Les Rangers craignent que le port en eau profonde ne menace les tortues de mer du Congo

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3 min readApr 5, 2022

Auteur : Reuters

Chaque année, Christian Ndombe et d’autres gardes forestiers parcourent les plages du littoral en voie de disparition de la République démocratique du Congo à la recherche de nids de tortues, et amènent les œufs dans un centre d’incubation où ils sont couvés pendant huit semaines.

Image représentative. Source : Pixabay

Selon les rangers, la montée du niveau de la mer et l’érosion ont détruit près d’un quart des sites de nidification des tortues.

Aujourd’hui, une nouvelle préoccupation apparaît sous la forme d’un port, qui, selon le gouvernement, apportera des emplois et réduira le coût des importations, mais dont les rangers craignent qu’il ne les mette davantage en danger.

“Le problème que nous rencontrons actuellement est que pour vraiment les protéger, nous devons protéger la côte”, a déclaré Ndombe après avoir relâché des centaines de tortues fraîchement écloses sur la plage et les avoir regardées se précipiter dans les vagues.

Sur une langue de sable située à quelques kilomètres de la côte, là où le vaste fleuve Congo se jette dans l’océan Atlantique, le président Felix Tshisekedi a posé la première pierre du port en eau profonde, d’un coût de 1,2 milliard de dollars, le 31 janvier.

Une fois achevé en 2025, le port de Banana pourra traiter près d’un demi-million de conteneurs par an, selon le promoteur, le géant portuaire de Dubaï, DP World.

La ville voisine de Moanda était en effervescence à propos du projet, qui transformera ce petit coin tranquille en un centre de commerce international.

Le principal port du Congo, Matadi, qui se trouve à environ 120 km en amont de Banana, n’est pas assez profond pour accueillir les grands navires en provenance d’Asie et d’Europe, ce qui oblige à transférer les marchandises sur des navires plus petits dans le port de Pointe Noire, en République du Congo voisine.

Le coût de l’envoi de marchandises de la Chine vers la capitale du Congo, Kinshasa, via le port de Banana à la place “entraînerait une économie de 21%”, selon une étude de faisabilité réalisée en 2017 par le cabinet d’ingénierie néerlandais Royal HaskoningDHV.

“Banana Port sera un port moderne, de classe mondiale, et sans aucun doute un game changer pour la RDC”, a affirmé Sultan Ahmed bin Sulayem, PDG de DP World, lors de la cérémonie de pose de la pierre.

En jetant son filet dans une lagune, le pêcheur Alexander Ngoma Chasa a confié qu’il était impatient d’acheter des produits bon marché et de trouver un emploi. Mais il s’inquiète pour les tortues et ses prises.

Banana Port sera construit à proximité du périmètre du parc marin de la mangrove du Congo, une réserve naturelle protégée par des réglementations nationales et internationales.

Le parc abrite diverses espèces végétales et animales vulnérables ou menacées, dont quatre espèces de tortues, des lamantins et des oxudercinae.

On ne sait pas exactement quelle proportion de la forêt de mangroves sera abattue pour faire place au port, ni quel sera l’impact du trafic de superpétroliers, car DP World n’a pas publié son étude d’impact environnemental et social.

DP World et le gouvernement du Congo n’ont pas répondu aux demandes répétées de commentaires de Reuters. Le site web de DP World stipule que sa “stratégie de durabilité guide notre approche”.

“Elle nous aide à travailler de manière responsable en donnant la priorité à la durabilité et à l’impact sur les personnes, les communautés et l’environnement dans lesquels nous opérons”, peut-on lire.

Les autorités de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), l’agence gouvernementale qui gère les parcs nationaux du Congo par le biais de ses gardes forestiers, ont indiqué que ses experts n’avaient pas été correctement consultés par les promoteurs.

“Pour autant que je sache, il n’y a pas d’étude sur l’impact environnemental et social. Nous avons besoin de voir ces études. Jusqu’à présent, nous ne les avons pas”, selon Olivier Mushiete, le chef de l’ICCN.

DP World a confié ce mois-ci au journal britannique The Guardian qu’elle avait soumis une première étude d’impact environnemental et social à l’Agence congolaise de l’environnement, qui lui a délivré un certificat environnemental.

“Nous réaliserons une étude d’impact environnemental plus détaillée avant le début de la construction”, selon DP World.

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