#quarante-cinq

David Lallemand Pesleux
#Presque50
Published in
5 min readMar 28, 2018

92% des jeunes gays espèrent se marier ou vivre dans une relation monogame.

Allez, un petit dernier pour la route. C’est que la fin approche. Je n’ai jamais imaginé que cet exercice sans importance me conduirait à évoquer si souvent la réalité rêvée (parfois dans un cauchemar) des homosexuels à notre époque. Mais, à cause des algorithmes et du moment sans doute, le sujet s’est imposé de lui-même. Une nouvelle fois avec cet article de Gaystarnews.com (un site internet britannique d’information concernant la communauté LGBTQI+ auquel je ne suis pas abonné mais dont je vois régulièrement défiler les articles dans mon fil d’actualité Facebook, les algorithmes je vous disais…) qui évoque un sondage auprès de 834 couples gays dont les résultats montrent que les relations monogames n’ont jamais été autant à la mode.

Contrairement à la caricature des couples homos libertins, sans attaches solides, fondés artificiellement sur l’idée de la famille traditionnelle qui serait de toute évidence réservée aux couples hétérosexuels, c’est pourtant bien le modèle qui emporte le plus de suffrages chez les couples de garçons entre 18 et 39 ans (à en croire les résultats du sondage). Plus de 50% des couples interrogés considèrent que c’est le nec plus ultra. 652 se déclarent exclusivement monogames. 152 plutôt dans une relation monogame. Deux tiers affirment être en couple sans avoir «triché» depuis plus de cinq ans. Je confirme être une midinette à mes heures et j’avoue que ces statistiques me parlent. Je ne porte aucun jugement, qu’il soit de valeur ou autre, sur celles et ceux qui choisissent un autre style de vie, une autre manière de trouver un sens dans leur relation intime à l’autre. Quel que soit l’autre. Au contraire, je suis heureux que toutes les formes de rencontres soient possibles selon les désirs et les envies de chacun.e. Mais je reconnais que je suis de ceux qui illustrent les statistiques de Gaystarnews.com.

C’est sans doute pour cela que j’ai été secoué (pour utiliser un euphémisme) par les commentaires que j’ai pu lire sous l’article posté sur le profil d’un de mes amis Facebook récemment. Une collection de clichés enfilés comme des perles sur un collier d’inepties par des membres de cette «communauté» à laquelle j’appartiens, à mon corps défendant.

«Ca c’est la meilleure! Monogame ? No way»

«Statistiques à la con… Alors que la majorité des mecs ne veulent que du cul !!!!!!!!»

«Gay et monogame ! J’aurais tout vu ! Pourquoi pas hétéro et fan de Mylène Farmer ?»

«So boring…»

«Young beautiful, married and monogamous?? And then…. they go to clubs and they taste other meat and they can’t wait for the next one… we are all the same!»

… Non, nous ne sommes pas «all the same». Le simple fait de nous réduire à cela est en soi une hérésie. Je me battrai pour que quiconque pense comme ça puisse exprimer librement sa pensée. Mais je trouve cette pensée réductrice et, je me dois d’être honnête, complètement idiote. Je me suis contenté d’un commentaire du style «je suis consterné par ce que je lis ici, mais je n’ai pas d’humour et je suis vieux» pour marquer à la fois mon étonnement (devant tant d’animosité face à l’expression d’une certaine forme d’engagement «pour la vie») et ma désapprobation. Et puis, j’ai lu ce commentaire à la suite des précédents :

«I hope you guys, spitting on the concept of being happy (for real) with the person you love, are having the life you always dreamed about. I always wonder how can so many, be in love with one person, and always want others? (I am not talking about 10 or 20 years relationship, that is maybe something else), but starting from the idea that nobody can be monogamous … wow. I am shocked. Why bother looking for a relationship then? We create this stupid «open» world, and we are drowning in it. There is nothing better and stronger and nicer than having a husband that loves you, and when he tells you that, and looks in your eyes, doesnt see the ass of the other guys he is fooling around with. I know I am a dreamer, and a believer, but I prefear to fight, not to give in to this «open» menthality that wont make ever anyone happy. People will just settle for what they think gives them everything, when in fact they are missing out the most important things in a relationship. And yes, I know, temptations, bla bla bla, there are no temptations when you love your man. When you respect him. When you really want to build up a life with him. There is so much more to want than just random sex with others. If we could just look at happiness as a longterm thing, instead of a moment of pleasure with strangers, maybe we could all become better.»

And it made my day.

Pour celles et ceux qui ne parlent pas l’Anglais, l’auteur du commentaire se fait l’humble défenseur d’un idéal amoureux où l’exclusivité d’une relation n’est pas conçue comme un obstacle à l’épanouissement de soi et de l’autre mais, au contraire, comme sa condition sine qua non. «Il n’y a rien de plus enviable que d’avoir un mari qui vous aime et qui, quand il vous le dit et vous regarde droit dans les yeux, n’y rencontre pas le cul des autres garçons avec qui il s’envoie en l’air. Je préfère me battre et ne pas entrer dans ce jeu de la soi-disant «ouverture» d’esprit qui finit par ne rendre personne heureux». C’est mon credo. Bien sûr tout est possible. Le meilleur comme le pire. Et, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, ce n’est pas l’âge qui limite les possibles. Je regrette n’avoir pas été convoité à 20, 25 ou même 30 ans comme je le suis à presque 50. Parce qu’aujourd’hui j’ai choisi mon camp. Celui de la vieille école (qui semble séduire les jeunes générations puisque ce sont elles qui plébiscitent le modèle), je n’ai pas l’intention de faire semblant. Mais comment vous dire le plaisir qu’on ressent à faire vivre chaque jour ce que d’aucuns pensent impossible ou désuet? Comment vous dire le bonheur de travailler dans les recoins les plus sombres d’un quotidien banal, la recherche du plaisir. D’être ensemble. Vraiment. Pour le meilleur et pour le pire.

D’émotions mitigées à la lecture de ces commentaires j’ai fini par ressentir surtout de la tristesse et de la pitié pour celles et ceux (en l’occurrence) qui n’ont pas connu cette plénitude, cette liberté-là.

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David Lallemand Pesleux
#Presque50

Spécialiste en généralités. Journaliste à mes heures. Au service des droits de l’enfant. J’avais un mois en mai ‘68.