Non, loger les SDF ou les réfugiés dans les logements vacants n’est pas LA solution

Julien Carnot
oqpio Insights
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5 min readOct 31, 2016

Mais remettre les logements inoccupés sur le marché dégagera des moyens pour mieux accompagner ces personnes dans leur accès à un logement correspondant à leurs besoins.

L’idée revient avec force à chaque automne, portée à la fois par des associations luttant contre l’exclusion que par les opposants à la construction de nouveaux logements sociaux. Et bien souvent relayée avec délectation par certains journalistes, ravis d’agrémenter leur marronnier d’une solution de bon sens.

La belle équation logements vides > personnes à loger

Mais voilà, qu’on sorte de la rue ou qu’on fuie son pays en guerre, si on a besoin d’un toit, on a aussi besoin d‘un vrai accompagnement pour s’intégrer durablement dans une société qui ne vous ouvre pas franchement les bras. Et qu’on le veuille ou non, on n’a pas exactement le profil rêvé pour un bailleur: probablement pas une série ininterrompue de 5 ans de quittance de loyers, probablement pas un CDI ou un statut de fonctionnaire, probablement pas de garant.

Certains diront « qu’à cela ne tienne, réquisitionnons! ». Mais si certains ministres aiment faire des effets d’annonce, force est de constater qu’il n’est pas évident de remettre en cause la propriété dans un pays qui est ou se rêve propriétaire. Même si certains feignent de s’émouvoir qu’on trouve face à un afflux historique de réfugiés des capacités d’hébergement qui n’étaient pas utilisée pour héberger les SDF « nationaux », ne vous y trompez pas: ils n’en sont pas devenus pro-réquisition.

Surtout, en pratique, quand on voit que plus de 73 000 logements sociaux sont vacants depuis plus de 3 mois (1,6% du parc), on peut se demander s’il est vraiment sage de confier la gestion de logements actuellement vacants, dispersés sur l’ensemble du territoire, à une puissance publique qui n’a pas forcément les moyens financiers et techniques de gérer la rénovation et l’affectation de ces biens.

Le stock existe, mais encore faut-il le valoriser!

Bien sûr, il existe des dispositifs d’intermédiation comme SoliBail, qui permettent de sécuriser le propriétaire et s’appuient sur des associations pour lier retour au logement et accompagnement social. Créé en 2009, il a évolué et est de plus en plus connu et utilisé, mais pour mobiliser plus de quelques milliers de logements, il faut que:

  • le propriétaire sache que ça existe
  • le propriétaire fasse confiance à l’État et à l’association
  • le logement soit habitable en l’état ou rénové par le propriétaire (ou qu’il fasse appel à un bailleur social à qui il cède l’usufruit d’un bien à rénover sur une longue durée…)

Or le propriétaire, c’est bien souvent une personne qui n’a pas les moyens ou l’envie de conduire ou de financer des travaux, pas les moyens ou l’envie de gérer la recherche de locataire ou la procédure de vente, pas les moyens ou l’envie de chercher les bons interlocuteurs pour chaque problème. Bref, quelqu’un comme vous et moi, qui aura, face aux obstacles, tendance à remettre l’action au lendemain.

On préfère les caricatures de d’Honoré Daumier dans les archives que dans les discours politiques, pas vous?

La comparaison du nombre de personnes sans-abri et nombre de logements vacants est une équation perdante. On n’aménage pas ou on ne construit pas les logements et les services nécessaires à la réinsertion des personnes sans-abri, et on bloque la remise sur le marché de logements vacants en laissant croire aux propriétaires que leur logement se destine à un public peu solvable.

Nous rénovons les logements vacants
et nous les remettons en location.

C’est pour cela que nous développons un service complet pour financer et coordonner la rénovation et puis gérer la location d’un logement aujourd’hui inoccupé. Sans demander au propriétaire d’investir ou de gérer des démarches, de prendre des risques et de se former à des métiers qu’il ne connait pas forcément. Sans lui demander de s’engager sur la durée, mais en lui proposant, en toute transparence, une qualité de service telle qu’il ne voudra plus s’en passer.

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Pour que ce modèle fonctionne, pour que la rénovation soit financée, il faut trouver dès la fin des travaux des locataires, et des locataires fiables. Cela ne veut pas dire des locataires en CDI avec des revenus supérieurs à 3 fois le loyer et des garants qui émargent à l’ISF. Avec un loyer raisonnable, des locataires respectés et responsabilisés, on peut remettre le logement à sa place de produit de première nécessité et refuser qu’il reste un problème et ne devienne un luxe.

Alors nous l’assumons: nous ne croyons pas que les centaines de milliers de personnes sans-abri puissent trouver leur prochain logement dans le stock actuel de logements vacants, si important et bien réparti soit-il. Nous ne croyons pas qu’ils pourront, du jour au lendemain, payer ne serait-ce que les charges de ces logements et encore moins participer au financement de leur rénovation énergétique pour limiter ces charges. Nous ne croyons pas que le Ministère du Logement, même si l’on décidant de doubler son budget, puisse financer, réaliser ces rénovations et gérer l’hébergement des mal-logés. Il faudra pour nombre de ces personnes passer par d’autres solutions d’hébergement, par d’autres accompagnements et d’autres dispositifs d’insertion. Nous pensons même qu’il est improductif et dangereux de laisser croire qu’il y a à un problème si complexe que celui du mal-logement une solution si simple.

Mais les personnes mal-logées bénéficieront elles-aussi, même indirectement, de la remise sur le marché de ces logements vacants dont nous allons nous occuper. Parce que plus de logements disponibles, ce sera plus de mobilités possibles, des prix moins délirants et des politiques moins ciblées sur la construction de lotissements et la « revitalisation » de quartiers entiers laissés à l’abandon. Parce qu’un marché qui marche vraiment, c’est une demande qui trouve une offre disponible, ce sont des besoins de régulation et de logements sociaux qui diminuent. Ce sont des moyens que l’on peut réorienter pour une intervention publique volontariste au service des personnes exclues.

Nous n’attendons rien. Rejoignez-nous.

Nous avons déjà commencé. Vous pouvez nous permettre d’aller plus vite et plus loin en en parlant autour de vous, peut-être à ce membre de votre famille qui est aujourd’hui propriétaire d’un logement inoccupé, peut-être à cet ami qui aime les solutions simples mais pas simplistes, peut-être en nous demandant de rénover ce logement vacant qui sera votre prochain chez-vous.

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Julien Carnot
oqpio Insights

Passionate about public affairs, decentralized models and social change. Launching https://oqp.io to help owners to put empty homes back on the market together.