Écologie & numérique : peut-on les (ré)concilier ?

Clémence Floris
neoxia
6 min readMar 17, 2020

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Fin février à Grenoble, on déjeunait dehors en t-shirt en regardant la neige fondre sur les sommets d’en face. Comme tous les midis, on enchaînait les blagues gorgées d’ironie sur le réchauffement climatique afin de palier nos angoisses. Et puis entre deux réparties, on discute sérieusement et c’est la responsabilité individuelle et le sentiment d’impuissance qui prennent très vite place.

Quel sens notre métier donne-t-il au futur ?

On sait et sent bien qu’il y a un souci. Et pourtant, on est là à profiter du soleil et on repartira devant nos ordinateurs pour passer l’après-midi à envoyer 50 e-mails, développer une nouvelle application répondant à des besoins secondaires, construire et alimenter des instances sur des serveurs énergivores…

Nous aimons nos métiers, nous n’imaginons pas partir élever des chèvres dans la Creuse et nous voulons faire notre part face aux enjeux écologiques.

Alors comment fait-on ? Peut-on envisager une révolution verte et numérique ?

On serait tenté dire “non” de façon catégorique tant le numérique est énergivore en électricité, en matières premières, et source d’émissions de CO2. Pourtant, il me semble nécessaire de trouver un dialogue entre écologie et numérique, l’un étant un objectif, l’autre peut-être l’un des moyens de l’atteindre.

Quel est l’impact du numérique sur l’environnement ?

Il est nécessaire de prendre en compte toutes les étapes du cycle de vie du numérique qui ont un impact sur l’environnement et la société :

  • extraction des ressources nécessaires à la fabrication des équipements ;
  • conception industrielle ;
  • transport ;
  • usage ;
  • fin de vie.

Pour plus de simplicité, nous allons nous soucier surtout des première et quatrième étapes, sans pour autant que les autres soient négligeables.

La fabrication d’un appareil demande plus d’énergie et est plus polluante que son utilisation (source : ADEME). Sans parler du coût humain lié à ses minerais du sang et l’obsolescence programmée réduisant la durée d’utilisation.

En quoi le numérique peut-il aider la transition écologique ?

Diffuser l’information
Internet permet un partage et un accès à l’information spectaculaire et sans appel. Aujourd’hui, on peut presque apprendre à réparer sa voiture sur YouTube, télécharger des modèles de charpente open source pour construire sa maison, ou encore demander à un jardinier de l’autre côté de la planète comment il a réussi à faire pousser des tomates malgré la sécheresse. Les réseaux sociaux jouent aussi un grand rôle dans la prise de conscience écologique, notamment pour les jeunes générations.

Le cerveau humain a globalement peu la capacité d’agir sur et pour ce qu’il ne voit pas. Aussi, pour préserver les écosystèmes, il est nécessaire de les connaître et de comprendre les enjeux. Certains sites ont pour vocation de sensibiliser le grand public à la protection des animaux, d’autres permettent de simuler les effets du réchauffement climatique ou encore de calculer son impact carbone.

Calculateur d’empreinte écologique de WWF

Des outils pour comprendre
La data science peut être utilisée autrement que dans la surveillance de masse ou la publicité ciblée. Elle peut traiter des données afin d’accroître nos connaissances sur l’environnement, mesurer et anticiper les impacts. Certains sites participatifs permettent de collecter des données d’observation de l’environnement.

Des outils pour changer
Certaines plateformes numériques semblent être une réponse appropriée. Nés en partie d’un besoin financier, ils répondent également aux besoins écologiques et créent au passage du lien social et de l’échange. C’est le cas de BlaBlaCar qui propose de partager les trajets en voiture, des sites leboncoin et Vinted (pour ne citer que les plus connus) qui permettent de donner une seconde vie à vos objets ; Too Good To Go, lui, évite le gaspillage alimentaire en revendant à prix cassés les invendus.

Que faire au sein de mon entreprise ?

Aujourd’hui, 90 % des jeunes ne cherchent plus seulement un emploi, mais une entreprise qui partage leurs valeurs. Et selon 7 jeunes sur 10, les entreprises manquent encore d’un engagement profond et sincère en la matière (étude JAM, 15–25 ans).

Nous avons la chance d’avoir des métiers confortables et sécurisés. On ne va pas se mentir, aujourd’hui les (bons) développeurs règnent en maître sur le marché du travail et les entreprises sont prêtes à tout pour les garder, peut-être même à les écouter. Du baby foot aux éco-cups, il n’y a qu’un pas, alors autant en profiter !

Responsabilité individuelle et collective
Quel rôle peuvent avoir les entreprises face à toutes ces questions ? Et les employés ?

L’entreprise est un contexte où des gens parfois très différents se retrouvent autour de leur métier. Un important échange de savoir a lieu professionnellement, et personnellement. Huit heures par jour passées avec les mêmes personnes impacte notre vision du monde. Une émulation collective a lieu : je venais à vélo, mon collègue en trottinette, et celui qui venait en voiture essaye désormais de prendre le bus. Un nouveau comportement devient possible dès lors qu’on a l’exemple sous les yeux.

“Soyez le changement que vous voulez voir en ce monde” disait Gandhi.

Entre l’individu et le collectif, il n’y a ensuite qu’un pas, dans un sens comme dans l’autre. L’entreprise peut encourager ses employés à venir en vélo en subventionnant les kilomètres parcourus, comme elle participe à un pass de transport en commun. Les employés peuvent à l’inverse en faire la demande et montrer leur intérêt. Mon collègue était le seul à avoir une gourde sur son bureau il y a deux ans, tout le monde en a désormais une ; et si l’entreprise nous en avait offerte une floquée à nos noms ?

Et chez Neoxia ?

Nous ne sommes pas parfaits, mais on essaye de s’améliorer ! Voici un aperçu des projets réalisés ou en cours au sein de Neoxia :

  • végétalisation des terrasses ;
  • sensibilisation à la réduction des dépenses énergétiques ;
  • mise en place du télétravail ;
  • tri des déchets par une entreprise d’insertion extérieure (il n’y a pas de recyclage dans notre immeuble du 8e arrondissement de Paris… si si, ça existe encore !) ;
  • éco-cups et suppression des gobelets à usage unique ;
  • freegan pour éviter le gaspillage alimentaire ;
  • sensibilisation aux sacs et emballages du midi : de plus en plus de gens ramènent leur repas, ou vont le chercher avec leur lunchbox ;
  • des discussions passionnées et passionnantes sur le végétarisme/véganisme, les abeilles, le nucléaire, les voitures électriques… et j’en passe !

On en parle :

  • subvention des trajets à vélo ;
  • co-construction d’une démarche RSE.

Aller plus loin :

  • passer chez un fournisseur d’électricité verte ;
  • faire durer plus longtemps nos équipements, et les recycler en fin de vie ;
  • mécénat de compétences : investir du temps et nos compétences dans des projets éthiques (associations, ONG…) ;
  • refuser des projets qui ne seraient pas en adéquation avec notre éthique (à titre individuel ou au niveau de l’entreprise) ;
  • concevoir des solutions numériques moins énergivores, en proposant une offre web low tech où l’on optimise le design et les développements en ce sens ;
  • accompagner nos clients vers des solutions favorisant leur autonomie et la résilience des infrastructures/outils, même si cela peut être moins rentable pour nous.

Est-ce suffisamment réaliste et ambitieux ?

Même si tout cela me semble insuffisant, c’est bien sûr utile et même nécessaire. Une transition prend du temps et toute grande action reste la somme d’une multitude de petites actions, alors autant commencer par quelque chose !

Pour aller plus loin :

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