Les tiroirs où dort ma plume

Sandra Dulier Auteur
Poésie et Francophonie
2 min readDec 20, 2016

Les tiroirs où dort ma plume ont à leurs papiers des encres aux horizons inclinés, poudre claire d’une lune d’été. Là, le jour somnole ses aubes comme des feux de bengale en ciel étoilé. Tu n’approcheras jamais le sommet d’une dune comme tu le ferais d’une aurore boréale : tout mystère dans le vent des marées.

Le Poète connaît des voiles les boussoles du voyage, ces regards humains aux mains creuses de vie, pêchant dans la crique de leurs souvenirs quelque note bleue en signet de plage. Vert ou gris, j’ai oublié le nom de ces coques aux nacres annuelles qui sèment leurs sillons d’écume à l’ouest de leur mémoire.

Comme le chant des sirènes, nous aimons tous l’envoûtement des oublis, citadelles de sable rendues à l’origine du monde. L’Homme est un marin au flou migratoire. Il rejoint ainsi tous les mortels Icare qui peuplent encore d’une averse–nuage leurs rêves d’envol. Il gardera alors comme un trésor les mots indicibles qu’un mage voyant du nom de Poète a laissés en Terre–Neuve, sous ces avides patiences qui ornent encore le jour disparu.

Et d’un flux de mots jaillit la lumière, miracle renouvelé de l’Alchimiste, transformant l’encre noire d’un fond de chêne en ramure–soleil. Il restera à ce chaman des Muses la fragile tâche de déposer en quelques lignes tout le précieux d’un humble silence pendant que la plume, en volutes tactiles, croîtra sous l’Astre ses vers déchus.

Il faut de longs voyages pour quelques gouttes de sagesse cryptées de lune.

Extrait de Carnets poétiques de Sandra Dulier, présenté à Livre Paris, le dimanche 26 mars 2017 de 10h à 14h, stand TheBookEdition (1-D62)

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