Palmyre
Syrie
Il erre en compagnie du froid, gardant les palmiers comme point de référence, il s’enfonce dans le désert. Sur l’arête d’une dune, il observe, ému, les rares brins d’herbe qui dansent et dessinent sur le sable des cercles parfaits. Dans le lointain, résonne la voix du muezzin, signal du retour. Là-bas, dans Palmyre, l’attend un thé chaud.
Il est assis, le regard oublié dans un autre âge. Appuyé sur sa canne, il raconte dans un français approximatif sa campagne de France. Ses mots, ventriloques, sortent de la bouche de son petit-fils qui les rend admiratifs.
Assis à la table voisine, les deux voyageurs écoutent ce lent monologue et s’étonnent de cette vénération pour le général.
Leurs regards vagabondent sur la ville et son oasis, sur les ruines de la cité antique, terrain de jeux de tant d’enfants, sur la citadelle, rayonnante sur sa colline, qui rend hommage à l’astre couchant.
Ils marchent sans se poser, malgré la faim. Ils écoutent la rue, puis une voix qui les invite et qu’ils suivent. Une pièce chaleureuse les reçoit. Un foulard retrouve sa tête. Les mots sont rares mais précieux, surtout quand ils viennent du regard. Même si l’accueil aura son prix, en sortant, réajustant les polaires, boîtes de figues sous le bras, ils remercient les étoiles pour cette belle rencontre.
La reine Zénobie proclame son rêve d’un empire romain d’orient et chrétien. Rome s’en offusque, Rome la capture, Rome la marie, veut l’oublier.
Pourtant, la ville impériale l’observe, impuissante. Elle marche éternellement dans les rues de sa ville, longe le splendide temple de Baal. Sous la lune, elle entraîne les voyageurs dans la vallée des tombes. Les tours, où reposent tant de générations, les subjuguent. Le sable et les chiens offrent un concert en l’honneur de la grande reine.
Mes histoires s’éteignent. Ces légendes que le vent m’a racontées, je vous les offre. Contez ce pays des sables paisibles, afin qu’il le redevienne.
Buenos Aires le 20 mars 2014