Une application peut-elle nous aider à résoudre l’équation du bonheur ?

Interview avec Mo Gawdat, ancien Chief Business Officer de Google X, entrepreneur et auteur du livre Solve for Happy.

L’équipe Pixelis
Pixelis
5 min readFeb 27, 2019

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Sustainable Brands, première communauté mondiale de marques et d’organisations leaders de l’innovation de la sustainability, arrive à Paris ! Des entreprises, décideurs influents, leaders inspirants mais aussi entrepreneurs pirates viendront témoigner et échanger pour construire le business de demain et réinventer l’engagement responsable, du 23 au 25 avril au Carrousel du Louvre.

Piloté par Pixelis, agence de branding For Good, SB Paris 19 publie une interview réalisée avec Mo Gawdat, personnalité aussi singulière qu’inspirante.

Ancien Chief Business Officer de Google X, le laboratoire de recherche et développement de Google, Mo Gawdat a mis à profit son expérience d’ingénieur pour assister l’humanité dans l’un de ses plus vieux défis : la recherche du bonheur…

Des réseaux sociaux qui attisent les tensions politiques aux robots qui menacent de détruire des emplois, en passant par le potentiel hautement addictif des smartphones, la technologie est souvent pointée du doigt pour son impact négatif sur nos conditions de vie. Mais pour Mo Gawdat, elle peut aussi faire partie de la solution.

Vous avez adopté une approche basée sur la logique pour résoudre ce que vous nommez « l’équation du bonheur ». D’où cette idée vous est-elle venue ?

Mo Gawdat, entrepreneur, auteur du livre Solve for Happy et ancien directeur commercial de Google X

Lorsque vous regardez le problème avec des yeux d’ingénieur, vous réalisez que nous sommes nés heureux. Les enfants sont heureux, et c’est avec l’âge que notre bonheur ne fait que décroître. Nous sommes donc face à une machine qui fonctionnait très bien à ses débuts, et dont la mécanique s’est enrayée. Ainsi, au lieu de m’attaquer à tout ce que nous pouvons faire pour devenir plus heureux, j’ai pris le parti de considérer ce que nous devons supprimer pour ne plus être malheureux.

L’un des principaux mythes autour du malheur est qu’il reposerait uniquement sur les événements qui nous arrivent durant notre vie. Or, il dépend aussi et surtout de la perception que nous avons de ces événements, et de l’écart entre cette perception et les attentes que nous avions formulées auparavant. En regardant les choses sous cet angle, on voit que le malheur est une alarme. Votre cerveau vous signale que quelque chose ne va pas, et qu’il vous faut agir en fonction. Le bonheur n’est donc pas quelque chose de passif : il se travaille, et il est possible de l’atteindre en changeant nos perceptions.

Mon objectif est de faire prendre conscience à mon public du fait que le bonheur est comme l’entraînement physique. Si l’on pratique un petit peu tous les jours, on finit par être plus heureux. Il est d’autant plus nécessaire d’agir que notre monde va mal. La dépression et le suicide des adolescents battent des records. Or, nous sommes dans le même temps en train d’apprendre aux ordinateurs à penser, à travers l’intelligence artificielle. Si nous ne résolvons pas notre incapacité à être heureux, nous allons nous retrouver avec des ordinateurs qui commettent les mêmes erreurs que nous.

Vous évoluez dans le monde des technologies et de l’innovation depuis plusieurs années. Comment mettez-vous à profit votre maîtrise de ces outils pour transmettre votre message ? Comptez-vous mettre en place une application, par exemple ?

Absolument. Nous sommes en train de construire une application intelligente qui aidera les utilisateurs à résoudre leurs problèmes au quotidien. Elle fonctionne sur un triptyque être/apprendre/faire. La partie « être » concerne la conscience de soi. L’application s’attachera à différentes composantes de votre style de vie, comme votre usage de la technologie, vos habitudes de travail, vos relations personnelles, etc. En fonction, elle vous fournira des lectures, des vidéos à regarder, bref, différentes manières d’accroître votre connaissance dans ces domaines clefs. Enfin, elle vous aidera à agir pour résoudre vos difficultés, et ce de manière très personnalisée.

Si vous êtes un cadre soumis à l’illusion du contrôle, l’application vous mettra en lien avec d’autres individus souffrant du même problème, et vous proposera des lectures (dans votre langue) pour approfondir votre compréhension du sujet. Ou peut-être l’application vous indiquera-t-elle que lorsque vous passez plus de 20 minutes sur Facebook par jour, vous êtes moins heureux…

Vous avez travaillé chez Google, au cœur de la Silicon Valley. Les grandes entreprises technologiques comme Google, Apple et Facebook ont un impact croissant sur notre quotidien. Pensez-vous qu’elles aient un rôle à jouer dans notre quête du bonheur ?

Je ne pense pas que le changement viendra des grandes entreprises. Leur objectif est de construire des produits qui séduisent le consommateur. Ainsi, la manière la plus simple de changer le comportement de ces entreprises est de modifier nos habitudes de consommation. Prenez l’iPhone, par exemple. Si nous continuons à faire la queue devant les Apple stores chaque fois qu’ils sortent un nouveau téléphone, plus sophistiqué et plus coûteux, ils continueront sur la même voie.

Mais si nous arrêtons d’acheter leurs nouveaux téléphones jusqu’à ce qu’ils en sortent un qui nous rende vraiment plus productifs, simplifie nos existences, ne nous enferme pas dans le cercle vicieux des réseaux sociaux, alors d’un seul coup, le contenu de leurs papiers de recherche ne sera plus centré sur la construction de meilleurs écrans, mais sur la manière de rendre leurs consommateurs plus heureux.

Quelles actions pourraient-ils engager dans cette optique ?

Application Screen Time sur iOS

La technologie peut nous rendre plus conscients, plus enclins à investir dans notre bonheur. Par exemple, dans la dernière mise à jour iOS, Apple a mis en place Screen Time, un outil de santé digitale, qui vous dit toute la vérité sur l’usage que vous faites de votre téléphone. Cette option vous permet de savoir combien de fois par jour vous regardez votre appareil, combien de temps vous passez sur chaque application, et vous fournit des outils pour agir en conséquence. Vous pouvez par exemple fixer une limite au temps que vous pouvez passer sur une application donnée ou à la durée à laquelle votre écran peut rester allumé, ou encore couper complètement l’accès à certaines applications quand vous devez vous concentrer.

L’un des principaux problèmes dans la tech aujourd’hui est que l’addiction a de la valeur. Facebook souhaite que vous demeuriez scotché sur son site, car de cette manière, vous verrez davantage de publicités. Par conséquent, si nous parvenons à mieux contrôler la manière dont nous utilisons nos téléphones, et cessons de passer autant de temps sur Facebook, par exemple, ils seront contraints de changer leur modèle d’affaire, de miser sur des publicités plus ciblées.

En prenant des actions concrètes pour devenir plus heureux, les consommateurs peuvent remettre les grandes entreprises technologiques sur les bons rails.

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