La ventilation sans énergie, ça marche en hiver… et en été?

Ben Bidules
Permagazine
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6 min readFeb 1, 2016

La ventilation des habitations est aujourd’hui majoritairement assurée par des appareils électriques, répondant au doux nom de VMC, d’extracteurs, de “double-flux” etc.

Ces ventilations, qu’elles soient localisées (extracteurs d’air dans chaque pièce) ou centralisées (un caisson d’aspiration unique et des gaines reliant les pièces), consomment en permanence une petite quantité d’énergie électrique. Certes les ventilateurs d’aujourd”hui sont très économes, et une ventilation double-flux, malgré sa consommation électrique continuelle, nous fait économiser de l’énergie sur le chauffage par rapport aux autres types de ventilation (une simple flux hygroréglable consomme encore moins!).

Mais peut-on ventiler ou aérer nos pièces différemment, sans utilisation de l’énergie électrique, et sans installation compliquée?

La ventilation sans moteur

Allez! regardons tout de suite une petite vidéo d’une ventilation naturelle sans moteur:

http://www.pachama.eu/telecharge/ventil.mp4

Ce que vous venez de voir est un simple conduit de cheminée non utilisé, dans une maison individuelle, et qui par tirage thermique fait monter l’air chaud (plus léger) de la pièce et le laisse s’échapper à l’air libre.

Ce processus est le même que dans un conduit de cheminée connecté à un poêle à bois: les fumées chaudes montent et s’échappent au dessus du toit. C’est ce qui crée également l’aspiration nécessaire pour l’entrée de l’air de combustion dans le poële.

Révolutionnaire? Non pas vraiment. Ce type de ventilation naturelle est connu depuis très longtemps. Il est abordé dans les ouvrages de génie climatique, mais on lui préfère la version moderne, électrique, pour pouvoir contrôler le débit d’air extrait.

Autre souci, ce tirage thermique s’arrête lorsque la température extérieure est supérieure ou égale (voire juste inférieure mais proche) à la température intérieure… Si jamais il y a du vent, le tirage thermique est alors remplacé par un tirage dynamique, qui continue de ventiler la maison, mais s’il n’y a pas de vent la ventilation s’arrête.

Et au fait, pourquoi ventiler?

Sans vouloir reprendre ici l’importante littérature de la ventilation des habitations, on peut citer la raison initiale de la ventilation: il s’agit d’assainir l’air intérieur (que nous respirons) en le remplaçant par de l’air extérieur.

Et pourquoi doit-on l’assainir? Et bien parce qu’il se charge de composés qui, en excès, ne sont pas bons pour notre santé et/ou pour le bâtiment. Par exemple, dans une pièce habitée par plusieurs personnes, le dioxyde de carbone que nous expirons voit sa concentration dans l’air augmenter. Ce CO2 en excès peut nous donner des maux de tête, des sensations de fatigue... Il en est de même pour la vapeur d’eau que nous expirons ou qui est générée en cuisine ou en salle de bain, qui se condense aux points froids de la maison (vitres, murs froids…) et qui engendre des risques de moisissures dangereuses pour les boiseries et pour les habitants.

On cite aussi comme substances à éliminer par ventilation tous les polluants intérieurs que nous avons amenés chez nous dans les meubles, les objets en plastiques, les moquettes etc. Ces produits de la vie moderne sont un peu les chevaux de Troie de la pollution de l’air intérieur, car les composés organiques volatiles, formaldéhydes et autres produits chimiques qu’ils contiennent se diffusent dans l’air et ne sont pas bien bons pour notre santé. Il faut alors ventiler plus pour assainir l’air ainsi pollué.

Pour être un peu plus complet dans la justification de la ventilation, il faut prendre en compte le fait que nos maison modernes sont de plus en plus étanches à l’air: les joints des fenêtres sont efficaces, les trous et fissures dans les maçonneries sont bouchés, les lambris sont soit remplacés par des revêtements étanches soit doublés de films d’étanchéité (appelés frein-vapeur)… C’est une bonne chose car ceci diminue les entrées d’air froid en hiver et donc économise de l’énergie de chauffage. Mais il faut en contrepartie maitriser un renouvellement d’air minimal.

Autrefois, dans les vieilles bâtisses, les courants d’air étaient légion, et on chauffait essentiellement grâce à des cheminées ou des poêles à bois non étanches. Or ces appareils ont besoin d’air pour alimenter leur combustion, et ils faisaient donc entrer dans la pièce une quantité d’air neuf importante: la ventilation était donc assurée en même temps que le chauffage!

Aujourd’hui, si vous avez un poêle non étanche chez vous, celui-ci assure encore une ventilation importante lorsqu’il fonctionne. On dit d’ailleurs qu’un poêle assèche l’air, et c’est en partie dû au fait qu’il ventile fortement la pièce.

