“Je ne comprends rien à la politique !”

Nous terminons ces témoignages par un problème pédagogique. On constate que la plupart des gens veulent s’intéresser à la politique, mais souvent il leur est difficile de comprendre ce milieu qui semble réservé aux initiés.

Un apprentissage collectif

Céline Braconnier et Jean-yves Dormagen expliquent que voter n’a rien d’un geste spontané mais qu’il relève d’un apprentissage collectif. Ils ont ainsi observé dans la cité des cosmonautes, un milieu populaire qu’ils ont étudié pendant cinq ans, que c’est en groupe, en couple ou en famille que l’on se rend aux urnes.

“C’est sous l’influence directe de ses proches qu’on se retrouve à consacrer une partie de son dimanche à remplir un devoir dont les fondements politiques et moraux sont très imparfaitement maîtrisés. L’influence des proches s’apparente à de la contrainte ou du contrôle — le mari qui entraîne sa femme, le père qui surveille ses enfants, la jeune femme qui va chercher sa sœur — mais aussi à de la conviction, voire de la construction de sens.”

Ces personnes vont voter en pensant que l’élection aura un impact réel sur la vie de ces familles issues d’un milieu populaire. Les promesses peuvent donc jouer en la faveur ou la défaveur de cette communauté. Le vote a donc un double sens :

“En allant voter, les électeurs vont dire doublement qui ils sont, non pas comme personne aux opinions privées, mais comme membres de groupes : ils sont citoyens et agissent ensemble pour décider de l’avenir de la nation.“

Mettre un bulletin dans l’urne n’a rien de spontané mais relève d’un apprentissage collectif. L’éducation politique est un enjeu pédagogique important mais il devient difficile de justifier l’importance du vote face à cette crise grandissante de la démocratie. Sans éducation politique, les électeurs se réfugient en votant pour des personnes avant des programmes.

La peopolisation politique

On parle aujourd’hui d’une politique des programmes qui se déplace vers une politique des personnes. C’est la peopolisation de la vie politique. L’homme se montre et se vend lui-même pour montrer aux Français qu’il est comme eux. Christian Delporte explique :

“On s’intéresse assez peu à ce que les hommes politiques disent, et de plus en plus qu’à ce qu’ils sont. On ne demande plus seulement à un homme politique d’être compétent : on lui demande également d’être chaleureux, sympathique, proche…, ce qui l’amène à devoir créer un lien affectif avec l’opinion pour se faire élire»

Cette exposition de la vie privée transforme peu à peu notre démocratie. En mettant en avant des personnes, les démocraties se présidentialisent. Le pouvoir exécutif devient le pouvoir central, ce qui est un énorme changement car la loi qui a toujours été la plus importante. Pierre Rosanvallon explique :

“ Être simplement gouvernés par la loi, c’était la vision des révolutionnaires français, l’exécutif n’avait qu’une mission technique. Mais il est devenu un pouvoir central et c’est lui qu’il s’agit aujourd’hui de faire rentrer en démocratie.”

Conclusion :

Essayer de comprendre la politique nous renvoie souvent à la compréhension des personnalisés politique. C’est un fait qui pose clairement un problème à nos démocraties. De plus, la seule interaction qui existe entre gouvernants et gouvernés c’est les rendez-vous électoraux. La présidentialisation de notre démocratie semble être une nouvelle conséquence de l’abstention mais met en évidence un autre dysfonctionnement de notre démocratie. Il devient donc de plus en plus important, mais de plus en plus difficile de convaincre et se convaincre d’aller voter.

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