Outils numériques, béquilles de l’apprentissage

Colin Fillaudeau
Open EdTech
Published in
4 min readMay 18, 2016

À l’ère des disques durs externes et des centres de données, la mémorisation de textes est toujours une compétence attendue en classe.

Les élèves en ULIS* troubles des fonctions cognitives, éprouvent à des degrés divers, des difficultés de stockage et de rappel de l’information.

Dans ces conditions, comment permettre à ces élèves de retenir un texte même simple?

*Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire

Varier les modalités d’accès

Pour permettre à chacun d’«entrer dans le texte » selon la façon de percevoir qui lui convient le mieux, le texte sera projeté au tableau interactif, lu, par les élèves, répété plusieurs fois, puis les élèves auront la possibilité de le « manipuler ».

Une des conditions de la réussite de la séance est de présenter l’enjeu : malgré la longueur du texte, à la fin de la séance, ils seront tous capables de le réciter. Présenter l’objectif comme difficile mais atteignable, l’annoncer comme un jeu, suscite l’envie, stimule l’entrée dans l’activité.

Avant d’entrer dans l’apprentissage purement mécanique du texte, il est nécessaire de s’assurer de la compréhension du sens global de celui-ci et donc de vérifier la compréhension du vocabulaire qui peut la freiner.

La répétition fait partie de l’apprentissage, mais entre chaque lecture, les élèves viendront tour à tour, faire disparaître les mots du texte (les déplacer du corps du texte vers des cases de couleur correspondantes à chaque ligne).

Cette technique d’apprentissage par effacement progressif est déjà éprouvée. Elle permet généralement à une classe de retenir un poème en 30 à 55 minutes selon la durée du texte.

Pourtant si le texte semble appris par cœur à l’issu de la séance, la mémorisation à long terme semble moins évidente, à fortiori avec des élèves en situation de handicap cognitif.

Nous reviendrons sur le moyen de pallier à ce manque.

Ici, contrairement à l’effacement définitif des mots, la présence des mots manquants dans des balises de couleur, offre une béquille à la mémoire de travail : Cela permet aux élèves dont la capacité de mémorisation est particulièrement faible, d’associer la longueur du trait correspondant au mot manquant à la longueur du mot placé dans la balise de couleur équivalente.

Fixer les apprentissages

Que ce soit avec des élèves à la scolarité « normale» ou des élèves à besoins éducatifs particuliers, une séance d’une heure est suffisante pour qu’un poème d’une vingtaine de lignes soit récité après effacement de tous les mots du texte.

Pourtant, si les élèves sont interrogés quelques jours après, seuls certains se rappelleront du poème, et de façon partielle.

Pour permettre qu’une mémorisation de plus longue durée soit rendue possible, j’ai proposé aux élèves de s’approprier le poème : À partir de celui-ci, les élèves vont non seulement émettre une production personnelle, mais également un outils qui leur permettra de « rafraichir » sa mémoire.

Chaque élève a donc comme objectif d’illustrer un vers de la poésie. Puis il s’enregistre lisant le vers correspondant. Les images et la voix sont montés dans une vidéo où le texte est également sous-titré (l’idée restant de proposer un accès visuel, sonore et textuel du poème). Le film produit est ensuite mis en ligne. Chaque élève reçoit le lien de la vidéo, lui permettant de « réviser ».

Capture du compte privé youtube

Évaluer les acquisitions

Deux compétences sont évaluées. La première évaluation porte sur la compréhension du texte de manière formative. Pour cela j’ai utilisé l’application Plickers qui permet aux élèves de répondre à des questions à choix multiples où le résultat apparaît de manière instantanée au tableau numérique.

L’objectif était double : Vérifier l’état de compréhension du texte, et au besoin retravailler les parties peu comprises. Apporter un moment de respiration à la séance d’apprentissage par effacement qui peut sembler répétitive (l’utilisation d’un QRcode scanné, l’apparition en direct du nombres de réponses positives apporte un côté ludique).

Credits : plickers.com

La deuxième évaluation intervient en fin de séquence, elle porte sur la connaissance du texte, soit par une récitation orale(notamment pour les non lecteurs) soit par un poème à trous à compléter (si l’objectif porte sur l’apprentissage du vocabulaire).

Valoriser par le partage, expérimenter à l’aide des outils créés

L’inclusion des élèves à besoin particulier au sein d’un établissement peut passer par la reconnaissance de leur travail par leurs pairs.

Ainsi, les outils créés ont été proposés à une classe d’élèves de 6ème partagée en deux groupes d’aide personnalisée qui abordait justement la poésie.

Avec la professeure de français en charge de la classe, et dans le cadre d’un projet de recherche pour le Master EdTech du CRI (centre de recherche interdisciplinaire de Paris), nous avons expérimenté ces deux outils en les proposant dans un ordre différent pour chacun des groupes afin de déterminer quelle entrée dans l’activité permettait un plus grand investissement personnel.

Le premier groupe effectuait l’activité d’apprentissage par effacement en classe, puis obtenait l’adresse de la vidéo pour pouvoir réviser à la maison avant l’évaluation finale.

Dans l’autre groupe, la vidéo était projetée, puis l’adresse était communiquée. L’activité d’effacement progressif intervenait ultérieurement.

Dans les deux cas la compréhension du texte était effectuée, et l’annonce de l’objectif clairement énoncé (retenir le poème).

Au vu des résultats des évaluations finales, et contrairement à nos prédictions, nous avons pu remarquer que le groupe ayant commencé à travailler sur le poème en entrant par le biais de la manipulation sur le TNI, s’était plus impliqué dans l’activité et avait mieux retenu le poème.

Colin Fillaudeau

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Colin Fillaudeau
Open EdTech

Teacher working with learning disabled pupills. Master2 EdTech student at CRI Paris. Developing Labschool Network project.