Fonctionnement d’un poêle classique (non étanche)

Mais de nombreux poêles modernes comportent une entrée d’air étanche, canalisée depuis l’extérieur ou depuis une cave. Ils n’assurent donc aucune ventilation de la maison, mais ils sont plus performants thermiquement. L’article ci-dessous donne quelques complément sur la performance des poêles àbois.

Peut-on se passer de la ventilation électrique?

Oui, mais c’est plus compliqué qu’avec une VMC: il est nécessaire de prendre de bonnes habitudes en terme d’aération de son logement. C’est une démarche à contre-courant de la société du “pousse bouton”, car bien ventiler naturellement implique des actions régulières de la part de l’usager du bâtiment.

La première action serait déjà de bannir les meubles et objets pollués de notre intérieur: exit les meubles en mélaminé, les revêtements de mur ou de sol traités chimiquement, les peintures glycéro… On préférera les meubles en bois brut cirés (cire d’abeille), les peintures à l’eau sans COV, les enduits muraux à base de chaux ou d’argile etc. C’est bon pour l’air, et c’est souvent bon également pour l’environnement au moment de la fabrication.

Et pour ventiler en hiver, si l’on dispose de conduits de tirage naturel (il en faudrait un dans chaque pièce humide), on peut alors placer des bouches d’extraction d’air sur ces conduits et moduler leur ouverture pour éviter que le débit d’air ne soit ni trop faible ni trop important. L’évaluation du bon débit n’est pas forcément évidente: une bouche d’extraction modulable avec un petit ventilateur permet de voir la vitesse de rotation (comme sur la vidéo) et d’apprécier avec l’habitude si cette ventilation est plus faible ou plus forte que l’aération qui nous convient. L’aération convenable peut aussi être appréciée grâce à un appareil de mesure du CO2 et de la vapeur d’eau dans l’air.

En hiver, il faut bien sûr éviter une trop forte ventilation pour se prémunir des augmentations des factures de chauffage.

En complément l’ouverture régulière des fenêtres est un moyen très (voire trop) efficace de ventiler un bâtiment. En l’absence de ventilateur motorisé, l’ouverture des fenêtres est même le moyen unique disponible en été, lorsqu’il fait plus chaud dehors que dedans, ce qui annule l’effet du tirage thermique (du moins le jour). On doit alors ouvrir les fenêtres en grand, de préférence des deux côtés du bâtiment pour créer un courant d’air.

A noter que le problème de l’ouverture des fenêtres est lié au type de chauffage: avec un chauffage central, ou des convecteurs électriques, on doit chauffer l’air avant de ressentir le confort thermique, donc remplacer cet air chaud par de l’air froid est une grosse perte énergétique. Si vous avez plutôt un chauffage radiatif (poêle), c’est moins problématique car l’appareil chauffe directement votre corps, sans passer par l’air. Cette problématique est bien expliquée dans l’article suivant:

Pour palier à ce problème de réduction du tirage, il existe aussi des ventilations hybrides: on ajoute en haut des cheminées des petits ventilateurs électriques, qui ne se mettent en route que si le tirage naturel est trop faible. Cependant, ce sont des systèmes plus onéreux qu’une VMC simple flux hygoréglable, et l’économie d’énergie est assez faible… En général ils ne sont étudiés que dans les bâtiments collectifs.

Conclusion

Si vous voulez installer une ventilation naturelle chez vous, il faut:

  • un ancien conduit de cheminée dans chaque pièce humide;
  • des bouches pour apprécier ou contrôler de débit d’air extrait;
  • des entrées d’air dans les pièces sèches (comme pour n’importe quelle ventilation simple-flux;
  • des actions de ventilation manuelles, comme les ouvertures de fenêtre lors des journées douces ou chaudes sans vent;
  • des matériaux naturels dans la maison, ne polluant pas l’air intérieur, et qui peuvent également réguler l’hygrométrie (chaux, chanvre, argile…).

Si vous n’avez pas tout ça, vous pouvez alors étudier les deux solutions (classiques mais performantes) suivantes:

  • la ventilation simple-flux hygroréglable de type B avec moteur basse consommation;
  • la ventilation double-flux.

Si vous voulez voir un de mes “bidules”, ou me contacter pour toute autre raison, vous pouvez passer par la page contact de mon site professionnel : www.pachama.eu

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Publication francophone sur la Permaculture, la sobriété et les Low Tech

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Written by Ben Bidules

Chercheur de sagesses énergétiques, de low-techs et de permaculture. Quels chemins suivre pour enfin prendre soin de l’humain et de la Terre?

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