Olivier Mével, parrain de la French connexion

Tristan Lebleu
NUMA
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6 min readDec 14, 2015

Il donne vie à des lapins, des lampes, des robots en carton… Mais aussi au plus important meetup sur les objets connectés (Meetup IOT Paris), accueilli par NUMA depuis ses débuts. Nous avons décidé d’en savoir un peu plus sur Olivier Mével, pionnier de la connexion des objets à Internet.

Vous préférez une fleur ou un lapin ?

Coiffe hirsute, barbe drue, Olivier Mével a bien plus une allure de marin breton que de serial entrepreneur des objets connectés… Pourtant, ce quadragénaire est l’un des parents avec Rafi Haladjian d’un objet communiquant de légende : le Nabaztag (lapin en arménien), “désormais exposé au Centre Pompidou”, nous confie-t-il en toute modestie. Vous avez forcément déjà aperçu le désormais célèbre lapin qui émet des messages vocaux et lumineux.

Nous partons donc en quête, Paul Richardet et moi même, de rencontrer cette figure des objets communiquants, de l’Aï.o.Ti — ou IoT, pour Internet of Things, l’Internet des objets comme on dit dans le milieu. Nous pénétrons dans son atelier d’expérimentation du 10ème arrondissement, naviguant entre les fers à souder, ampèremètres, voltmètres et oscilloscopes… Et tout un tas d’instruments dont nous ne connaissons ni l’existence, ni l’utilité.

Le fameux “Nabaztag”

En 2003 Olivier crée Violet aux côtés de son associé, Rafi Haladjian. Son objectif est aussi simple qu’ambitieux : “connecter tous les objets à Internet”. Il démarre avec la Lampe DAL, un gros galet blanc translucide avec des ampoules de couleur qui clignotent à l’intérieur. “C’est joli, mais pas très grand public” confie son inventeur, “alors nous décidons de faire un truc plus marrant. On hésite longtemps entre une fleur ou un lapin”. Plus attachant qu’un végétal, le Nabaztag — lapin en arménien — est né. “À sa création, et comme pour la plupart des projets, on ne sait pas vraiment ce qu’il va faire, mais il a l’air cool”. Une certaine vision de l’innovation. Peu à peu, Olivier donne vie à son lapin, “les possibilités étaient énormes”. De mystérieux scintillements multicolores nous renseignent sur la réception d’un mail, la météo, ou les embouteillages… C’est un énorme succès : le gadget fabriqué en Chine s’écoule à 200 000 exemplaires ! Mais le lapin s’essouffle, et Violet est placé en redressement judiciaire et racheté par Mindscape en 2009. “Pour vendre des objets, il faut les avoir produit et donc, avoir payé le matériel, le transport et la main d’oeuvre. Il faut des investissements importants. C’est plus conséquent que le web et ses lignes de codes…”

Ce n’est pas la première fois qu’Olivier passe juste à côté du jackpot. En 1994, tout juste rentré des États-Unis où il a vécu 2 ans , Olivier veut absolument travailler dans l’Internet. Le secteur est quasi-inexistant, tout comme les emplois associés. “Je décide de monter une boite de création de sites internet avec un ami, Philippe Feinsilber”. La machine s’emballe : en 1999, [BaBeL@STaL] compte 200 employés, est valorisée 600 millions de francs et envisage son introduction en Bourse. Cependant, emportée par l’éclatement de la bulle internet et le krach boursier des années 2000, l’entreprise ferme ses portes en 2002. “Ça s’est joué à quelques semaines près. Une expérience stressante, mais amusante” se souvient-il.

Au fil de l’eau, ses expériences répétées font de lui un expert écouté du monde des objets communiquants. Son “château de Moulinsart” du 10ème arrondissement abrite sa société de conseil créée en 2009, Enero : une agence dédiée aux objets connectés. Aux côtés de Marc Chareyron, “vétéran du digital, ex-DG de l’agence européenne star Duke Razorfish”, Olivier met en place les stratégies de ses clients. Startups (Placemeter…) et grands groupes (Axa, EDF, Accor…) se pressent pour confier à ces pionniers de l’Internet of Things études et prototypes.

Mais Enero ne s’occupe pas uniquement de donner vie aux projets de ses clients. Ils ont aussi leurs propres bébés. En 2010, ils lancent une campagne de crowdfunding pour financer leurs paper toys : les reaDIYmate. “L’idée était de donner tout le nécessaire pour que chacun puisse fabriquer son propre objet connecté le plus rapidement possible”. En 10min. chrono, votre figurine en carton est prête à réagir à chacune de vos notifications Facebook, Twitter… Personnalisable, sur son look et ses fonctionnalités, chaque reaDIYmate est unique. C’est la première startup française à se lancer sur Kickstarter et elle récolte 27000$ auprès de 233 contributeurs. Son projet suivant, une enceinte connectée, Telesound, n’atteindra pas son objectif et ne verra jamais le jour, qu’importe. Olivier est un entrepreneur passionné. Un de ceux que l’on croise souvent chez NUMA, pour qui l’échec n’a rien de dramatique, bien au contraire.

Sa passion, il décide de la partager en créant les célèbres Meetups IoT Paris en 2013, avec Pierre-Rudolph Gerlach, le fondateur de Qleek (que NUMA connaît bien puisque la startup a intégré la saison 5 de l’accélérateur Sprint, ex-Le Camping). Avec 70 participants dès la 1ère édition, la communauté est au rendez-vous. Aujourd’hui, le groupe compte 3700 membres et chaque édition fait déborder le RDC de NUMA de passionnés d’objets connectés : plus de 200 participants pour le Meetup #13 en septembre dernier. Le format est simple et efficace : 3 intervenants ont 10 minutes pour exposer, puis 10 minutes d’interactions avec le public. On y évoque tous les aspects de l’IoT : usages, design, technologies, business…

Astro Teller fait une apparition surprise au Meetup IOT Paris #13

Outre le plaisir de se réunir entre technophiles, le Meetup est un excellent moyen de rencontrer, de débattre, et de garder un oeil sur les tendances du moment.

Justement, nous lui avons demandé de nous citer 3 projets du moment à surveiller :

Des projets, il en suit certains de très près. Depuis plusieurs années, il est mentor chez HAX à Shenzen, le plus gros accélérateur de startups hardware et prodigue ses conseils à des entrepreneurs en devenir. Les projets d’objets communiquants ne manquent pas. Instruments de musique, brosses à dents, fourchettes, vêtements : tous les objets du quotidien peuvent se connecter. Les bénéfices utilisateurs ? “C’est la partie immergée de l’iceberg”. Effectivement, l’usage de la brosse à dents connectée peut sembler futile. “Mais c’est une mine d’or pour les grands groupes. Collecte des données, amélioration des processus, optimisation interne, nouveaux services… Procter&Gamble ou un autre saura parfaitement en tirer des avantages.”

Pionnier de l’IoT, du lapin aux robots en carton, Olivier Mével a toujours privilégié des objets communiquants ludiques, sans prétention inutile, “qui (apparemment) ne révolutionnent pas le monde”. Avant de partir, il nous glisse : “la numérisation du réel a démarré. Et ce n’est que le début…” Paroles d’expert.

Si vous voulez participer au prochain RDV de l’IoT, sachez que le Meetup IOT Paris #15, se tiendra le 13 janvier chez NUMA Paris.

Tristan Lebleu & Paul Richardet

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Tristan Lebleu
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Communications Manager at @numaparis / Former journalist @LEXPRESS @LePoint. #startups #innovation. “Happiness is only real when shared” C. McCandless