chacun de ses nouveaux segments mais le geste reste quand même risqué… Le consommateur qui ne limitait la marque qu’au traditionnel chocolat se retrouve devant beaucoup trop de nouvelle références. Le jeu en vaudra t-il vraiment la chandelle…?

– le court temps d’adaptation des consommateurs
Vu le nombre important de références lancées, Mondelez se retrouve dans une situation de totale compétition; non seulement avec la concurrence mais aussi potentiellement entre ses propres produits. Cette bataille des références fera donc probablement des victimes. Les moins productives références seront probablement retirées pour ne conserver que les produits aux meilleurs scores. Les références lancées étant nombreuses, les investissements sont potentiellement plus lourds et donc la pression plus grande. Les « périodes d’essai » des références pourraient donc être bien plus courtes que si elles étaient moins nombreuses. Résultat des courses, les gagnants et les perdants n’auront peut-être donc pas vraiment pu montrer tout leur potentiel… Une parade secrète prévue par Mondelez? ou une excellente maîtrise des coûts sur la durée…? Verra qui vivra

– le risque de cannibalisation important
Oui, à ça, je parie qu’on a tous pensé, même si je ne doute pas que toutes les dispositions aient été prises pour que les nouvelles références ne viennent pas remplacer, mais compléter les anciennes sur les nouveaux segments de Milka, le risque de cannibalisation reste ne pas être totalement nul. Il faudra donc veiller à ce que cette menace ne s’avère pas ou alors ait un résultat positif. Même si on n’y pense pas toujours théoriquement, la cannibalisation peut avoir du bon. Tous dépendra du mix des chiffres des cannibales et des cannibalisés. Au cas où sur les cumuls des références sur un segment on a de belles croissances, ce ne sera que du bon. Si la balance peut pencher en faveur donc de la vache, elle peut aussi très bien être à l’opposé.

– le risque de distillation de la marque
La spécificité de l’extention de Milka, c’est qu’elle partage sa présence sur le packaging avec d’autres marques. Milka Tuc, Milka Lu, Milka Philadelphia, Milka Toffee, Milka Oreo…etc D’accord la marque atteint 99% de notoriété. Mais aussi, une marque est toujours intimement lié à un produit, dans le cas d’espèce, du chocolat. Alors le trop grand nombre de nouveaux produits même si ils sont chocolatés ne pourrait t-il pas perturber le consommateur dans sa définition de la marque? dans la définition de son territoire? Comment doit être perçus cette flopée de produits « hybrides ». Des cobrands produits, il en existe. Mais d’aussi large, et varié, peut-être pas énormément…Du coup on pourrait entrevoir un risque la marque ne soit distillée et que son ancrage perde en force. Les extensions de marque se basent généralement sur la démonstration d’un nouveau savoir-faire, ou l’usage du savoir-faire existant sur de nouveaux produits, pas d’autres marques.
De plus l’image de ces produits hybrides est assez complexe, sont-ils d’abord des « Milka », ou une autre marque? Les images des marques associées le sont-elles aussi bien que les produits? Alors innovation payante ou audace payée, les chiffres parleront.

Dans tous les cas, force est de reconnaître que la vache mauve est décidément bien promeneuse. Elle a de grandes envies d’aller voir si ailleurs l’herbe est plus verte. Elle n’hésite pas à emprunter des sentiers différent qui pourraient s’avérer pleins de petits écueils. Nous verrons bien ce qui ressortira de la grande, très grande expédition de cette belle mauve qui nous fais oser la tendresse.

Originally published at brandside.wordpress.com on May 13, 2014.

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Naofal Ali
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In love with Africa, entrepreneurship, development questions and people.