L’édition (numérique ?) a plus besoin d’un community manager que d’un attaché de presse

Éditions Numeriklivres
Le blog de Numeriklivres
3 min readNov 12, 2014

Par Jean-François Gayrard

Crédit photo : Jonathan Velasquez

C’est une évidence : beaucoup de choses sont en train de changer dans l’édition. De plus en plus, nous passons d’une chaîne du livre à un écosystème de la lecture (même si la chaîne du livre tente toujours d’imposer son modèle, ses idées, ses intermédiaires et toute le pataqués au numérique). Et dans cet écosystème, des acteurs vont disparaître, d’autres vont revoir leur rôle et d’autres acteurs vont apparaître. Je sais, dit comme ça, ça fait peur ; imaginez donc la tête du maréchal-ferrant quand il a vu les voitures envahir ses rues pavées bien aimées ! Bref. Prenons par exemple, l’attaché de presse, rôle important dans la chaîne traditionnelle du livre physique, personne ne dira le contraire. Mais, son rôle est-il tout aussi important dans l’écosystème de la lecture numérique ? Quel est l’intérêt pour une maison d’édition nativement numérique (et celles qui ne le sont pas encore) d’envoyer des communiqués de presse et un service de presse numérique à des journalistes qui n’ont pas une liseuse dans leur salle de rédaction ? (un paradoxe quand on sait que la presse migre de plus en plus vers le numérique). Aucun. Nous en avons fait l’expérience. Combien de journalistes nous ont répondus avec toute l’arrogance dont parfois ils peuvent faire preuve qu’ils ne lisent pas en numérique, qu’ils veulent le livre papier, le “vrai” lire. Tous. Pour eux, un livre n’existe qu’au format papier, point final. C’est bien connu ; un ebook, c’est un faux livre, écrit par un faux auteur, avec une fausse histoire et publié par un faux éditeur ou pas. Non, mais !

Nous avons très vite cessé de faire parvenir des communiqués de presse et des fichiers puisque de toutes façons, cela n’intéresse pas les journalistes. De même qu’en 4 ans, nous avons eu à peine deux demandes de libraires pour un service de presse. Tout est dit. Mais qu’à cela ne tienne. Bien sûr, on est comme tous les éditeurs, on serait flatté — nous et nos auteurs — de voir un titre de notre catalogue chroniqué par un critique d’un grand quotidien national, d’un hebdo ou d’un mensuel. C’est peine perdue. Inutile de dépenser temps et argent quand on est un éditeur nativement numérique pour envoyer des communiqués de presse. Du moins pour le moment.

C’est donc tout naturellement que nous nous sommes tournés — et nous ne sommes pas les seuls — vers le Web et les réseaux sociaux. C’est tout naturellement que nous avons appris, au début avec maladresse, à créer notre audience, à créer des communautés de lecteurs sur Twitter, sur Facebook, sur Pinterest. C’est tout naturellement que nous nous sommes tournés vers les blogueurs littéraires. Aujourd’hui, il est pour nous plus important d’animer nos communautés de lecteurs — et ce n’est pas facile tant elles sont sollicitées de toute part — que d’envoyer un communiqué de presse à des journalistes qui nous regardent de bien trop haut ! En plus, moi je suis sensible au vertige.

Signe que tout ce travail d’animation de communautés de lecteurs prend de l’importance, les éditeurs historiques commencent eux aussi à investir les réseaux sociaux et tentent de fédérer à leur tour des lecteurs sur le Web. Ils ont bien compris l’enjeu, d’autant qu’ils commencent eux aussi à lancer des collections nativement numériques. Et dans ce nouvel écosystème qui se crée autour de la lecture et en particulier autour de la lecture numérique, le community manager a un rôle de plus en plus prépondérant. Bien plus important que celui d’un attaché de presse dans la chaîne traditionnelle du livre physique.

Alors, attaché de presse ou community manager ? Ou les deux ?

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